Les trois leçons à retenir du tir du missile de croisière MdCN à partir du sous-marin Suffren

Le 20 octobre 2020, le Suffren, premier de série des six sous-marins nucléaires d’attaque (SNA) du programme Barracuda, a réalisé avec succès un tir d’essai de Missile de croisière naval (MdCN) au large du site DGA Essais de missiles de Biscarrosse (Landes).
Michel Cabirol
Avec le tir d'un missile de croisière naval MdCN depuis le sous-marin d'attaque Suffren, la France montre qu'elle est parfaitement capable de se doter de capacités militaires de pointe et de le faire seule
Avec le tir d'un missile de croisière naval MdCN depuis le sous-marin d'attaque Suffren, la France montre qu'elle est parfaitement capable de se doter de capacités militaires de pointe et de le faire seule (Crédits : Ministère des Armées)

Avec le tir d'un missile de croisière naval MdCN depuis le sous-marin d'attaque Suffren, la France a rejoint le tout petit club mondial des puissances dotées d'une telle capacité. La ministre des Armées Florence Parly a salué cette réussite comme il se doit : "Pour la première fois, un sous-marin français tire un missile de croisière. Ce succès confère une nouvelle capacité stratégique à notre marine et la place parmi les meilleures au monde. Ce nouvel armement est une véritable rupture (...) Les forces sous-marines françaises pouvaient jusqu'à présent frapper des sous-marins et des navires de surface. Elles peuvent désormais détruire des infrastructures terrestres lourdes, à longue distance".

Vers une mise en service du Suffren en 2021

Ce tir a permis d'achever la qualification de l'intégration de l'ensemble des armements du Suffren, réalisée dans le cadre des essais en mer du navire conduits par la Direction générale de l'armement (DGA) depuis avril dernier. Le MdCN est adapté à des missions de destruction d'infrastructures de haute valeur stratégique. Après les frégates multi-missions (FREMM), les SNA Suffren sont les premiers sous-marins français équipés de cette capacité de frappe conventionnelle dans la profondeur. Cette réussite marque une étape importante des essais du sous-marins en vue de sa qualification globale par la DGA. Sa livraison à la marine nationale aura lieu d'ici à la fin de l'année 2020, avant son admission au service actif en 2021.

Pendant ses essais en Méditerranée, le Suffren a également effectué avec succès, au large du site de DGA Essais de missiles basé sur l'île du Levant (Var), un tir d'essai de missile anti-navire à changement de milieu de type Exocet SM39. Il a aussi procédé à plusieurs tirs d'essai de torpille lourde modèle F21. Cette arme de nouvelle génération est destinée à terme à l'ensemble des sous-marins de la Marine nationale.

Quelles leçons peut-on tirer de cet essai réussi ?

La France montre qu'elle est parfaitement capable de se doter de capacités militaires de pointe et de le faire seule, n'en déplaise aux partisans d'une Europe navale fédérée. Question de volonté politique. Car ce programme est le "fruit d'années d'efforts et d'investissements, notamment permis par la loi de programmation militaire (LPM) 2019-2025", a d'ailleurs rappelé Florence Parly, citée dans le communiqué du ministère des Armées. Si la LPM est respectée, la capacité est bel et bien au rendez-vous : de A à Z, de la conception au système de préparation de mission jusqu'au lancement et à l'analyse des résultats, cette capacité de lancer un missile de croisière sur plus de 1.000 km depuis un sous-marin est nationale (Marine nationale, Naval Group et le missilier MBDA).

La France rejoint donc un tout petit club mondial des puissances dotées de cette capacité. Ce sont déjà le cas des Américains et des Britanniques (avec le Tomahawk), de la Russie (avec, entre autres, le Kalibr), et de la Chine. Le Pakistan et l'Inde y travaillent mais n'ont pas encore acquis la capacité totale. Avec cette capacité, la France acquiert un atout diplomatique de plus qui lui permet de tenir un rang. Une capacité qui ne se partage pas ou ne se dilue pas. Enfin, troisième et dernière leçon, la France possède un outil supplémentaire à mi-chemin de la diplomatie et de la guerre. Ce nouvel outil lui permet d'élargir sa palette dans sa stratégie de dissuasion, notamment celle qui est invisible avec les SNA et les SNLE, qu'elle soit d'ordre conventionnel ou nucléaire. La France a également sa dissuasion visible avec le porte-avions et son aviation embarquée dotée (ou non) du missile aéroporté nucléaire.

Michel Cabirol

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