Mini et micro-lanceurs : Emmanuel Macron met la France en mode compétition

« La France a des futurs SpaceX ». Emmanuel Macron, qui sera mardi à Kourou, veut les faire émerger (HyprSpace, Latitude, MaiaSpace, Sirius). Comment ? A l'image des Etats-Unis, la France souhaite désormais acheter des services de lancement. Le CNES ne financera pas le développement des mini et micro-lanceurs français engagés dans une compétition à l'échelle européenne.
Michel Cabirol
Opérationnel entre 1970 et 1975, l’Ensemble de lancements Diamant (ELD) doit reprendre du service pour accueillir les mini et micro-lanceurs français et européens.
Opérationnel entre 1970 et 1975, l’Ensemble de lancements Diamant (ELD) doit reprendre du service pour accueillir les mini et micro-lanceurs français et européens. (Crédits : CNES)

Au moment où la France organise les Jeux Olympiques, Emmanuel Macron souhaite mettre la filière spatiale française en ordre de marche, ou plutôt de courir, pour gagner la compétition européenne. Car les mini-lanceurs français sont en concurrence avec des rivaux très solides situés principalement en Allemagne (Isar Aerospace, RFA One et HyImpulse) et en Espagne (PLD Space). Compétiteur dans l'âme, le chef de l'État, qui sera mardi au Centre spatial guyanais (CSG) à Kourou, souhaite insuffler un nouvel esprit de compétition. Face à ces changements, l'Élysée estime que « la France est parfaitement préparée et est en train de prendre ce virage dans ce domaine éminemment stratégique ».

« Il y a une compétition entre les différents pays qui est très forte et il y a une compétition, même avec les pays européens qui, chacun, veulent se lancer dans le domaine. La France, qui est le premier budget spatial européen, est challengée », souligne-t-on à l'Élysée.

Au final, il n'en restera pas beaucoup de mini et micro-lanceurs en Europe dans cinq à dix ans à venir sur le marché des services de lancement. Deux tout au plus. D'autant que le seul acteur actuellement sur le marché (l'opérateur américain Rocket Lab) perd beaucoup d'argent (182,6 millions de dollars en 2023) malgré un chiffre d'affaires en nette hausse (244,6 millions de dollars l'an dernier, contre 211 millions en 2022). « Nous prévoyons continuer à subir des pertes nettes au cours des prochaines années et nous pourrions ne pas atteindre ou maintenir la rentabilité à l'avenir », a estimé Rocket Lab dans son rapport annuel. De quoi faire réfléchir. Toutefois, l'Élysée estime qu'« il y a une demande pour le lancement. Après, il faut être compétitif et il faut être capable de lancer pour pas cher. C'est tout l'enjeu de ce type de compétition ».

La France a des futurs SpaceX

Pour gagner cette compétition, le CNES a identifié quatre champions. Pas de surprise dans les lauréats sélectionnés, qui seront annoncés par Emmanuel Macron. Qui sont les sélectionnés ? Les startups Latitude et HyprSpace ont remporté l'appel d'offres pour des micro-lanceurs capables de mettre en orbite une charge utile entre 100 et 200 kg à 400 kilomètres d'altitude. Latitude devrait effectuer son premier vol fin 2026 tandis que HyprSpace en 2027. La startup, Sirius Space, et la filiale d'Arianegroup, Maiaspace, ont quant à elles été sélectionnées dans un autre appel d'offres visant à mettre en orbite une masse plus importante à plus de 600 kilomètres d'altitude (700 kg pour Sirius, 1,5 tonne pour MaiaSpace). Sirius opérera son premier vol fin 2027 alors que MaiaSpace vise plutôt 2027. Opus Aerospace, qui semble être l'un des premiers perdants en France dans cette course, ne lâche pas. Il doit lancer dès juillet de Kourou son démonstrateur suborbital Mesange (4,5 mètres de haut) pour tester des technologies, notamment un bouclier thermique, pour le développement d'un mini-lanceur.

« C'est un message très fort parce que ça veut dire que la France a des futurs SpaceX », assure l'Élysée.

Dans le cadre des financements de France 2030, l'État va acheter aux opérateurs sélectionnés leur premier lancement. Un montant de près de 400 millions d'euros est dédié à ce programme de lancements. Le CNES verse un acompte à la signature du contrat de lancement, et paiera le solde une fois la charge utile mise sur la bonne orbite. « Il y a surtout de l'argent quand vous réussissez votre vol », souligne la présidence de la République. Les lancements achetés sont « des vols test où on ne met pas les satellites les plus importants ».

Changement de dogme

A l'image des Etats-Unis (NASA et Pentagone) qui achètent des services de lancement aux opérateurs américains (SpaceX, ULA - Boeing et Lockheed Martin -, Blue Origin, Rocket Lab), Emmanuel Macron souhaite marcher dans ces pas. Et il veut désormais un écosystème plus compétitif en France. « C'est aussi une nouvelle façon de faire sur la façon d'accompagner ces acteurs (Latitude, HyprSpace, Sirius, MaiaSpace, ndlr), c'est-à-dire qu'on en est moins dans une logique de co-construction, on est plus dans une logique : 'on vous achète un service'. C'est ce qui se fait beaucoup, notamment dans le système américain, pour justement inciter au maximum les startups à réussir et à gagner », explique l'Élysée.

« On achète des lancements, on payera au lancement. C'est très différent d'un mécanisme où vous donnez des subventions au fil du développement. Là, vous dites aux acteurs : il y a une petite partie que je vous donne avant, mais le gros du paiement viendra à la fin si vous avez tenu les délais et si vous avez réussi à envoyer la masse de 1,5 tonne à la bonne date. Je pense que c'est un vrai changement de culture et de façon dont on soutient l'écosystème spatial et que le président porte et qui est en train de se mettre en œuvre », analyse-t-on à l'Élysée.

C'est cette transformation que le président français souhaite mettre en orbite grâce aux startup entre autres. Il y travaille au moins depuis 2021. Mais, en décembre dernier, face à l'Italie et à l'Allemagne qui ont clairement annoncé qu'ils voulaient ravir le leadership à la France, Emmanuel Macron a appuyé sur l'accélérateur en affirmant à Toulouse à l'occasion d'un bilan des deux premières années de France 2030 qu'on « va se battre, on sera les meilleurs et on consolidera autour de nous, sur les lanceurs comme sur les constellations ». Tout le monde devrait être gagnant, selon l'Élysée. « Ce que les États peuvent espérer, c'est d'avoir des acteurs plus compétitifs qui, à la fin, non seulement gagnent des marchés, et peut-être coûtent un peu moins cher », estime la présidence de la République.

Transformation du Centre spatial guyanais

« Le but est de faire de la base de Kourou un peu le grand aéroport spatial de l'Europe », affirme l'Élysée. Dans le cadre de la transformation du monde spatial, la France va accompagner la transformation du CSG, qui est un site unique par son positionnement et stratégique pour l'autonomie de l'accès à l'espace pour la France et l'Europe. Dans ce cadre, l'État français a investi 50 millions d'euros dans le CSG pour accueillir les mini-lanceurs, notamment construire de nouveaux pas de tir adaptés. « Le CSG cherche à attirer, exactement comme un aéroport classique, le futur des lancements, donc à la fois pour des mini-lanceurs français évidemment, mais aussi pour d'autres mini-lanceurs », souligne l'Élysée.

Michel Cabirol

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Commentaires 5
à écrit le 25/03/2024 à 9:30
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Tout ce que touche ce personnage, il le casse. Alors qu'il s'éloigne de Kourou et laisse faire ceux qui savent; Qu'il aille jouer au Touquet au char à voile;

à écrit le 25/03/2024 à 8:37
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Il est étrange que vous accordiez foi aux propos du personnage. A part l'âge, c'est très Biden comme sortie.

à écrit le 25/03/2024 à 8:36
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"la plus grosse fusée ariane qui bizarremment était autopiloté par une ordinateur pour Ariane 4." Pas vraiment non, revoyez vos sources.....et l'ordinateur était un garçon....

à écrit le 25/03/2024 à 7:41
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Avnt tout Ariane 6 et l'espace européen et français il faut que la France reparte de l'avant dans le spatial et que l'on puisse envoyer des spationautes sur la Lune et sur Mars. On sait envoyer des satellites dans l'espace proche, faire fonctionner d...

à écrit le 25/03/2024 à 7:28
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"« La France a des futurs SpaceX »" Faut qu'il arrête vraiment notre président, il commence à faire de la peine là...

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