Mini-lanceurs : Emmanuel Macron relève le défi lancé par l'Allemagne

Le chef de l’État français a relevé le gant. L'Allemagne avait obtenu lors du dernier sommet de l'Agence spatiale européenne le lancement d'une compétition dans les domaine des mini-lanceurs. « On sera les meilleurs », a martelé Emmanuel Macron.
Michel Cabirol
Le mini-lanceur Spectrum d'allemand Isar Aerospace sur le pas de tir d'Andøya
Le mini-lanceur Spectrum d'allemand Isar Aerospace sur le pas de tir d'Andøya (Crédits : Isar Aerospace)

Emmanuel Macron, qui aime les défis, n'est pas homme à craindre la compétition. Il l'a montré notamment lors deux dernières élections présidentielles où il a fait preuve de pugnacité pour se faire élire président. Dans un discours ambitieux et volontariste, le chef de l'État français a donc relevé le défi lancé par l'Allemagne : aujourd'hui dans les mini-lanceurs, demain dans les lanceurs lourds pour succéder dans une dizaine d'années à Ariane 6. « On va se battre, on sera les meilleurs et on consolidera autour de nous, sur les lanceurs comme sur les constellations », a lancé Emmanuel Macron de Toulouse, à l'occasion d'un bilan des deux premières années de France 2030.

« Si j'ai un mot en toute franchise, on peut regretter que l'Europe ne soit trop divisée, a regretté Emmanuel Macron à Toulouse. Alors je vais être simple. Nous, on s'est battu pendant des mois et des mois en disant, la souveraineté européenne, c'est l'unité européenne. Malheureusement, on a certains de nos partenaires historiques (Allemagne et Italie, ndlr) qui sont devenus des compétiteurs. Ils ont dit : « Non, on a décidé, on va y aller ». Dont acte. Je vais être simple, on va y aller au carré pour être les meilleurs ».

Emmanuel Macron en a l'intime conviction. « Il n'y a pas de souveraineté spatiale si l'Europe perd son accès à l'espace. C'est pour cela qu'on a raison de se battre pour garder un accès français, européen à l'espace », a-t-il martelé. La France a besoin d'un lanceur pour ses propres besoins nationaux souverains mais aussi pour pérenniser une filière duale (accès à l'espace et dissuasion). C'est également vrai pour les cargos qui iront ravitailler les stations internationales publiques et privées dans le futur. « Si, pour aller vers ces stations, les seuls moyens cargos sont ou des entreprises indiennes ou chinoises ou américaines, on aura tout perdu c'est-à-dire qu'on perd là aussi la propre capacité d'envoyer les Thomas Pesquet de demain dans l'espace où on devra payer très cher à d'autres. Ce serait une folie », a-t-il expliqué. L'État soutiendra les projets, dont celui de « The Exploration Company », présidée par Hélène Huby.

Compétition, puis coopération ?

Certes, Emmanuel Macron aurait préféré une coopération (surtout avec l'Allemagne) mais le chancelier allemand Olaf Scholz a préféré la compétition pour pousser ses industriels à détrôner la France dans cette filière jusqu'ici d'excellence. Cette compétition a été actée début novembre à l'issue d'un sommet de l'Agence spatiale européenne (ESA), où Berlin a décroché son Graal en arrachant à Rome et Paris l'ouverture à la concurrence dans le domaine des mini-lanceurs. Emmanuel Macron veut de futurs Elon Musk français qu'ils viennent « de Béziers, de Pau, de Tarbes, de Besançon, de Dunkerque ou d'ailleurs ».

Pour le président, il va de soi qu'après la compétition, il faudra réunir toutes les forces pour affronter la compétition internationale proposée par les Etats-Unis, la Chine, la Russie et bientôt l'Inde. « À un moment, il faudra qu'on se retrouve autour de la table parce qu'il faudra de toute façon un acteur européen, parce que face aux Indiens, aux Chinois, aux Américains, on va devoir être sérieux entre Européens. Sinon, ce sera de l'autophagie (destruction d'une cellule par ses propres éléments cellulaires, ndlr). Et on n'a aucune envie de ça. Donc, il faudra reconsolider », a-t-il expliqué. Dans le domaine spatial, « on ne peut pas se satisfaire d'un monde où toutes les sociétés de demain seront américaines ou chinoises dans ce domaine », a-t-il insisté.

Des acteurs français en marche

La France entretient une compétition nationale dans le domaine des mini-lanceurs dans le cadre de France 2030. « On a déjà réalisé deux premiers essais de moteurs de micro-lanceurs. On a plus de huit projets pour les six micro-lanceurs français qui sont en développement et qui avancent en parallèle, qui permettent d'envisager un minilanceur opérationnel d'ici 2026 », a rappelé Emmanuel Macron. Outre Maiaspace (ArianeGroup), des startups comme Hyperspace, Latitude, Dark et Opus Aerospace sont dans la course pour développer leur projet de mini-lanceur. « On est en train de révolutionner les lanceurs avec ce qu'on fait avec France 2030 et c'est un changement copernicien là aussi », s'est enthousiasmé le président.

A cet égard, HyPrSpace a annoncé mardi qu'en partenariat avec Telespazio France et CT Ingénierie, il a décroché un nouveau financement pour le projet PADA1 d'un montant de 35 millions d'euros dans le cadre de l'appel à projet France 2030 pour développer un mini et micro-lanceur. Dans la continuité du premier volet d'un premier succès auprès de France 2030 remporté en 2022, HyPrSpace développe sa technologie de propulsion hybride innovante afin de motoriser le véhicule orbital et sub-orbital, dont le lancement est prévu pour le premier trimestre 2026.

Michel Cabirol

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Commentaires 17
à écrit le 20/12/2023 à 16:25
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@ lLEONCE am 12.12.2023 um 12:23 Uhr La France a également refusé dans le passé des projets européens s'ils ne répondaient pas à ses intérêts et souhaits réels ou supposés. La communauté européenne de la défense prévue en 1952 a échoué. La France s'...

à écrit le 20/12/2023 à 16:13
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@ lachose "L'armée de l'ombre" Mieux a dit: L'armée des morts-vivants.

à écrit le 17/12/2023 à 11:55
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Je parlerais plutôt de coopétition avec l'Allemagne, l'Italie, et d'autres pays européens, plutôt que de compétition. Le dernier exemple (HyPrSpace) donné dans l'article le montre bien : Telespazio France est tout de même détenue à 67% par Leonardo, ...

à écrit le 17/12/2023 à 10:34
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La France , avec des présidents incompétents , plus soucieux de leurs maitresse que des affaires de la France, a été trop naïve dans la construction européenne , depuis Mitterrand , ils ont fait confiance à l'Allemagne , malheur à eux . L'Allemagne...

à écrit le 13/12/2023 à 15:58
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@ Leonce Chaque État doit prendre la décision avantageuse pour son propre pays. Si la France pense que cela aurait plus de succès qu'avec d'autres pays seuls, cela devrait se passer de projets communs. Les Français doivent également autoriser le mêm...

le 13/12/2023 à 18:16
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"Nous n'arrivons pas à sauter par-dessus nos ombres". ​ L'Armée des ombres

à écrit le 13/12/2023 à 12:23
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@ Leonce La coopération doit avoir lieu sur un partenariat et apporter les mêmes avantages des deux parties. Mais je ne vois pas cela dans les projets franco-allemands. La France veut toujours dominer. L'équipe française appelle à un leadership du s...

à écrit le 12/12/2023 à 21:05
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Le programme spatial français c'est un peu comme omo sans bouillir :" touiti rikiki le supo mais maousse chero !

le 10/01/2024 à 9:01
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Oui, mais comme le Roitelet l'a martelé, nous aurons des résultats "au carré ". Et dites moi ce que ça fait un rendement (par définition inférieur à 1) au carré ? Réponse : encore moins !

à écrit le 12/12/2023 à 14:24
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La France et ses fameux PLANS alors que tout le monde connait la suite!!! A chaque fois, la désillusion.....Dans les Années 90 la France avec son plan Minitel allait devenir le leader dans le Telecom, puis années 2000 la Plan Machine-Outils de Chir...

le 12/12/2023 à 16:31
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Oui, par contre nous n'avons pas eu un plan pour devenir un pays du tiers-monde mais nous y réussissons. Et l'opposition de gauche au lieu de constater la stérilité du dirigisme demande encore plus de planification...

le 10/01/2024 à 8:55
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HyprSpace, c'était déjà la désillusion avant l'annonce du plan.

à écrit le 12/12/2023 à 12:32
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Ce qui compte c'est la base de lancement proche de l'équateur. Après les mini lanceur mais pourquoi faire ? Quel rendement ? L'orbite basse est saturé et va devenir conflictuelle, les constellations sont des rêves court termiste, actuellement on f...

le 10/01/2024 à 8:57
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Le New Space, c'est un crachat au visage des pionniers de l'aérospatiale française et un doigt d'honneur aux institutions de Recherche françaises dans le domaine

à écrit le 12/12/2023 à 10:46
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La rivalité entre l'Allemagne et la France est ancienne. C'est la base de l'ennemi héréditaire franco-allemand qui a ruiné l'Europe. Selon le contrat d'élysée entre Adenauer et De Gaulle, la rivalité a semblé avoir été remplacée par le partenariat. M...

le 12/12/2023 à 12:23
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Bonjour, Ici, c'est l' Allemagne et non la France qui refuse la coopération, qui serait de toute évidence un meilleure choix. Dans d'autres domaines, militaires notamment, l'Allemagne fait aussi la même chose. Il nous faudra être bons, on sait fai...

le 12/12/2023 à 12:24
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Bonjour, Ici, c'est l' Allemagne et non la France qui refuse la coopération, qui serait de toute évidence un meilleure choix. Dans d'autres domaines, militaires notamment, l'Allemagne fait aussi la même chose. Il nous faudra être bons, on sait fai...

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