Un poulet sur deux est importé : le cri d'alarme des éleveurs français

Un poulet sur deux consommé en France est désormais importé. Il est largement utilisé par la restauration hors domicile et l'industrie alimentaire.
Giulietta Gamberini
L'interprofession de la volaille française demande un renforcement de l'étiquetage indiquant l'origine.

Le potentiel, pour l'inter-profession française, est là : en France, la consommation de volaille augmente. Entre 2022 et 2023, elle a crû de 3,6%, atteignant 28,8 kilos annuels par habitant. Mais elle est portée essentiellement par deux moteurs difficiles à suivre pour la filière nationale, qui se distingue par la variété et les hauts standards de sa production : la restauration hors domicile et le poulet standard.

La première, gagne en effet progressivement du terrain sur la consommation à domicile : elle représente désormais 35% du total, contre 8% en 2005. Et le poulet s'impose de plus en plus face à la dinde notamment, en passant de 75,8% de la consommation de volaille en 2021 à 79,8% en 2023. Le poulet standard, lui, détrône implacablement le poulet sous signes de qualité. Ainsi, alors que l'offre française globale de poulet redémarre après deux années de baisse due à la grippe aviaire, le poulet standard représente désormais 72% de la production, contre 67% il y a deux ans. En même temps, le poulet Label Rouge est passé de 15,2% à 13%, et le poulet bio a dégringolé de 1 point de pourcentage, à 2%.

Un poulet sur deux est importé

Résultat : ce sont essentiellement les poulets d'importation, « essentiellement utilisés par la restauration hors domicile et les entreprises de seconde transformation pour la réalisation de produits élaborés », qui profitent de la croissance du marché, note l'interprofession de volaille de chair Anvol. Les importations de poulets en France ne cessent ainsi d'augmenter : leur part est passée de 25% en 2000 à 50% en 2023. La majorité est constituée de découpes et de préparations.

Comprendre leurs origines n'est pas évident, en raison de problèmes de traçabilité. Mais entre 2022 et 2023, les importations françaises de volaille de Pologne et d'« autres pays de l'UE » (notamment les Pays-Bas, la Hongrie et la République tchèque) ont crû respectivement de 10% et 13%. Or, c'est par ces pays européens que transite le poulet importé depuis des pays tiers. Et ce dernier a sensiblement augmenté l'année dernière : de 39% pour celui en provenance d'Ukraine, de 12% pour celui venant de Thaïlande et de 4% pour le poulet brésilien.

Pas plus de poulet brésilien

Découragés par leur incapacité à satisfaire un marché pourtant en croissance, les éleveurs de volaille français s'unissent donc au mouvement agricole pour demander à l'Etat un soutien accru, et surtout orienté au développement du poulet standard. Ils reprennent d'ailleurs les principales revendications de la Fnsea, notamment concernant la simplification des procédures et la limitation des recours administratifs.

« Aujourd'hui, on n'arrive pas à sortir des poulaillers de terre pour des raisons juridiques. II faut trois ans pour en construire un ! Mais les mêmes exigences ne s'appliquent pas aux poulets qu'on importe ! », déplore le président d'Anvol, Jean-Michel Schaeffer.

Comme les autres agriculteurs en colère, ils s'insurgent aussi contre les traités de libre-échange, dont notamment le Mercosur, qui accroîtrait de quelque 180.000 tonnes par an les 500.000 tonnes de poulet déjà importées du Brésil. Ils prônent l'instauration de clauses miroirs assorties de contrôles véritables, et réclament que les importations dans l'Union européennes d'Ukraine soient plafonnées à 90.000 tonnes par an comme en 2019 - le président de la république français a proposé 200.000 tonnes comme en 2022-2023.

« Des promesses encourageantes »

Les éleveurs exigent aussi l'abandon de projets de réglementations européennes sur le transport des animaux et les émissions des élevages, au nom de la compétitivité des élevages européens. Alors que le gouvernement vient de promettre d'accroître les contrôles de la Direction générale de concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) sur la « francisation » des produits en grandes surfaces, l'interprofession demande enfin une une généralisation et une meilleure application de l'obligation d'indiquer l'origine de la volaille, aujourd'hui limitée à la viande crue vendue en magasin ou au restaurant et peu respectée.

Si globalement les promesses formulées par le Premier ministre le 1er février leur paraissent « encourageantes », les professionnels de la volaille veulent, comme tous les syndicats agricoles, leur « concrétisation » et leur « accentuation ». La conférence de presse dans laquelle Gabriel Attal fera un nouveau bilan et de nouvelles annonces le 21 février est très attendue, comme la prise de parole d'Emmanuel Macron le 24 février à l'occasion de l'ouverture du Salon international de l'Agriculture.

Giulietta Gamberini

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Commentaires 30
à écrit le 22/02/2024 à 1:17
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Je ne pensai pas qu'il y avait autant d'étrangers dans la police.... J'espère au moins qu'ils ont leurs papiers en règle... Qu'attends le RN pour dénoncer cet état de fait, et LFI pour défendre nos "chers poulets" ?

à écrit le 21/02/2024 à 17:55
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L’Europe souhaite favoriser les productions et exportations ukrainiennes, et peu importe à von der Leyen que cela soit au détriment des producteurs français

à écrit le 21/02/2024 à 12:03
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c'est bien d'expliquer plein de choses sur les produits francais, mais c'est encore mieux de decouvrir que les produits francais sont souvent hors de prix, en particulier pour les gens modestes.... c'est comme les voitures electriques a 60.000 euros ...

le 21/02/2024 à 15:40
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@churchill : la micro économie en France, c'est le bourgeois jouant au coq en réclamant tel un du des prix revenant à demander au producteur de travailler à perte et les plus modestes vont s'assoir avec un seau de pop corn et compter les points...

à écrit le 21/02/2024 à 10:37
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C'est surtout un problème de comportements individuels. Pour ma part je préfère manger moins de poulet mais rester chez mon producteur local que d'en manger tous les jours (comme le font beaucoup de gens de nos jours) et forcément devoir acheter du p...

à écrit le 21/02/2024 à 10:32
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Ils n'ont qu'a demander au président de la FNNSEA.....

à écrit le 21/02/2024 à 9:45
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Nos fermiers généraux existent bel et bien mais à bas bruit : personne n'en parle ou si peu. Comment gèrent-ils, comment prospèrent-ils ? ceux de l'agriculture par les lois dont EGALIM non appliquées, les pressions sanitaires pour écrouler la fili...

à écrit le 21/02/2024 à 8:17
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Moi qui me croyait un indéfectible carnivore, le lobby agro-industriel est en train de me dégouter de la viande, de leur viande bourrée de produits chimiques injectés dans des animaux maltraités.

le 21/02/2024 à 9:26
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les responsables sont connu de tous mme van der leyen et la commission de bruxelles qui ont accorder a l'entreprise ukrainienne de réceptionner tous les poulet quel pourrais importer sans droit de pénalité considérant ceci comme effort de guerre ...

le 21/02/2024 à 9:54
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Je me souviens d'une époque où part chez moi dans le 24 les fermes qui produisaient de la viande de toutes sortes étaient florissantes, tout le monde s'y rendait, eux s'y retrouvaient, producteurs et consommateurs qui formaient un cercle vertueux du ...

à écrit le 21/02/2024 à 8:04
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Donc le poulet français est plus cher !

à écrit le 20/02/2024 à 23:31
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Y a de la fraude partout comme sur l’ import des poulets qui transitent souvent via des pays européens plus libéraux comme les pays bas … ou l’ Europe de l’Est comme La Pologne ils font ce qu on appelle dans le métier «  de la remballe «  en toute...

le 21/02/2024 à 6:57
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oui vous avez raison j'ai travaillé dans ce milieu est j'en est été témoin reetiquetage , je vais vous dire une simplicité ...:aujourd'hui les entreprises a gros bénéfices le font au détriment des lois des consommateurs ,des éleveurs et des autres co...

à écrit le 20/02/2024 à 23:31
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Y a de la fraude partout comme sur l’ import des poulets qui transitent souvent via des pays européens plus libéraux comme les pays bas … ou l’ Europe de l’Est comme La Pologne ils font ce qu on appelle dans le métier «  de la remballe «  en toute...

à écrit le 20/02/2024 à 21:35
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Combien de poulets français subventionnés par nos impôts sont exportés à perte à l'étranger? (i.e. hors outre-mer)

à écrit le 20/02/2024 à 20:34
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les commentaires sont les différences entre poulets import export etc.. mais le coupable est le coq de l elysee qui n en a rien à faire des éleveurs. 14 h au salon de l agriculture comme un show obligatoire. virons le coq et protégeons nos frontières...

à écrit le 20/02/2024 à 20:19
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Attendez que les pays exportateurs se retournent contre la France et commencent à bloquer les subventions agricoles de l'UE à la France, en particulier les Espagnols et les Portugais.

le 21/02/2024 à 8:48
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Attendez que La France ne se laisse pas faire et bloque les 40 milliards qu elle paye pour des pays comme l’ Espagnec et le Portugal .. a ce petit jeu tout le monde se tient …l’Espagne est le 2 eme bénéficiaire des aides européennes après la Pologn...

le 21/02/2024 à 9:57
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Excellente proposition.Vue des états nordiques de l'ue.

à écrit le 20/02/2024 à 20:03
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Je ne mange quasiment pas viande hormis le poulet fermier made in France 🇫🇷. Quant au poulet européen, nous sommes en EU non? Aussi tout produit made in EU a sa place si Clairemont signalé et produit de façon humaine. Le poulet en barquette non i...

le 20/02/2024 à 20:19
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"tout produit made in EU a sa place" oui, sauf s'il a grandi ailleurs et est passé par un pays de l'UE (vous le découpez et zou, il a changé de nationalité, suite à cet travail, localisé). Je n'achète que du Label Rouge (= 5 repas) mais en pièces dé...

le 20/02/2024 à 20:56
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@Breizhou: Quand on a les moyens...

le 20/02/2024 à 23:01
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@Henry Les moyens de quoi ? D'acheter un I phone plutôt que de de nourrir par exemple ?

le 20/02/2024 à 23:28
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Y a de la fraude partout comme sur l’ import des poulets qui transitent souvent via des pays européens plus libéraux comme les pays bas … ou l’ Europe de l’Est comme La Pologne ils font ce qu on appelle dans le métier «  de la remballe «  en toute...

à écrit le 20/02/2024 à 19:56
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Il y a poulet...et poulet! Juste une petite différence entre un poulet de batterie aux os tout mou, à la chair molle insipide et qui pue! Et un poulet fermier de basse cour qui gambade, mange des céréales produites sur la ferme, picore de l'herbe. ...

le 20/02/2024 à 20:22
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Dans un reportage un éleveur breton disait gagner pas mal sa vie (empochait 1€/poulet) en ayant des poulets labelisés, ceux élevés en masse, il en faut 100 fois plus pour gagner autant, en leur donnant on ne sait quoi à manger (tout est livré prêt à ...

à écrit le 20/02/2024 à 19:42
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Les éleveurs français ont des années durant inondé de poulets les marchés émergeant, grâce aux subventions européennes (donc, nos impôts) qui leurs permettaient de vendre à bas prix. Les éleveurs locaux ont tous fait faillite alors qu'en France, ils ...

le 20/02/2024 à 20:24
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Quand les africains élèvent des poulets, ceux arrivés d'ailleurs coûtent moins cher = ils ne peuvent continuer leurs activités et deviennent dépendants des importations, tout est à l'envers.

à écrit le 20/02/2024 à 19:39
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Deux poulets sur deux importés ou pas sont des poulettes ,les mâles sont éliminés dés leur naissance (broyés à une époque) car ils ne grossissent pas suffisamment vite .................

le 20/02/2024 à 20:27
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Il y a deux types de poule(tte)s, je crois, les pondeuses et les à viande. On trouve du poulet mais de la poule c'est difficile. Y a une recette familiale normande de poule à la crème (normande), poule cuite à l'eau.

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