Dacia change son look et franchit une nouvelle étape de sa stratégie de croissance

La marque automobile d'entrée de gamme du groupe Renault déploie sa nouvelle identité de marque pour devenir « plus cool » et créer une nouvelle proposition de valeur. Toutefois, Dacia ne veut pas quitter son territoire de prix low cost, à l'image d'un Skoda, mais espère augmenter son panier moyen tout en installant une stratégie de défense des prix (pricing power) plus forte.
Nabil Bourassi
La nouvelle identité de marque de Dacia.
La nouvelle identité de marque de Dacia. (Crédits : GILLES GUILLAUME)

Dacia qui vend plus de voitures que Renault... Cela n'a duré que le temps du mois d'août dernier, mais l'anecdote a surpris tout le monde. Elle illustre la consolidation d'un modèle économique unique au monde imaginé il y a plus de vingt ans après le rachat de la marque automobile roumaine Dacia par Louis Schweitzer, alors PDG de Renault. Il s'agissait à l'époque d'inventer une marque low cost afin de récupérer les clients du marché de la voiture d'occasion, un marché qui pèse entre le double et le triple du marché du neuf.

La fin du décapsuleur

Quasiment trois décennies plus tard, Dacia est devenu bien plus qu'une marque d'entrée de gamme. Elle a réinventé le concept de marque populaire et rêve désormais de devenir « cool ». C'est tout l'objet de sa nouvelle identité de marque... Fini le logo écusson en forme de décapsuleur, la filiale de Renault se pare d'un logo très graphique et des couleurs kaki pour donner un côté baroudeur. Le tout en attendant un renouvellement de gamme très ambitieux.

Le nouveau Dacia veut aller chercher des fourchettes de prix plus hautes, voilà, grosso modo, le message de Luca de Meo, patron du groupe Renault, lors de la présentation de son plan de transformation stratégique Renaulution en janvier 2021. Il avait alors présenté le Bigster, un SUV de 4,60 mètres, soit 25 cm de plus que le Duster. Avec le Jogger, lancé fin 2021, Dacia avait déjà ajouté une brique dans sa gamme vers les segments supérieurs grâce à ce SUV 7 places. Dacia va également augmenter sa proposition de valeur avec E-Tech, l'hybridation à succès de Renault. « Nous ne sommes plus une marque low cost, notre crédo désormais c'est best value for money », lance Denis Le Vot, ou, en français : Dacia passe de l'entrée de gamme à une proposition de rapport qualité-prix.

En rafraîchissant son univers de marque avec des codes design plus forts, Dacia espère améliorer sa part de ventes sur les finitions supérieures, et protéger sa politique de prix, le fameux pricing power.

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Le syndrome Skoda

Cela rappelle l'évolution de Skoda dont les prix côtoient désormais ceux de Citroën, voire du Renault, et qui a même introduit un label sport sur certains modèles. Depuis, Skoda est définitivement sorti de son statut de marque entrée de gamme. Pour Dacia, le risque pourrait provenir de l'inflation qui l'a déjà forcé à augmenter ses prix... En 2021, une Sandero avait vu ses prix monter de 20%... « Nos prix de base suivent le cours de l'acier », nuance Denis Le Vot. Selon lui, le client est demandeur d'une proposition de valeur plus élevée. « Nous vendons 75% de nos Sandero sous sa version Stepway », illustre-il.  Même le Duster, alors qu'il est en fin de vie, se vend à 60% en finition 3, la plus chère, contre 40% il y a trois ans. Dacia revendique également un taux de fidélité de 75% de ses clients, soit un chiffre dans le haut du panier du marché. Denis Le Vot estime d'ailleurs que sur les 25% restant, 15% se dirigent vers Renault. Enfin, la marque attire des nouveaux clients venus d'autres marques.

Au premier semestre, Dacia a augmenté ses ventes de 6% là où le marché a baissé de presque 15%. Avec presque 600.000 immatriculations par an, Dacia est presque le principal levier de croissance du groupe Renault.

Denis Le Vot reconnaît qu'il y a un effet conjoncturel très fort. Dacia a été moins exposé à la crise des semi-conducteurs que d'autres marques compte tenu de la faible teneur de produits équipés de ce type de pièces. L'entreprise a ainsi pris le relais des concurrents étranglés par les pénuries. Elle a également pallié à l'asséchement du marché de l'occasion. Mais pour Denis Le Vot, cela ne change rien à la tendance de fond qui structure le succès de Dacia.

Les trois piliers de Dacia

Selon lui, le modèle Dacia est fondé sur trois piliers. D'abord le « design to cost », c'est-à-dire cette capacité à imaginer un modèle en imaginant un maximum d'économies de coûts. « 3.000 ingénieurs ont travaillé pendant deux ans pour reprendre la plateforme de la Clio, garder ce qui est utile et inventer la nouvelle Sandero », explique Denis Le Vot. De même que le Jogger réutilise exactement la même face avant que la Sandero est également une énorme source d'économies du design. Deuxième pilier : une industrialisation très efficiente. Dacia produit dans deux usines (sur le site historique de Pitesti en Roumanie, et la seconde à Tanger, au Maroc), avec un taux d'intégration extrêmement fort de fournisseurs locaux pour réduire les frais de logistiques au maximum. Enfin, Dacia est totalement pensé pour le marché des particuliers sans aucune remises. « Nous sommes la troisième marque à particuliers d'Europe avec 84% de nos ventes », affirme Denis Le Vot.

Le modèle étant désormais bien rodé et « inoxydable » pour citer son patron, Dacia rêve donc de plus de coolitude pour franchir une étape. La prochaine étant le nouveau Duster qui arrivera en septembre 2023. Un modèle majeur pour Dacia, gros pourvoyeur de profits, mais qui a également été un immense levier de conquête pour Renault dans les pays émergents.

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Nabil Bourassi

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