La fusion du siècle, vraiment ? Il est vrai qu'avec 8 millions de voitures vendus par an en 2019 qui lui permet de se hisser au 4ème rang mondial derrière Volkswagen, Toyota, l'Alliance Renault-Nissan-MMC, 14 marques, 185 milliards d'euros de chiffre d'affaires..., le rapprochement des groupes PSA et Fiat Chrysler sous la marque Stellantis donne le vertige. Avec cette opération, PSA, peut enfin sortir de sa condition de petit constructeur automobile plafonnant à 3 millions de voitures vendus par an (3,5 millions depuis le rachat d'Opel). Pour Fiat Chrysler, s'adosser à un groupe qui a développé des nouvelles technologies (plateformes, motorisations, usine 4.0...) lui permet de retrouver son rang d'entreprise innovante. Mais, cette fusion comporte une dimension internationale non négligeable, notamment pour PSA beaucoup plus centré sur l'Europe (80% des ventes en 2019).
Trois marchés clés
Les deux groupes fusionnés deviennent puissants sur trois marchés clés : l'Europe tout d'abord, où le groupe PSA est effectivement puissant mais aussi très rentable tandis que FCA a perdu beaucoup de terrain; les Etats-Unis ensuite, deuxième plsu gros marché mondial, qui constitue l'essentiel des profits de FCA grâce à Jeep et RAM, mais où PSA est totalement absent; et l'Amérique Latine enfin, un marché plus complexe, mais où les deux groupes ont acquis des bases solides ci et là.
Oui mais voilà, la nouvelle entité semble quasiment absente du premier marché automobile mondial, la Chine et ses près de 30 millions de voitures vendus annuellement avant la crise. Certes, ce n'est pas faute d'avoir essayé, notamment pour le groupe PSA qui vendait jusqu'à 800.000 voitures par an en 2016 (3% du marché) et visait pour les années suivantes 8% de part de marché. D'où la construction, avec son allié et actionnaire Dongfeng, d'une nouvelle usine chinoise à Chengdu, inaugurée en 2016. Mais le retournement du marché chinois en 2018 a été funeste pour le groupe français. Depuis, ses ventes se sont effondrées, pour ne représenter que 117.000 immatriculations en 2019 avec trois marques (Peugeot, Citroën, DS).
Malheureusement, FCA a subi le même plongeon sur le marché chinois. Le groupe n'y est présent avec Jeep et Fiat qui accusent une baisse conséquente de leurs ventes avec moins de 100.000 immatriculations en 2019 contre 160.000 un an auparavant. Ainsi, en tout et pour tout, la puissance de frappe commerciale de Stellantis en Chine tourne autour de 200.000 voitures par an, soit moins de 1% de part de marché. En d'autres termes: rien !
Un marché qui s'est retourné
Pour autant, la débâcle chinoise n'est pas propre à Stellantis. Elle a été générale pour les marques étrangères. Dès 2018, le consommateur chinois s'est soudainement et massivement tourné vers les constructeurs locaux, après les avoir longtemps boudés. Moins chers et bien équipés, le tout accompagné d'un saut qualitatif, les marques chinoises ont connu un boum de leurs ventes. Seules les labels premium des constructeurs étrangers ont pu résister..., à l'exception de DS qui souffre d'un gros problème de notoriété. Mais, pour tirer son épingle du jeu sur le marché chinois et attirer une catégorie de clientèle composée de nouveaux riches qui rêvent encore de voitures européennes, Stellantis pourrait bien jouer la carte Alfa Romeo et Maserati, respectivement positionnés sur le segment dits "premium" et "luxe". Ce scénario avait été imaginé en 2016 lors du lancement des Stelvio et Levante, deux SUV, et qui devaient initier une nouvelle offensive stratégique des deux marques. Les deux marques italiennes jouissent effectivement d'une forte notoriété dans l'imaginaire collectif. Pour l'heure, elles pèchent encore par une offensive produit insuffisante: trois modèles sortis ces cinq dernières années. Il leur faudra également construire un réseau, ce qui prendra du temps.
Tracasseries administratives
Le défi de Stellantis pour se relancer en Chine pourrait toutefois buter sur des tracasseries administratives. Car pour opérer en Chine, un constructeur automobile doit nécessairement passer par une coentreprise avec un acteur local (après dépôt de dossier et autorisations des autorités). Si cette obligation doit bientôt disparaître, il n'empêche pas moins que FCA et PSA sont engagés avec deux constructeurs différents (DongFeng Motors pour PSA, et GAC pour FCA). Il leur faudra donc dénouer ces joint-venture avant d'envisager de rassembler leurs opérations. Un tel chantier prendra du temps. Le groupe voudra peut-être attendre la levée définitive de l'obligation de coentreprise prévue en 2022, ce qui impliquera de racheter les parts de leurs partenaires respectifs.
Il restera alors à définir une stratégie produit et de positionnement qui réponde à un marché qui se caractérise par une concurrence est extrêmement agressive mais aussi par une demande dont le comportement reste imprévisible et erratique. Impossible pour autant pour Stellantis de rester à l'écart de ce marché puissant surtout si le groupe veut préserver son statut de quatrième constructeur automobile mondial. Le dossier chinois pourrait ainsi devenir le volet stratégique le plus attendu par les investisseurs ces prochains mois...
Sujets les + commentés