(5/5) Avec la télémédecine, le suivi des patients devient toujours plus connecté

SÉRIE SANTÉ & INNOVATION. Si elle a ralenti le recrutement de patients pour les essais cliniques et la mobilisation des hôpitaux autour des projets de recherche, la crise sanitaire n'a pas paralysé les progrès médicaux. Entre les printemps 2020 et 2022, les biotechs et les medtechs ont multiplié les développements innovants. Mais, occultés par le Covid, on n'en a pas entendu parler. Alors que la septième vague accompagne à nouveau notre été, La Tribune fait le tour des avancées médicales majeures qui vont révolutionner notre santé dans un proche avenir. Épisode 5, la télémédecine. Révolution numérique et développement des technologies de pointe ont transformé les pratiques en matière de suivi des patients. Un mouvement qui s'est poursuivi pendant la crise et accéléré par les nouveaux dispositifs médicaux connectés.
(Crédits : DR)

Avec des millions de patients confinés, la crise sanitaire a rappelé tout l'intérêt d'un suivi en dehors de l'hôpital. Elle a ainsi ouvert la voie au développement de nouveaux dispositifs connectés dans ce domaine. Parmi ces derniers, NaoX technologies (Paris) a miniaturisé le système de l'électroencéphalogramme (EEG) pour l'implanter dans des écouteurs, les « N » buds. Lorsqu'ils sont portés, les capteurs intégrés enregistrent l'activité électrique du cerveau en continu. Fondée en 2018 par Hugo Dinh, polytechnicien, et Michel Le Van Quyen, directeur de recherche à l'Inserm, la start-up se concentre pour l'instant sur l'épilepsie.

Habituellement, l'EEG se pratique à l'hôpital et nécessite de fixer des électrodes sur la tête du patient, pendant au moins une heure. Hugo Dinh explique :

« D'autres solutions d'EEG portables ont été lancées ces dernières années mais se sont souvent des sortes de serre-têtes dotés d'électrodes, encore plus stigmatisants. Nos écouteurs s'adaptent facilement au patient et leur utilisation est très simple. Le capteur est toujours posé de la même manière, en intra-auriculaire, ce qui permet une mesure stable, indépendamment du moment où ils sont portés ».

Si les indications sont moins riches qu'avec un EEG classique, la solution permet d'accéder à des données sur une longue durée et augmente les chances de repérer une crise.

« NaoX a vocation à intervenir dans le diagnostic mais surtout dans le suivi du patient. Aujourd'hui, pour la médication par exemple, le neurologue se base encore trop souvent sur des données déclaratives. Notre outil lui fournira des données objectives sur le nombre de crises, ce qui lui permettra d'ajuster le dosage voire de changer de traitement », poursuit son PDG.

Une application récolte ainsi les informations sur un téléphone et les transmet au médecin via une plateforme sécurisée.

Après avoir détecté sa première crise en 2021 et levé 4,3 millions d'euros, la jeune pousse espère obtenir la certification CE courant 2023. Aux Etats-Unis, le feu vert de la FDA pourrait intervenir dès la fin 2022.

Prothèse intelligente

La prothèse de genou FollowKnew pourrait, quant à elle, révolutionner le suivi post-opératoire. Présentée au CES de Las Vegas, elle est portée par un consortium académique et industriel réunissant notamment le CHUR de Brest, l'Inserm et le Commissariat à l'énergie atomique (CEA). Le dispositif, fabriqué en impression 3D et personnalisable, est équipé de capteurs, dont un accéléromètre. Ce système identifie certaines informations essentielles comme l'usure, l'infection, la répartition du poids, ou le descellement. Ces données sont ensuite transférées à tous les maillons de la chaîne : patient, médecins, kinésithérapeute, chercheurs, etc. Grâce à cette prothèse du futur, une nouvelle opération pourra être évitée, et elle permettra une rééducation sur mesure. La première implantation est prévue début 2024.

Dans l'avenir, la réalité virtuelle sera fortement mobilisée pour remettre les malades sur pieds. Pionnière du genre, la startup H'ability (Aube) a été récemment récompensé au salon VivaTech. Sa solution ludique a été conçue pour la rééducation des bras après des troubles moteurs et cognitifs, par exemple un AVC ou un traumatisme crânien. En établissement médical ou à domicile, elle s'appuie sur un casque de réalité virtuelle couplé à une fonctionnalité de suivi des mains.

Parcours de soins et décloisonnement

Le suivi du patient connecté a de beaux jours devant lui, après le coup d'accélérateur donné par la crise sanitaire sur le numérique en santé. Symbole de cette révolution des pratiques, le remboursement de la télésurveillance pour certaines maladies chroniques devrait être prochainement généralisé.

« Une multitude de solutions numériques sont apparues ces dernières années comme des "serious games", des logiciels de suivi des pathologies mentales, des logiciels liés aux troubles de la mobilité, ou encore des semelles connectées permettant de restituer un certain nombre de données de santé, observe William Rolland, responsable numérique en santé au Syndicat national de l'industrie des technologies médicales (Snitem). Ces différents dispositifs médicaux vont se connecter et entrer dans les parcours de soins des patients pour différentes pathologies. Tout l'enjeu sera d'évaluer leur bénéfice, d'une part sur des preuves cliniques et sur l'apport pour le patient, et d'autre part sur les aspects organisationnels. Concernant les dispositifs médicaux matériels, les concepteurs ajoutent de plus en plus un volet numérique et technologique permettant de les connecter. Le champ des possibles devient considérable, car les données de santé vont pouvoir circuler. Tout l'enjeu sera désormais de décloisonner le domicile, la ville et l'hôpital »

Selon le Snitem, près de 31% des nouveaux entrants sur le marché du dispositif médical l'année dernière étaient des start-up positionnées sur la santé numérique, et près de 42% des entreprises du secteur avaient une solution connectée ou digitale en cours de développement.

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Commentaires 2
à écrit le 05/08/2022 à 18:36
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Ouais! C'est surtout le "boxon" et nos données personnelles d'autant plus piratables. Une consultation, c'est un médecin et son patient (pas client), dans un cabinet médical, en tête à tête, en confiance. Bref, une relation humaine. Pas un machin ...

à écrit le 05/08/2022 à 16:09
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Tout cela en devient de moins en moins résilient! Il suffit qu'un "facteur lâche" pour que tout les éléments "soigneurs, soignés" soient isolés!

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