Covid-19 : que sait-on de "B117" et "V2", les deux variants du virus qui inquiètent tant les scientifiques ?

5 MINUTES POUR COMPRENDRE. Les scientifiques ont observé de multiples mutations du Sars-CoV-2 depuis son apparition, et la grande majorité est sans conséquence. Mais deux de ces variants, apparus dans deux hémisphères opposés, l'un au Royaume-Uni (B117), l'autre en Afrique du Sud (V2), intriguent les chercheurs. Ils ont repéré sur les deux souches une même mutation nommée N501Y, qui décuplerait la capacité de transmission du virus. Voici un résumé de l'état des connaissances et des interrogations en cours dans la communauté scientifique.
(Crédits : POOL)

L'émergence au Royaume-Uni et en Afrique du Sud de deux nouveaux variants du Sars-CoV-2, plus contagieux selon les premières données, inquiète au plus haut point la communauté internationale. Le point sur ces deux mutations.

1. Deux variants sous surveillance avec la même mutation "N501Y"

Tous les virus mutent. Ces mutations sont des modifications qui interviennent lorsqu'ils se répliquent.

Les scientifiques ont observé de multiples mutations du Sars-CoV-2 depuis son apparition, la grande majorité sans conséquence, mais certaines peuvent lui donner un avantage pour sa survie, dont une plus grande transmissibilité.

Détecté en novembre au Royaume-Uni, le variant B.1.1.7, désormais appelé VOC 202012/01, trouve "probablement" son origine dans le sud-est de l'Angleterre en septembre, selon l'Imperial College de Londres.

Il s'est rapidement étendu dans tout le Royaume-Uni et a désormais été détecté dans des dizaines de pays, depuis les États-Unis jusqu'à la Corée du Sud en passant par l'Inde, la France ou le Danemark.

| Lire aussi: Coronavirus : Véran annonce entre 10 et 15 cas du variant anglais du virus en France (Olivier Véran sur RTL le mardi 5 janvier 2021)

La plupart de ces cas sont liés au Royaume-Uni, mais pour quelques-uns, aucun lien avec ce pays n'a pu être retracé, ce qui prouve que ce variant s'est déjà implanté localement. C'est ce qui se passe au Danemark, un des pays qui séquence le plus d'échantillons, où 86 cas ont été identifiés (avec une fréquence en hausse).

Un autre variant, appelé 501.V2, est désormais majoritaire en Afrique du Sud. Il a été détecté dans des échantillons remontant au mois d'octobre, puis a été repéré dans quelques autres pays du monde, notamment le Royaume-Uni et la France.

Pour les deux variants, les cas sont probablement sous-estimés, selon les experts.

Ces deux variants présentent plusieurs mutations dont l'une, nommée N501Y, est au centre de toutes les attentions. Elle se situe sur la protéine spike du coronavirus, une pointe à sa surface qui lui permet de s'attacher au récepteur ACE2 des cellules humaines pour les pénétrer et joue ainsi un rôle clé dans l'infection virale.

Cette mutation N501Y est connue pour augmenter les capacités d'attachement du virus au récepteur ACE2. "Il n'y a pas de relation clairement établie entre l'attachement à l'ACE2 et une transmissibilité accrue, mais il est plausible qu'une telle relation existe", estime le Centre européen de prévention et de contrôle des maladies (ECDC).

2. Sont-ils plus transmissibles?

Plusieurs études scientifiques, pas encore évaluées par les pairs et se basant principalement sur des modélisations, concluent que le variant britannique est largement plus transmissible. Cela confirme les évaluations initiales du groupe de chercheurs NERVTAG qui conseille le gouvernement britannique, qui estimait que la transmission est accrue de 50% à 70%.

Ainsi, selon les calculs de la London School of Hygiene and Tropical Medicine (LSHTM), le variant britannique serait 50% à 74% plus contagieux.

Pour leur dernier rapport, publié jeudi, les chercheurs de l'Imperial College de Londres ont analysé des milliers de génomes de virus du Sars-CoV-2 séquencés entre octobre et décembre. Selon deux méthodes différentes, ils en concluent que ce variant à un "avantage important" en termes de contagiosité: 50% à 75% plus contagieux, ou un taux de reproduction du virus (R) entre 0,4 et 0,7 supérieur au virus habituel.

Les résultats préliminaires concernant le variant sud-africain font également état d'une plus forte transmissibilité, mais moins de données sont disponibles.

Certains experts estiment malgré tout qu'il n'y a pas assez de données pour évaluer avec certitude la contagiosité des deux variants.

"Il faut rester prudent. La résultante en termes d'incidence est une combinaison de facteurs qui associe les caractéristiques du virus mais aussi les mesures de prévention et de contrôle mises en place" (distanciation, port du masque, fermeture des établissements recevant du public...), a indiqué à l'AFP Bruno Coignard, directeur des maladies infectieuses à l'agence sanitaire française Santé Publique France.

3. Pourquoi le taux de transmissibilité compte plus que le taux de mortalité

"Il n'y a aucune information sur le fait que les infections par ces souches soient plus graves", note l'ECDC. Mais le risque "en termes d'hospitalisations et de morts est élevé".

"Qui dit plus forte transmissibilité dit éventuellement une beaucoup plus forte incidence, et donc même à létalité égale, une pression sur le système de santé plus importante", poursuit Bruno Coignard.

Un variant du Sars-CoV-2 "50% plus transmissible poserait un bien plus grand problème qu'un variant 50% plus mortel", insiste de son côté sur Twitter l'épidémiologiste britannique Adam Kucharski, démonstration statistique à l'appui.

Avec un taux de reproduction à 1,1, un taux de mortalité de 0,8%, et 10.000 personnes contaminées, on aboutirait à 129 morts au bout d'un mois, explique-t-il. Si le taux de mortalité est accru de 50%, le nombre de morts atteindrait 193 morts. Mais si le taux de transmissibilité augmentait de 50%, c'est 978 décès qui seraient à déplorer.

L'impact serait notamment très sensible dans les pays où même une petite hausse de la transmissibilité ferait basculer le taux de reproduction au-dessus de 1, accélérant l'épidémie.

Le variant britannique, c'est "vraiment l'inquiétude du moment" car "il peut nous précipiter dans une situation extrêmement complexe", a prévenu lundi sur la radio franceinfo l'épidémiologiste Arnaud Fontanet, membre du Conseil scientifique qui guide le gouvernement français.

Par ailleurs, les premières études sur le variant britannique font également état d'une plus grande contamination des jeunes de moins de 20 ans, ce qui repose la question de l'ouverture ou non des écoles.

Ainsi, l'étude de la LSHTM estime que des mesures de restrictions telles que le confinement en place au Royaume-Uni en novembre ne seraient pas suffisament efficaces pour contrôler l'épidémie, "à moins que les écoles, lycées et universités soient également fermés".

4. Quelle efficacité des vaccins?

Alors que les campagnes de vaccination qui viennent de commencer offrent un espoir de sortir de cette crise sanitaire mondiale, certains s'interrogent sur la capacité des vaccins à lutter contre les nouveaux variants.

Pour les deux variants, "il n'y a à ce stade pas assez d'informations disponibles pour estimer (s'ils font peser) un risque sur l'efficacité des vaccins", estime l'ECDC.

Toutefois, "en l'état actuel de nos connaissances, les experts pensent que les vaccins actuels seront efficaces contre ces souches", a déclaré Henry Walke, des Centres américains de prévention et de lutte contre les maladies (CDC), lors d'une conférence de presse mercredi.

Le laboratoire allemand BioNTech, à l'origine avec Pfizer du premier vaccin contre le Covid-19 autorisé au monde, a lui assuré qu'il était capable, si besoin était, de fournir un nouveau vaccin "en six semaines" pour répondre à une mutation.

5. Comment lutter?

Il est "illusoire" de penser pouvoir éradiquer ou empêcher totalement la propagation des nouveaux variants, estime Bruno Coignard, notant que l'objectif est de "retarder au maximum" leur diffusion.

Ainsi, pour les pays où les cas de nouveaux variants ne sont pas largement répandus, l'ECDC recommande "des efforts pour ralentir la propagation, similaires à ceux mis en place au début de l'épidémie": tests des personnes arrivant de zones à risque avec éventuelles quarantaines, isolement et traçage des contacts renforcés pour les personnes contaminées, limitation des voyages...

Il appelle également à surveiller l'incidence de ces variants, notamment en multipliant les séquençages de virus.

Certains tests PCR peuvent également donner une indication de la présence du variant britannique, pour ensuite mieux cibler les séquençages, a expliqué le Pr Fontanet, selon qui "une surveillance extrêmement agressive" est indispensable.

Au niveau individuel, "parce que ces variants semblent se répandre plus facilement, nous devons être encore plus vigilants dans nos mesures de prévention pour ralentir la propagation du Covid-19", a insisté le Dr Walke, faisant référence au port du masque, à la distanciation physique, au lavage des mains et à l'aération des espaces fermés, sans oublier d'éviter la foule.

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Commentaires 11
à écrit le 05/01/2021 à 9:53
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Le fichier « SI Vaccin Covid », lancé le 4 janvier pour assurer la traçabilité de la campagne de vaccination en France, va-t-il inciter les médecins à faire des injections à tour de bras? C'est ce que laissent entendre des publications partagées plus...

à écrit le 04/01/2021 à 19:36
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entre un variant dit B117 et un autre dit V2 ; on est vraiment en guerre .

à écrit le 04/01/2021 à 16:52
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Je pense que quand on n'en sait pas plus long, on devrait s'abstenir d'exposer sur la place médiatique des hypothèses, des théories toutes plus fumeuses les unes que les autres. L'information est devenue une litanie rabâchee, resucee à longueur de jo...

à écrit le 04/01/2021 à 15:57
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La chine responsable de la situation par son mensonge sur la crise sanitaire et son déni de la gravité de la situation qui a mis l'économie mondiale à genoux et plongé des millions de personnes dans la pauvreté... Personne ne dit rien personne ne dem...

à écrit le 04/01/2021 à 15:57
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La chine responsable de la situation par son mensonge sur la crise sanitaire et son déni de la gravité de la situation qui a mis l'économie mondiale à genoux et plongé des millions de personnes dans la pauvreté... Personne ne dit rien personne ne dem...

à écrit le 04/01/2021 à 14:57
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Vœux des élites néolibérales mondialisées pour 2021 : à chaque pays son variant !

à écrit le 04/01/2021 à 14:21
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" l'autre dans l'émiphère sud," hémisphère

à écrit le 04/01/2021 à 13:37
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"il n'y a à ce stade pas assez d'informations disponibles pour estimer (s'ils font peser) un risque sur l'efficacité des vaccins", Sachant que l'on parle déjà de vaccins non aboutis... toutes ces aproximations, ces amalgames, ces incohérences, ce...

le 04/01/2021 à 14:27
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"Sachant que l'on parle déjà de vaccins non aboutis" vous voulez dire quoi ? Abouti vs le manque de recul (sauf sur les volontaires qui ont permis de rédiger le dossier avec les résultats mesurés) ? Dans 5 ans on aura du recul. Le tournis c'est l'é...

le 04/01/2021 à 15:05
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"Sachant que l'on parle déjà de vaccins non aboutis" Dont on valide artificiellement le protocle de mise en conformité.

le 04/01/2021 à 15:08
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"Sachant que l'on parle déjà de vaccins non aboutis" Dont on valide artificiellement le protocle de mise en conformité. "Je crois qu'il faudrait donner des infos tous les mois, le sans délais (temps réel) ça trouble les gens faute de pouvoir ...

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