
Engie met en musique sa partition dans les énergies renouvelables. Ce mardi matin, à l'occasion de la présentation de ses résultats annuels 2022, marqués par une envolée de son chiffre d'affaires mais aussi par de lourdes charges, l'énergéticien a annoncé doubler ses investissements dans les renouvelables.
Cette accélération est le fruit d'une large réorganisation, présentée en 2021 et matérialisée par la cession de son activité multi-services Equans à Bouygues pour un peu plus de 7 milliards d'euros, ayant pour objectif de recentrer davantage le groupe dans les énergies décarbonées et les infrastructures.
« On ouvre une deuxième étape de [notre] plan stratégique un peu en avance de phase. Elle s'inscrit dans la continuité de ce qu'on avait présenté en 2021. Par contre, on accélère nos investissements », a précisé à la presse Catherine MacGregor, la directrice générale du groupe, en insistant sur la capacité d'Engie à « exécuter » et « délivrer » les performances annoncées au marché.
13 milliards d'euros d'ici 2025
Engie prévoit d'investir entre 13 et 14 milliards d'euros dans les énergies renouvelables d'ici 2025, sur les 22 à 25 milliards d'euros qu'il prévoit d'investir sur cette période. C'est deux fois plus que sur la période 2021-2023.
Autrement dit, Engie devrait investir en moyenne 4,5 milliards d'euros dans l'éolien et le solaire par an au cours des trois prochaines années. A titre de comparaison, c'est un montant légèrement supérieur à celui de TotalEnergies, qui prévoit d'investir 4 milliards dans l'électricité décarbonée en 2023. « Iberdrola et Enel restent plus gros que nous », a toutefois reconnu Catherine MacGregor.
Ces investissements seront financés par « la très bonne génération de cash que l'on prévoit dans les années à venir », a précisé la dirigeante du groupe.
Objectif 80 gigawatts en 2030
Cette nette accélération des investissements doit permettre d'installer 4 gigawatts (GW) de capacités supplémentaires par an d'ici 2025, puis 6 GW entre 2026 et 2030. Objectif : atteindre 50GW de capacités installées en 2025, puis 80 GW en 2030. A cet horizon, la part des renouvelables dans ses capacités de production devrait être majoritaire et représenter 58 %, contre 38% aujourd'hui.
Atteindre 80 GW en 2030, revient pour Engie à doubler, en sept ans, ses capacités d'énergies renouvelables déjà installées, qui représentent aujourd'hui 39 GW. Les efforts à fournir sont colossaux car sur cette capacité totale, l'hydroélectricité est encore largement dominante (43%). Or, « la part de l'hydroélectricité va baisser car tous nos investissements [dans les renouvelables, ndlr] sont fléchés vers le solaire et l'éolien terrestre et en mer », a précisé Catherine MacGregor. En 2025, l'hydroélectricité ne devrait donc représenter plus que 35% du portefeuille du groupe dans les énergies renouvelables.
Aujourd'hui, Engie affirme détenir 80 GW de projets « dans les tuyaux », un volume en hausse de 30% par rapport à 2020. 55% de ces projets sont en développement avancé ou déjà sécurisés. « Deux tiers de ces projets sont localisés aux États-Unis et en Europe », a précisé Paulo Almirante, directeur général adjoint du groupe en charge des activités renouvelables.
« Notre développement est principalement organique (...) mais nous avons aussi pour objectif d'acquérir des entreprises cibles dans des marchés spécifiques pour atteindre une taille critique sur ces marchés et renforcer notre pipeline de projets », a-t-il ajouté.
Eolien en mer : 21 gigawatts dans les tuyaux
L'accélération d'Engie dans les énergies renouvelables passera notamment par un fort développement de l'éolien en mer. Encore très marginal dans le portefeuille de l'énergéticien, la part de l'éolien offshore devrait atteindre 5% dès 2025. Sa coentreprise dédiée Ocean Wind, détenue à 50% avec le portugais EDPR, opère aujourd'hui 1,5 GW. La société revendique également 21 GW de capacités dans les tuyaux fin 2022, contre 17 GW un an auparavant.
Ces projets se concentrent en France, au Royaume-Uni, en Pologne, en Corée du Sud et aux Etats-Unis. La coentreprise Ocean Wind fait notamment partie des six consortiums ayant candidaté pour décrocher la construction du 8e parc éolien en mer français, en Normandie, dont les résultats sont attendus dans les semaines à venir.
Sur d'autres appels d'offres extrêmement convoités, Engie entend faire la différence grâce à la technologie des éoliennes flottantes. « OceanWind est leader du marché », a assuré Paulo Almirante, devant les analystes. La filiale revendique 9 GW de projets en développement s'appuyant sur cette technologie.
10 gigawatts de stockage par batteries
L'énergéticien mise également sur le stockage d'électricité par batterie, qui permet de gérer l'intermittence de la production solaire et des éoliennes sur quelques heures. Il a annoncé viser une capacité de 10 GW à l'horizon 2030.
« On se rend bien compte que ces éléments de flexibilité vont jouer un rôle absolument critique pour le système énergétique de demain », a déclaré Catherine MacGregor.
« Aujourd'hui, nous sommes déjà opérateurs de batterie en Europe et nous avons un projet de construction en Australie et on va se développer très rapidement », a affirmé la directrice générale. L'année dernière, Engie a également fait l'acquisition d'un pipeline de 6 GW de projets en développement d'énergie solaire, de stockage couplé et de stockage autonome par batterie auprès de l'américain Belltown Power.
4 milliards dans l'hydrogène décarboné
Malgré ses grandes ambitions dans les énergies renouvelables électriques, Engie le répète : le mix énergétique de demain doit être équilibré. Il se composera donc d'électrons mais aussi de molécules de gaz, qui doivent être décarbonées. Le groupe prévoit ainsi de produire 10 térawattheures de biométhane par an d'ici 2030, mais aussi d'investir 4 milliards d'euros dans l'hydrogène décarboné d'ici 2030, avec pour objectif d'atteindre 4GW de capacités de production à cet horizon. Outre la production, l'énergéticien prévoit de se renforcer dans les infrastructures et les capacités de stockage. Il vise ainsi 700 km de gazoducs dédiés au transport de l'hydrogène et une capacité de stockage d'un térawattheure à l'horizon 2030.
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