Gestion de l’eau : le programme Ecod’O veut inciter encore plus les entreprises bretonnes à la sobriété

Mi-décembre, la CCI Bretagne et l’ensemble des partenaires du dispositif Ecodo’O ont présenté le bilan des saisons 2022 et 2023. Ce programme régional aide les industriels et les professionnels du tourisme à réduire leur consommation d’eau. Entre 2020 et 2022, celle-ci a baissé de 16% en valeur brute. Le programme 2024 prévoit d’intensifier le nombre d’accompagnements d’entreprises. De leur côté, les écologistes mettent en garde sur la réutilisation des eaux usées valorisées par l’agroalimentaire.
Tandis que 109 sites consomment plus de 100.000 m3 d'eau par an en Bretagne, la CCI indique que « la question de l'eau est devenue primordiale pour les entreprises ».
Tandis que 109 sites consomment plus de 100.000 m3 d'eau par an en Bretagne, la CCI indique que « la question de l'eau est devenue primordiale pour les entreprises ». (Crédits : Pixabay / CC)

La ressource en eau subit, elle aussi, l'impact du changement climatique, y compris en Bretagne, où les sols argileux exposent la région au phénomène d'évaporation et de manque d'eau. À l'enjeu de la qualité d'une ressource confrontée à la pollution aux nitrates et des herbicides, s'ajoute celui de sa disponibilité auprès d'une population en croissance, et de sa préservation.

Alors qu'un plan breton de résilience en sept axes a été voté en juin dernier, faisant écho au plan gouvernemental présenté le 30 mars 2023 (10% d'économie d'eau dans tous les secteurs) et qu'une campagne grand public de sensibilisation aux écogestes a été déployée l'été dernier, les entreprises poursuivent elles aussi leurs efforts.

Selon différentes estimations compilées par l'Assemblée bretonne de l'eau, les industries et PME (industries, commerce, tourisme) représentent 17% des prélèvements en eau. C'est nettement moins que les 45% dédiés à l'alimentation en eau potable domestique et que les 21% pour l'agriculture (abreuvement et irrigation).

Mais les petits ruisseaux font les grandes rivières. Dans une région qui a prélevé 285 millions de m3 en 2020 dont 77% pour l'alimentation en eau potable et 3% pour les besoins industriels, selon la Banque nationale des prélèvements en eau, l'action du programme Ecod'O va s'intensifier en 2024.

Consommation réduite de 16%

Déployé de manière expérimentale par la Préfecture du Morbihan en 2020, ce programme en faveur des économies d'eau et de la valorisation des eaux de pluie dans les entreprises des secteurs de l'industrie et du tourisme a été étendu à l'ensemble de la région fin 2022. Selon le bilan 2022-2023 présenté mi-décembre par la CCI Bretagne, le dispositif piloté par Bretagne Compétitivité a permis la sensibilisation et l'accompagnement de 225 entreprises bretonnes, dont 140 en 2023 et près de 50% d'industriels. En valeur, cela représente une réduction des consommations brutes de 16%.

« C'est un très bon résultat » se félicite Luc Guymare, chargé de mission Ecod'O. « Initialement, en 2020, l'échantillon de ces entreprises représentait une consommation d'eau cumulée de 7.000.000 de m3 par an. En 2022, cette consommation s'est abaissée de 1.100.000 m3. La majorité des industriels participant au programme se sont équipés ou ont renforcé leurs équipements de relève et de suivi des consommations » ajoute-t-il.

Ces chiffres tiennent compte de tous les types d'accompagnements. Le plus complet (3 à 4 jours) établit un diagnostic personnalisé des consommations et usages dans les entreprises, identifie les potentiels d'économie d'eau et de réutilisation (Reuse) et enfin rédige un plan d'action.

Inciter 100 nouvelles entreprises en 2024

Via ce programme, qui offre aussi aux entreprises l'opportunité d'être conseillées dans la recherche de solutions de financements pour les projets d'investissement découlant de ce diagnostic, la CCI Bretagne a pour objectif d'accompagner 100 nouvelles entreprises en 2024. L'équipe d'Ecod'O entend aussi multiplier les actions de sensibilisation et le partage de bonnes pratiques auprès d'un plus grand nombre d'entreprises.

Tandis que 109 sites consomment plus de 100.000 m3 d'eau par an en Bretagne, la CCI indique que « la question de l'eau est devenue primordiale pour les entreprises, y compris en tant que levier de développement », mettant en avant l'exemple de Primel Gastronomie. Sur son site de Plougasnou (Finistère), cette filiale du groupe agro-alimentaire Sill a consommé 83.000 m3 d'eau en 2022, après avoir économisé 3.000 m3 en 2020 puis 11.500 m3 par l'irrigation des terres agricoles via les eaux usées. En 2023, son potentiel d'économies à réaliser par de nouvelles pratiques de nettoyage a été évalué à 22.500 m3/an par Ecod'O et pour 2024, l'entreprise prévoit une économie réelle de 10.000 m3 grâce à la mise en place d'une boucle en eau pour le refroidissement.

Les écologistes vigilants sur la réutilisation des eaux usées

Pour Primel Gastronomie, le coût total de ces actions et investissements s'élève à 125.000 euros. 50% sont pris en charge par l'Agence de l'eau Bretagne-Pays de Loire, l'un des partenaires du dispositif Ecod'O, avec les services départementaux de l'État, la Région Bretagne, les collectivités territoriales, les industriels de l'eau Saur, Suez et Véolia, et la Dreal.

Pour autant, si le dispositif a le mérite d'exister, il reste incitatif et n'est pas contraint pour les entreprises. Dans le cadre du vote du plan de résilience de l'eau voté en juin par le Conseil régional, les écologistes bretons avaient pointé du doigt le fait que la responsabilité en termes de consommation d'eau portait davantage sur les ménages parce qu'on « ne veut pas regarder la responsabilité des acteurs économiques ».

Prônant un changement de modèle, ils défendent le principe d'une éco-conditionnalité à tous les niveaux et mettent en garde sur la réutilisation des eaux usées plébiscitée par l'agroalimentaire.

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Commentaire 1
à écrit le 10/01/2024 à 7:50
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"De leur côté, les écologistes mettent en garde sur la réutilisation des eaux usées valorisées par l’agroalimentaire. " C'est plus prudent car de toutes façons il faut se méfier de chacune des déclarations et des actes du lobby agro-industriel qui es...

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