Tellux, cette startup rouennaise qui promet d'accélérer la dépollution des friches industrielles

Le coût prohibitif de la dépollution des sols dissuade souvent les aménageurs de reconvertir des friches au profit de nouvelles implantations industrielles. Une jeune pépite rouennaise de la deeptech a trouvé un moyen de « dérisquer » ces opérations. Tellux utilise l’imagerie hyperspectrale et l’IA pour caractériser le volume et la composition des terres polluées… et prévenir les mauvaises surprises.
Tellux mène une campagne de prélèvements et d'analyses dans une boucle de la Seine normande pour le compte d'Haropa Port afin de préparer la reconversion paysagère du terrain.
Tellux mène une campagne de prélèvements et d'analyses dans une boucle de la Seine normande pour le compte d'Haropa Port afin de préparer la reconversion paysagère du terrain. (Crédits : Tellux)

Comment réindustrialiser sans bétonner des centaines d'hectares de terres agricoles ? C'est l'équation épouvantablement complexe que devra résoudre la France dans les prochaines années. Confrontés à la rareté du foncier, les pouvoirs publics appellent de leurs vœux la reconversion des plus de 100.000 hectares de friches qu'abrite l'Hexagone. Facile à dire, beaucoup moins facile à mettre en œuvre. Qu'on le veuille ou non, il reste beaucoup plus aisé pour un industriel de poser ses valises sur d'anciens champs de blé que sur les ruines d'une raffinerie ou d'une aciérie.

Le principal obstacle à la réhabilitation de ces friches est connu. Il a pour nom « pollution ». Et pour cause, l'enlèvement des substances toxiques enfouies ça et là dans les sols renchérit considérablement les opérations, compliquant l'atteinte de l'équilibre économique. Un chiffre en donne la mesure. Pour envoyer une seule tonne de terre polluée dans une filière de traitement spécialisée, il en coûte entre 50 et 350 euros en fonction de sa composition (plus elle est souillée, plus le prix monte). Sans compter le coût de l'extraction et du transport. D'où l'importance d'y voir clair sur la nature des sols et la quantité à traiter.

La spectrométrie et l'IA au secours de la remise en état des sols

À cet exercice, les méthodes traditionnelles d'analyses de sols ont montré leurs limites. Parce que d'une fiabilité discutable, elles engendrent souvent des erreurs de diagnostics, des retards et, par ricochet, des coûts supplémentaires qui peuvent crever les plafonds. C'est à cette épineuse problématique que s'est attaquée la startup rouennaise Tellux (12 salariés), labellisée deeptech par la BPI et parrainée par TotalEnergies qui lui a consenti plusieurs prêts.

Sa trouvaille ? Un laboratoire d'analyse mobile qui combine machine learning et imagerie hyperspectrale : une technique mise au point par la NASA permettant de caractériser l'état et la composition physico-chimique d'objets à partir de la mesure de leur signature optique. À partir de carottes de terre prélevées in situ, l'Hyperlab de son nom inventorie finement à la fois le volume et la nature des hydrocarbures et composés organochlorés -les polluants les plus courants- présents sur un site. Les résultats sont, en outre, délivrés immédiatement.

Tellux friches

« Un à-peu-prêtisme très dommageable »

À la clef, la promesse d'une réduction du coût et des délais des chantiers de recyclage. « C'est un outil d'aide à la décision qui éclaire les aménageurs et leur évite les mauvaises surprises fréquentes dans ce type d'opérations », résume Maxime Lhoir, responsable du marketing. Le procédé a tapé dans l'œil de Paul Lhotellier, PDG du groupe de BTP éponyme, entré au capital de la jeune entreprise. « Comme nos terrassiers doivent aller vite, il arrive souvent que tout tombe dans le lot des terres fortement polluées », explique-t-il. En démocratisant cette technologie, on remédiera à cet "à-peu-prêtisme" très dommageable ».

La startup rouennaise espère maintenant aller au-delà de cette phase de diagnostic. Accompagnée par l'incubateur de Paris Saclay, elle cherche à lever « plusieurs millions d'euros » pour mettre au point un prototype de trieur XXL usant de la même technologie. « Placée au-dessus d'un tapis roulant, la machine pourra séparer en temps réel les terres polluées de celles qui ne le sont pas à raison de mille tonnes jour », détaille Maxime Lhoir. Restera ensuite à Tellux à trouver un partenaire industriel disposé à déployer le procédé à grande échelle. Ses fondateurs espèrent notamment réussir à pousser la porte de l'américain Caterpillar, leader mondial de la fabrication d'engins de travaux publics.

« Le marché mondial de la dépollution des friches pèsera 164 milliards en 2027 dont un quart pour le traitement des terres polluées », rappellent-ils. Un argument qui pèse.

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