Prêt-à-porter : ces villages de marques qui ne connaissent pas la crise

Alors que le prêt-à-porter s’enfonce dans la crise, un modèle garde la tête hors de l’eau : celui des villages de marques, ces outlets qui commercialisent des sur-stocks et des vêtements des saisons précédentes. Illustration dans le dernier site ouvert en France, Paris-Giverny, qui dépasse d'ores et déjà le million de visiteurs.
Le centre de Paris-Giverny a ouvert à la fin du mois d'avril 2023.
Le centre de Paris-Giverny a ouvert à la fin du mois d'avril 2023. (Crédits : Mac Arthur Glen)

Entre baisse du pouvoir d'achat et faillites en cascade... Le marché de l'habillement est soumis à rude épreuve depuis la pandémie. Sa valeur a reflué de 3,5% l'an dernier, selon l'Alliance du commerce qui représente une soixantaine d'enseignes de prêt-à-porter (Jules, Monoprix, Promod...). Et 2024 s'annonce incertaine.

Les soldes d'hiver sur lesquelles les professionnels comptaient pour compenser une annus horribilis se sont refermées sur un bilan décevant avec un trafic et un chiffre d'affaires en baisses respectives de 7 et 6% versus la saison précédente - d'après la même source.

Le concept fait recette

Dans ce climat tempétueux, un modèle résiste contre toute attente : celui des villages de marque ou outlets dans la langue de Shakespeare. La France en compte une trentaine, soit 13% du parc européen. Généralement situés à l'écart des centres-ville où ils commercialisent des sur-stocks et des vêtements des saisons précédentes, ils affichent des résultats qui, par comparaison, apparaissent éblouissants. « Les outlets proposant des collections passées à prix attractifs bénéficient d'une performance favorable avec une augmentation de leur activité de 13% depuis 2019 », indique l'Alliance du commerce dans son panorama annuel.

Le cabinet de conseil en immobilier d'entreprise Cushman & Wakefield confirme l'analyse. En octobre dernier, il faisait état, dans une étude, d'une croissance de leurs chiffres d'affaires allant de 1 à 15% au premier semestre de 2023. « Ces centres ont évolué de façon graduelle depuis leur création et se sont transformés en véritables lieux de vie et de commerce en fédérant les enseignes sur un même site », commentait dans la Tribune Barbara Koreniouguine, sa présidente pour la France.

Illustration dans le dernier des outlets ouverts en France. Baptisé Paris-Giverny, il a été inauguré tambour battant au printemps dernier en bordure de l'autoroute A13 à un jet de pierre de Vernon et du célèbre jardin de Claude Monet. À la manœuvre, le Britannique Mac Arthur Glen, un des cadors du secteur (25 implantations en Europe et Canada) qui convoitait l'emplacement depuis plus de vingt ans. À la tête de trois autres villages de marques dans l'hexagone, il a misé très gros sur ce centre, son quatrième en France et son plus vaste sur le Vieux Continent.

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« Une valeur refuge »

D'inspiration plus moderne que les précédents, le site revendique « une expérience client exceptionnelle » assortie d'une promesse de rabais permanents de 30% allant jusqu'à 70% pendant les soldes. Le groupe a investi pas moins de 200 millions d'euros pour construire, sur dix hectares, un ensemble à l'architecture léchée avec murs végétaux, avenues à ciel ouvert et labels écologiques qui a manifestement séduit les enseignes. « Huit mois après son ouverture, le taux de remplissage tutoie les 95% », assure sa direction. Sur un seul niveau, le site abrite un peu moins d'une centaine de boutiques, essentiellement du luxe et du prêt-à-porter haut de gamme, et une dizaine de restaurants et d'espaces de loisirs et de culture. Le tout desservi les vendredis et samedis par une navette gratuite au départ du Trocadéro.

Proche des villages de marques de l'Ouest francilien et de celui de Honfleur, l'endroit pouvait craindre la concurrence, mais il a vite rencontré son public. En l'espace de huit mois, il a dépassé le million de visiteurs en ligne avec les objectifs (ambitieux) fixés par sa maison-mère. Rien qui n'étonne son directeur, un vieux routier des magasins d'usines. Pour Christophe Goret, le concept répond aux attentes du moment. « Les marques que nous proposons font figure de valeur refuge en période de crise, analyse t-il. Comme nous écoulons des invendus, nous sommes aussi vus comme un modèle un peu plus vertueux que la fast-fashion dont les collections changent tous les trois mois ».

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Pour preuve, alors que les Français rognent sur leur budget habillement, l'étude de Cushman & Wakefield observe au contraire une tendance à la hausse des dépenses des visiteurs des outlets ce que confirme Christophe Goret. « Le panier moyen augmente. Selon moi, cela s'explique par la qualité de l'offre et le fait que les clients ne viennent pas par hasard, mais par choix ». Il faut dire que pour hameçonner une clientèle de CSP+, le « village » normand a misé sur quelques locomotives  « qui étaient présentes dans les centres Italiens mais pas en France » telles que Dolce & Gabana, Todd ou Stella Mac Cartney. Pour faire bonne mesure, il proposait aussi à l'ouverture un Pop up store dédié à la seconde main de luxe, dans le but avoué de « rajeunir la clientèle ».

Objectif de Paris-Giverny : drainer 2,5 millions de visiteurs par an à une échéance de deux ans. Son patron assure être « confiant » dans sa capacité à monter en puissance.

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Commentaire 1
à écrit le 07/02/2024 à 11:56
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Même principe que n'importe quel autre produit de consommation, si on arrête de produire, si on leur interdit mais nos politiciens osnt trop faibles, et vendre de la m... la qualité rapidement retrouverait un prix raisonnable à la portée d'à peu près...

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