Projet Boost  : la partie de ping-pong continue entre Air France et le SNPL

Le conseil du SNPL a donné mandat à son bureau de revenir vers la direction pour améliorer son projet d'accord ce mercredi. Si de telles améliorations sont apportées, le SNPL le soumettra par référendum à ses adhérents. La direction avait déclaré qu'il n'y aurait pas de nouvelles négociations.
Fabrice Gliszczynski
La direction espérait débuter les vols l'automne prochain. Ce calendrier partait du postulat que le projet était lancé fin mars.

La partie de ping-pong continue entre la direction et les pilotes. Et le projet Boost d'Air France de création d'une nouvelle compagnie aérienne à coûts réduits par rapport à Air France est toujours dans l'impasse. Alors que la direction a posé sur la table le 3 mai un projet d'accord ouvert à la signature des syndicats de pilotes jusqu'au 1er juin, le conseil du SNPL, le syndicat national des pilotes de lignes, dont le feu vert est indispensable pour lancer un tel projet contraire aux accords périmétriques existants, a renvoyé la balle dans le camp de la direction.

Conseil du SNPL animé

Ce mercredi, lors d'une longue réunion une nouvelle fois animée, le conseil a refusé non seulement de le signer, mais aussi de le soumettre aux pilotes par référendum, comme le SNPL a pourtant coutume de le faire pour tous les textes importants concernant les pilotes. Le conseil a, au contraire, voté une motion demandant à son bureau, l'organe exécutif du syndicat en charge des négociations, de retourner vers la direction pour rouvrir la négociation sur des points jugés litigieux ou inadmissibles à ses yeux. Puis, de revenir vers le conseil pour lui présenter le projet et de décider de le soumettre aux adhérents du SNPL par référendum.

Pour Emmanuel Mistrali, porte-parole du SNPL, il s'agit d'obtenir des "clarifications" sur différents points "à corriger qui posent problème". Une position sans surprise depuis la publication le 10 mai dernier d'un courrier de décryptage de l'accord rédigé par le bureau du SNPL indiquant noir sur blanc que ce texte ne pouvait pas être signé en l'état.

« Malgré, de part et d'autre, des avancées importantes qui nous font penser qu'un accord est possible voire proche, nous ne sommes pas en mesure de le faire aujourd'hui [...].  À la lecture du texte, il apparaît rapidement que cette ouverture à signature est prématurée. Nous constatons de nombreuses nouveautés apparues après notre dernière rencontre avec la direction et des rédactions d'articles malheureuses qui empêchent d'envisager sereinement sa signature », indiquait le bureau du SNPL dans son texte le 10 mai, en précisant également que l'absence de proposition d'augmentation salariale « empêchait de se projeter plus avant dans cet accord ».

« Il y a des problèmes sur le fond qui ne sont pas bloquants et des problèmes sur la forme qui le sont », explique un délégué syndical.

Les demandes sont nombreuses. Elles concernent la réécriture de certains passages du texte "pour éviter des contentieux ultérieurement", mais aussi des précisions à apporter sur certains points, comme le solde des mesures du plan d'économies précédent, Transform, que les pilotes n'avaient pas réalisées entièrement. Le SNPL veut qu'il soit définitivement enterré.

Dans un courrier envoyé la semaine dernières aux présidents des syndicats représentatifs de pilotes, le SNPL et le SPAF, Franck Terner, le directeur général d'Air France avait confirmé que le sujet était clos, « sauf qu'une lettre ce n'est pas un accord », fait valoir un pilote, qui veut un « accord sans ambiguïté ».

La question épineuse des toilettes des A350

Les demandes concernent également des points bloquants comme le retrait d'une des deux toilettes des deux réservées à l'équipage dans les A350 pour pouvoir installer plus de sièges. Si le SNPL l'accepte pour les A330, appelés à sortir de la flotte, il le refuse sur l'A350 qui arrivera dans la flotte en 2019.

"Lufthansa, pour exemple, exploite ses A350 en version 48/21/224 avec une toilette équipage privatisée ! Et on ne peut lui reprocher de ne pas faire de bénéfices...", expliquait le 10 mai le SNPL dans son décryptage de l'accord. "Nous ne disposons pas encore de retours d'expérience sur de tels aménagements et qui posent potentiellement des questions en termes de sûreté (Intrusion au poste de pilotage), d'hygiène et de sécurité des vols", ajoutait-il. Un tel dossier agace certains pilotes pour qui ce débat, aussi important soit-il, n'est pas à la hauteur de l'enjeu.

Les demandes du SNPL concernent également la proposition d'accord de la répartition d'activité entre Air France et KLM, l'une des principales revendications des pilotes depuis des années, qui n'est pas finalisée aux yeux des pilotes.

Retrait de la demande d'augmentation salariale

« La liste des demandes est longue comme le bras », fait valoir un pilote. En revanche, elle ne comporte plus d'exigence de hausse salariale, une revendication que les négociateurs avaient ajoutée en cours de route sans prévenir le conseil. Ce dernier a préféré déconnecter cette requête du projet d'accord. « Il est préférable d'aborder cette question légitime au cours des prochaines NAO (négociation annuelle obligatoire)», fait valoir un pilote.

Le retrait de cette revendication laisse l'espoir de déboucher sur un accord, selon plusieurs pilotes.

« Cela aurait été facile d'utiliser cette demande de manière dévoyée en disant que nous voulions planter Boost », explique Emmanuel Mistrali.

La direction va-t-elle céder?

Que va faire la direction ? Après avoir déjà fait beaucoup de concessions au SNPL, va-t-elle accéder aux demandes du SNPL, alors qu'elle a martelé qu'il n'y aurait pas de « troisième round » ?

« La direction a déjà beaucoup lâché, elle n'est plus à ça près», ironise un autre délégué syndical du SNPL. « Elle en a gardé sous le pied. Sa proposition d'accord est moins-disante par rapport à la dernière séance de négociation début mai», ajoute-t-il.

Si le lancement du projet Boost passe par un accord obligatoire avec les pilotes, les ambitions en termes de réductions de coûts seront essentiellement portées sur les hôtesses et stewards. Contrairement aux pilotes qui seront des pilotes d'Air France, les personnels navigants commerciaux de Boost seront recrutés sur le marché du travail à des coûts 40% inférieurs à ceux d'Air France.

Selon un membre du SNPL, un éventuel accord entre la direction et les pilotes va  en effet davantage permettre d'augmenter les recettes que de baisser les coûts. La suppression des toilettes réservées aux équipages, si elle aboutit, permettrait d'ajouter des sièges et d'augmenter significativement les recettes. Pour rappel, le projet vise à baisser les coûts des pilotes d'Air France de 1,5%. Il préconise notamment le retrait d'un jour de repos par mois.

La direction espérait débuter les vols l'automne prochain. Ce calendrier partait du postulat que le projet était lancé fin mars.

Fabrice Gliszczynski

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Commentaires 6
à écrit le 18/05/2017 à 12:30
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Le SNPL se permet d'ironiser sur la présence de toilettes privatisés chez LuftHansa POURTANT RENTABLE : certes... mais quelles autres concessions les pilotes allemands ont-ils fait en contrepartie ??? Germanwings fait du long courrier LowCost : les p...

à écrit le 18/05/2017 à 11:15
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Ping-pong, vous avez dit ping-pong, comme c'est ping-pong. Air France n'a qu'à embaucher des pilotes chinois qui 1) connaissent bien le ping-pong et 2) correspondent à la politique d'ouverture au monde de Macron. Qu'on applique la doctrine socialiste...

le 18/05/2017 à 12:36
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Je me doutais bien qu'un militant aussi fidèle à son extrême, et qui passe son temps à critiquer le président élu QUEL QUE SOIT le sujet, serait derrière tout ça !!!

à écrit le 18/05/2017 à 8:57
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que ce gouffre mal geré depose son bilan...il faut faire comme swissair et apres on enbauche les pilotes a de nouvelles conditions ....on peut se passer d air france ..qu ils le sachent ...!!

le 18/05/2017 à 12:32
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Je suggère que AF-KLM gagne du temps : que le groupe reprenne ALITALIA sans les contrats de travail, et procède comme vous le suggéré pour la compagnie italienne : ce sera le 3e pilier du groupe, la structure Low Cost, qui pourra même avaler Transavi...

le 18/05/2017 à 12:33
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Je suggère que AF-KLM gagne du temps : que le groupe reprenne ALITALIA sans les contrats de travail, et procède comme vous le suggérez pour la compagnie italienne : ce sera le 3e pilier du groupe, la structure Low Cost, qui pourra même avaler Trans...

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