Le "contrôleur des bonus" se dit globalement satisfait

Les principes du G20 auraient réduit les primes des traders de près de 30 %. Les banques devront publier un tableau standardisé sur les bonus.
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Un tournant a été pris, mais ce n'est qu'une première étape. » Nommé, en septembre 2009, contrôleur des rémunérations des professionnels de marché des banques ayant bénéficié d'un soutien public, Michel Camdessus a remis jeudi son rapport à Christine Lagarde. Il conclut à une application globalement satisfaisante des principes adoptés par le G20 de Pittsburgh.

L'ancien patron du FMI constate un « double effet de modération et de transparence », même si « des progrès restent à faire ». Par rapport à 2007, dernière année faste sur les marchés, il estime que l'application des nouvelles règles a réduit de 800 millions d'euros l'enveloppe globale des bonus 2010, qui s'est ainsi établie à 2 milliards d'euros pour les 8.200 professionnels de marché concernés (lire ci-dessous). Il salue une amélioration substantielle des pratiques : meilleure prise en compte du risque et de la performance, renforcement du contrôle interne, meilleure gouvernance avec l'intervention du comité des rémunérations, versement différé d'une part importante de la rémunération (55 % à 70 % pour les bonus à partir de 500.000 euros, et 70 % à 90 % pour les plus élevés), et interdiction des bonus garantis d'une durée supérieure à un an. En revanche, le malus a « soulevé plus de difficultés », les banques ne souhaitant l'appliquer qu'en cas de perte, et non dès que les résultats se dégradent.

« Poursuivre les efforts »

Dans la même veine, le rapport épingle une « grave anomalie » : les bonus suivent les résultats à la hausse, mais pas vraiment la baisse (voir graphique). Michel Camdessus précise avoir parfois demandé et obtenu la réduction de l'enveloppe globale des bonus. Il note aussi que l'application de nouvelles règles n'a pas vraiment pesé sur la capacité des banques à embaucher ou à retenir les talents internationaux, notamment à Londres. La situation serait toutefois plus problématique aux Etats-Unis et en Asie. Bercy et les banques françaises insistent ainsi sur l'importance d'une application « stricte et homogène » au niveau mondial.

La plupart des banques ayant remboursé l'aide de l'Etat l'an dernier, seules Dexia et BPCE seront contrôlées par Michel Camdessus cette année. Mais toutes sont soumises à l'Autorité de contrôle prudentiel, désormais chargée de contrôler leurs politiques de rémunération. Reprenant à son compte les conclusions du rapport, Christine Lagarde a appelé les banques à « poursuivre leurs efforts de modération en 2011 ». Pour renforcer la transparence sur les bonus, elle a demandé aux banques et à leur régulateur de proposer, d'ici à deux mois, une présentation standardisée pour l'information sur les bonus que la loi de régulation bancaire et financière d'octobre 2010 a rendue obligatoire dans les rapports annuels.

8.200 traders ont touché un bonus moyen de 242.000 euros

Le rapport de Michel Camdessus offre un éclairage édifiant sur les rémunérations versées au titre de l'exercice 2010, qualifiées de « salaires hors normes proches d'une participation aux résultats de l'entreprise ». Les activités de financement et d'investissement des banques françaises ont consacré aux bonus une enveloppe totale proche de 3 milliards d'euros, hors charges sociales. Les deux tiers de cette somme ont été captés par les 8.200 professionnels de marché soumis au contrôle de Michel Camdessus, qui ont reçu un bonus moyen de 242.000 euros. Mais ce chiffre cache des écarts spectaculaires, comme le montre l'analyse des 100 plus grosses rémunérations dans les 4 banques qui regroupent 99 % de l'enveloppe totale (BNP Paribas, Société Généralecute; Générale, Crédit Agricolegricole et Natixis). Ces 400 professionnels, âgés de 41 ans et affichant 9 ans d'ancienneté en moyenne, sont surtout basés à Paris (40 %), Londres (26 %) et New-York (16 %). Leur bonus varie de 0,1 million à 10 millions. Mais dans l'une des 4 banques, les 100 traders les mieux payés ont tous touché au moins 1,7 million, et 50 ont perçu au moins 2,5 millions. Les plus hauts bonus n'ont pas reculé par rapport aux années fastes de 2006 et 2007, mais la part versée en cash a reculé.

Le rapport analyse aussi le rapport entre bonus et salaire fixe. Pour les 400 plus gros bonus, ce multiple s'établit à 11 en moyenne. De plus, 200 traders affichent un bonus au moins égal à 6 fois leur salaire fixe, dont 10 qui ont touché au moins 50 fois leur fixe. Enfin, un trader a touché en bonus près de 100 fois son fixe !

Face à de tels écarts, Bruxelles a récemment décidé (dans la directive CRD3) que chaque banque devrait désormais déterminer un plafond pour ce multiple. Au risque de les pousser à augmenter encore les salaires fixes...

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