Nous sommes prêts, monsieur le président !

Par Gontran Lejeune, président national du Centre des jeunes dirigeants (CJD).

Vous avez prononcé à Toulon un discours courageux dont nous pourrions, au Centre des jeunes dirigeants (CJD), reprendre presque chacune des grandes idées. La financiarisation outrancière de l'économie déconnectée de l'économie productive, qui pénalise en particulier nos PME, sommées de générer des profits à deux chiffres et à court terme, tout en intéressant bien peu les banques, nous la dénonçons depuis longtemps.

La nécessité d'une régulation économique, nous la réclamons, pourvu qu'elle ne se traduise pas par une réglementation tatillonne dont l'administration française a le secret et qui conduit plus à la défiance qu'à la confiance mutuelle. L'encadrement des rémunérations des dirigeants salariés et leur indexation sur la performance de leur entreprise, nous les souhaitons d'autant plus que leurs parachutes dorés ternissent l'image des patrons, de tous les patrons.

A cet égard, vous voulez, comme nous, réhabiliter la figure de l'entrepreneur et l'esprit d'entreprise?: prenez conscience que c'est une tâche ardue tant, depuis l'école jusqu'à l'université, depuis les syndicats jusqu'aux médias, et même jusqu'aux responsables politiques, cette figure du chef d'entreprise est encore trop souvent moquée et caricaturée sous le masque de l'exploiteur.

Nous, jeunes dirigeants, qui ne cessons de défendre une vision humaniste et solidaire de l'entreprise, nous savons que c'est un message difficile à faire passer. Pourtant, nous nous appuyons, dans le développement de nos entreprises, sur des actions concrètes qui intègrent à la performance économique une performance sociale, sociétale et environnementale. Nous considérons que l'entreprise se mesure au bien-être qu'elle apporte à la société, alors que seul le bilan comptable et financier la détermine pour le moment. Nous considérons qu'une entreprise, c'est aussi la communauté des salariés qui la compose, alors que seuls les actionnaires qui constituent le capital sont reconnus juridiquement.

Votre discours a été clair, plus clair, il faut l'avouer, que nombre de mesures qui ont été prises depuis un an par votre gouvernement et qui nous ont souvent semblé contradictoires. Mais oublions le passé, la « feuille de route » que vous avez tracée nous convient dans ses grandes lignes. Et puisque vous voulez vous appuyer sur les entreprises pour retrouver une croissance durable, nous vous suggérons une ou deux pistes concrètes susceptibles de leur redonner une dynamique.

Dans le difficile contexte de la mondialisation, celles-ci ne pourront continuer à générer de la croissance qu'en allégeant le coût du travail et donc en évitant d'additionner les taxes sur le haut de bilan. La seule marge de man?uvre est, au contraire, de reporter tout ou partie de ces taxes sur le bas de bilan. C'est pourquoi nous préconisons d'élargir l'assiette des prélèvements sociaux à la consommation, au travers de la CSCO (contribution sociale sur la consommation). Notre but n'est pas, par cette proposition, de diminuer à tout prix les charges sociales des entreprises, ni même de réduire l'ensemble des dépenses de redistribution, mais de réinventer un modèle social viable qui tienne compte des concurrences nouvelles.

Si nous voulons pouvoir fournir à chacun un emploi et un salaire qui permettent de ne pas perdre sa vie en la gagnant, garder notre compétitivité, et, en même temps, sauver notre système de protection sociale, il faut, en effet, trouver des ressources complémentaires ailleurs que dans les entreprises. C'est à la collectivité dans son ensemble de supporter des coûts sociaux qui dépassent désormais largement le seul champ du travail. Il faut, en tout état de cause, retrouver un nouvel équilibre entre consommation, salaire, capital et fiscalité.

En matière d'aide aux entreprises, l'argent de l'Etat, et donc du contribuable, est trop souvent mobilisé de manière défensive, pour «sauver des emplois», sans qu'on se pose la question de la nécessité réelle de les sauver tous, dans tous les secteurs, quoi qu'il en coûte. Il nous paraît plus judicieux de redéployer ces aides de manière offensive, non pas pour produire moins cher, mais pour produire mieux et différemment, pour inventer de nouveaux produits et services afin de vendre plus cher et d'exporter, et de créer ainsi des emplois d'avenir.

Au lieu du saupoudrage actuel, l'Etat jouerait son rôle de régulateur et d'investisseur public en choisissant des axes prioritaires pour l'attribution des aides, par exemple en faveur du développement durable et de la croissance des PME innovantes. Nous avons encore bien d'autres idées et projets et ne manquons ni d'ambition, ni d'imagination, ni d'audace pour «refonder le capitalisme» sur un meilleur équilibre entre capital et travail, règle et liberté, responsabilité collective et individuelle. Nous développons ce programme ambitieux depuis plusieurs années sous le nom de «libéralisme responsable». Monsieur le président, nous sommes prêts.
 

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