Sécurité des produits : que fait la Chine ?

Par Alexandra Belaud-Guillet, avocate (Jones Day Shanghai).

Dans le contexte des contaminations du lait à la mélamine et des fauteuils au diméthylfumarate, les autorités chinoises renforcent leurs dispositifs de contrôle et accélèrent la mise en conformité des normes au plan national. Depuis 2007, la Chine s'est lancée dans une véritable campagne de sécurisation des produits, infligeant des sanctions exemplaires aux dirigeants et fonctionnaires impliqués, alors que les scandales se multipliaient et que les produits "made in China" représentaient 16,24% des importations européennes mais plus de 50% des violations des normes européennes enregistrées pour les produits non alimentaires et 12% pour les produits alimentaires.

Si la Chine avait jusqu?alors tendance à adopter ses propres standards, le Premier ministre Wen Jiabao a annoncé en mars dernier, l?adoption ou la révision de plus de 7.700 standards et méthodes de contrôle, pour se conformer aux normes internationales dans les domaines alimentaire, médical et des produits de grande consommation. Il a également précisé que les produits destinés à l?exportation devraient satisfaire non seulement les normes internationales mais également celles du pays importateur ; ce qui signifie que les producteurs chinois qui exportent en Europe devront respecter les normes européennes, dont REACH qui impose notamment aux producteur, distributeur, vendeur, et importateur de répondre sous 45 jours aux questions des consommateurs sur la composition de leurs produits.

On assiste alors en Chine à une véritable inflation législative et réglementaire. La SFDA (State Food and Drugs Administration) a annoncé mi-septembre la fin du système des exemptions d?inspection pour les fabricants de produits alimentaires et le Conseil des Affaires d?Etat vient de publier un décret relatif au contrôle de la qualité et la sécurité des produits laitiers (la loi sur la sécurité alimentaire étant toujours en discussion). Par ailleurs, les producteurs d?aliments, d?équipements automobiles et de jouets sont désormais contraints d?enquêter sur la sécurité de leur produit dès réception d?une information remettant en cause sa sécurité. Les résultats de l?enquête doivent être communiqués aux autorités provinciales qui peuvent désigner un comité d?experts pour décider ou non du rappel des produits objet de la plainte, en lieu et place le cas échéant du producteur défaillant.

Toutefois, même si les contrôles se sont accrus grâce à ce dispositif et à l?action d?une dizaine d?administrations en charge de l?adoption et de l?exécution des normes dont la SFDA et l?AQSIQ (Administration of Quality, Supervision, Inspection and Quarantine), d?importantes lacunes restent à déplorer et les 180.000 personnes en charge des contrôles qualité et technique sur tout le territoire chinois disposent d'un niveau de formation variable et de moyens parfois insuffisants.

Parallèlement, les lois chinoises sur la protection des consommateurs et la qualité des produits prévoient une responsabilité de plein droit des vendeurs et fabricants que les consommateurs, de mieux en mieux informés grâce notamment à l?action des associations chinoises de consommateurs, n?hésitent plus à invoquer. Les professionnels chinois ne peuvent donc plus ignorer ce que contiennent leurs produits et doivent s?assurer que toutes les précautions ont été prises avant de lancer ou de maintenir un produit sur le marché. D?autant que s?il appartient en principe au plaignant de démontrer la dangerosité d?un produit, en pratique, au moindre risque, les juges peuvent être tentés de transférer la charge de cette preuve au producteur ou au vendeur.

Les responsabilités ne pourront alors véritablement être diminuées (hors les clauses limitatives de responsabilité valables dans certains cas seulement) que par le suivi de programmes de mise en conformité et la mise en place de systèmes de contrôle interne, dont promotion est largement faite par les autorités chinoises, afin de réduire tant les risques et les coûts que les sanctions en cas de poursuites.

La Chine semble définitivement vouloir éviter que le "not made in China" n?évince le "made in China", à l?heure où les études récentes démontrent que le coût d?un produit défectueux peut atteindre 5 à 15% des coûts (réparation, plaintes des consommateurs, atteintes à l?image, rappels et retours de produits, garanties et poursuites).

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