Le Labour chancelle

Par Sophie Gherardi, directrice adjointe de la rédaction de La Tribune.

Le scandale des notes de frais en folie des députés britanniques vient de faire une victime institutionnelle de première grandeur : hier, le président de la Chambre des communes, Michael Martin, a annoncé sa démission à la date du 21 juin. Depuis plus de 300 ans, la mère de tous les parlements n'avait rien connu de tel. La pression était devenue trop forte sur le "speaker", qui avait tout fait pour empêcher la divulgation des notes de frais des parlementaires, réclamée - et obtenue - en justice par une journaliste.

La Chambre se préparait à rendre publiques les informations demandées, mais la presse ne lui en a pas laissé le temps. Depuis des semaines, les journaux publient chaque jour des pages atterrantes révélant comment des députés de tous les partis ont fait passer en notes de frais les biens et services les plus divers (du siège de toilettes à la pâtée pour chien). Il y avait plus grave, bien sûr. Faire payer par le contribuable les intérêts et la réfection complète d'une maison pour ensuite la revendre avec un très gros profit était peut-être l'une des pratiques les plus choquantes (répertoriée dans les deux principaux partis).

Mais on a vu aussi un ancien chancelier de l'échiquier (Kenneth Clarke) frauder sur les taxes foncières en ne déclarant pas de résidence principale. Et cinq députés de Sinn Fein d'Irlande du Nord (dont Gerry Adams) se faire rembourser 100.000 livres en cinq ans alors qu'ils refusent de siéger au parlement de Londres ! Responsable du règlement intérieur, le président Michael Martin a été accusé de laxisme par les députés eux-mêmes. Si l'on comprend bien, c'est pour les avoir laissés commettre des indélicatesses, sinon des entorses à la loi, qu'ils l'ont forcé à démissionner en bousculant les règles de procédure.

Avec sa dégaine d'ancien métallo et son gros accent écossais, le député travailliste de Glasgow était tout désigné pour jouer "ce pelé, ce galeux dont venait tout le mal", comme l'âne de La Fontaine dans "Les animaux malades de la peste". Mais, si la perte de cet allié précieux fragilise d'abord Gordon Brown, c'est toute la classe politique qui est éclaboussée. Les Britanniques subissent depuis des mois une récession gravissime, un chômage angoissant et des pertes de patrimoine considérables.

L'opinion s'est déjà retournée contre les banquiers et leurs bonus, elle est toute prête à s'en prendre aux politiques profiteurs. L'antiparlementarisme n'est pas une tradition au pays de la démocratie représentative, mais on a déjà vu des partis politiques y être balayés. Et le Labour est en première ligne.

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Commentaires 3
à écrit le 09/10/2009 à 13:41
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Je suis déçu: en Angleterre, les élus et les gouvernants ne sont finalement pas plus honnêtes qu'en France

à écrit le 09/10/2009 à 13:41
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L'hypocrisie et les leçons données par la GB sont révolues et c'est tant mieux.

à écrit le 09/10/2009 à 13:41
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L'hypocrisie et les leçons données par la GB sont révolues et c'est tant mieux.

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