Macron achève bien les cadres

ÉDITO. Muriel Pénicaud, la ministre du Travail, s'apprête ainsi à réduire drastiquement, de 6.000 à 3.500 euros, le plafond d'indemnisation du chômage des « hauts revenus ». Avec pour argument qu'Emmanuel Macron ayant fiscalisé les cotisations, il n'y a plus de raison de maintenir un système assurantiel. Par Philippe Mabille, directeur de la Rédaction.
Philippe Mabille
(Crédits : Reuters/Charles Platiau)

« Anne, ma sœur Anne, ne vois-tu rien venir ?... »

La question de la jeune épouse de Barbe-Bleue à sa sœur, dans l'attente du secours de ses frères, s'applique fort bien à l'interminable attente qu'Emmanuel Macron impose à la société et l'économie française depuis quatre mois qu'a commencé la crise des « gilets jaunes ». Sa réplique, « Je ne vois rien que le soleil qui poudroie, et l'herbe qui verdoie », est passée dans le langage populaire pour désigner toute situation où un événement est attendu, sans plus trop d'espoir.

Quatre mois que, chaque samedi, des manifestations violentes paralysent les centres de plusieurs villes, deux mois que le Grand débat tente de rétablir un consensus impossible. Et pourtant, le saccage des Champs-Elysées lors de l'Acte XVIII a fait faire un bond en arrière à Emmanuel Macron, qui se montre impuissant à mettre fin à une crise sociale inédite. Le chef de l'État refuse d'accélérer son calendrier et ne devrait intervenir que mi-avril. Des fuites donnent de premières indications sur ce à quoi il faut s'attendre. Marche arrière sur la désindexation des retraites pour les plus modestes, possible marche arrière sur l'ISF avec le retour à une « conditionnalité » (par une obligation de réinvestissement dans des PME  ?), marche arrière sur la critique des élus locaux, avec un Acte III de la décentralisation. Le tout assaisonné d'un zeste de démocratie participative... Pas sûr que cela calme le « gilet jaune » en furie.

D'autant qu'en coulisses se préparent quelques mauvais coups. Emmanuel Macron n'a en effet renoncé en rien à son projet d'étatisation de l'assurance-chômage et des régimes de retraites. Dans les deux cas, les cadres seront les dindons de la farce. Muriel Pénicaud, la ministre du Travail, s'apprête ainsi à réduire drastiquement, de 6.000 à 3.500 euros, le plafond d'indemnisation du chômage des « hauts revenus ». Avec pour argument qu'Emmanuel Macron ayant fiscalisé les cotisations, il n'y a plus de raison de maintenir un système assurantiel. C'est oublier que les cadres, dont le taux de chômage est de 4%, la moitié de la moyenne nationale, restent les principaux contributeurs, avec les cotisations patronales versées sur leur salaire.

Si on va au bout du raisonnement, soit on supprime aussi ces cotisations, mais alors l'Unedic ne fera pas les économies escomptées, soit on risque de casser le principe de solidarité au profit de mécanismes individualisés. Les cadres risquent de prendre d'autant plus mal ce coup de Jarnac qu'ils sont en train de s'apercevoir que leurs cotisations sur les retraites complémentaires ont flambé depuis janvier, conséquence d'un accord imposé en 2015 par le Medef. Si l'on ajoute à tout cela la tentation de la majorité de durcir la fiscalité des « hauts revenus », les électeurs d'Emmanuel Macron vont finir par répondre à sœur Anne : « Je ne vois que les impôts qui flamboient et les allocations qui perdoient... »

Philippe Mabille

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Commentaires 18
à écrit le 22/03/2019 à 22:15
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C’est comme si votre assureur vous laissait tomber d’un seul coup après 20 ans de cotisations sans pépin. Vous avez-vous financé la solidarité... on vous abandonne avec la promesse d’un taux de remplacement ridicule. Vous parlez de justice? A taux d...

à écrit le 22/03/2019 à 17:31
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Cela vient directement de ce qu'impose la Commission Européenne à la France via les Grandes Orientations de Politique Economique (GOPé). Mais comme les cadres sont majoritairement européistes, ils devraient applaudir des deux mains pour rester cohére...

à écrit le 22/03/2019 à 12:42
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un cadre qui devrait s'attendre difficilement à voir baisser de 43% de ses revenus par pole emploi dans le cadre de sa perte d'emploi, va devoir faire face aux charges fixes par quel moyen? par exemple, ses crédits, son loyer ….. cette décision d...

à écrit le 22/03/2019 à 10:00
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Je sais que je vais pas me faire des amis ici, mais je trouve que c est une bonne mesure, voire qu elle ne va pas assez loin. Il est anormal que quelqu un touche autant en restant chez soi. Comment voulez vous etre motive pour chercher un autre trava...

à écrit le 21/03/2019 à 22:19
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Bientôt on va voir manifester des gilets marrons ou noirs onverts sur des chemises et cravates italiennes et costards anglais. Je rigole, Macron s'attaque au dernier rempart de la société, belle oeuvre de démolition sociale.je ne sais pas si en 2000...

à écrit le 21/03/2019 à 20:47
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Nous sommes face a un gouvernement de voleur les cadres ont cotisés pour cela. c'est un désastre ce pays.

à écrit le 21/03/2019 à 18:58
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Vos amis les gilets jaunes sont passés par là. Faut vous réveiller! La justice sociale ça peut faire bobo.

à écrit le 21/03/2019 à 18:24
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souhaitons que dans un soucis d'équité ce plafond s'applique également aux députés perdant leur mandat et perçoivent un équivalent de chomage ; pas mal de LREM ne seront sans doute pas réélus et pourrons ainsi apprécier les mesures qu'ils auront sout...

à écrit le 21/03/2019 à 15:42
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Il faut arrêter avec les clichés sur le secteur publique.Sinon le coup contre les cadres était prévisible,du moment où on est passé d'un système d'assurance-chômage, financé par les cotisations à un système financé par les impôts (CSG).EM l'a reconn...

à écrit le 21/03/2019 à 14:21
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Franchement, laisser pourrir une situation et laisser la main libre aux casseurs, c'est du déjà vu et revu. Sous le prétexte du respect de la démocratie, on a en effet toujours laissé faire la casse de matériel ou de véhicules sans se préoccuper de ...

à écrit le 21/03/2019 à 13:59
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Ils sont logiquement récompensés comme les retraités qui ont massivement voté Macron. Ce qui est magnifique dans cette décision c'est que c'est l’État qui impose cette mesure alors qu'elle concerne le secteur privé. Bien sûr, rien n'est prévu pour ...

à écrit le 21/03/2019 à 12:11
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Il aurait mieux fallu rester sur un système d'assurance chômage. Dès que l'état s'occupe de gérer , il arnaque les français; Ex avec les retraites. L'état est endetté et n'a plus d'argent. Avec nos politiques et la manière dont ils gèrent le pays, on...

le 21/03/2019 à 19:28
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Pour rappel, sur les retraites, on aurait très bien pu rester sur le système que les différents corps de métier ont voulu à la fin de la seconde guerre mondial : un système cloisonné et chaque branche pour soit. Mais bon, quand des métiers disparaiss...

à écrit le 21/03/2019 à 9:49
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Prendre à tout le monde pour donner aux mégas riches, les preuves défilent sous nos yeux, encore et toujours le dogme oligarchique financier néolibéral qui est en train d'anéantir l'union européenne.

à écrit le 21/03/2019 à 9:12
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Pourquoi faire autrement? De toute façon les cadres continuent à voter En Marche comme en 2017, alors qu'ils auraient pu voter pour la droite et s'éviter ce matraquage fiscal.

le 21/03/2019 à 14:27
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"De toute façon les cadres continuent à voter En Marche comme en 2017, alors qu'ils auraient pu voter pour la droite". Pourquoi, ce n'est pas pareil ? Le soutien actuel à macron dans les sondages , ce sont les LR.Normal, Macron pratique une polit...

le 22/03/2019 à 12:16
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Macron soutien les très très rit hes (auxquels n'appartiennent pas les cadres avec le 4000 euros nets de rémunération moyenne). Quel geste fiscal pour la classe moyenne supérieure? rien pour le moment si ce n'est des impôts qui restent très élevés e...

à écrit le 21/03/2019 à 8:16
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c'est pas derangeant si les cotisations baissent a l'avenant sinon, ils faut porter plainte pour discrimination haineuse

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