Dans son allocution du 1er décembre, Emmanuel Macron l'assurait : « Nous ne reprendrons plus le cours normal de nos vies », sous-entendant qu'il y aurait un avant et un après la crise des « Gilets jaunes ».
Cinq mois plus tard, à quelques jours de la sortie du Grand débat national, il est permis de douter de cette réelle volonté de renverser la table. Plusieurs éléments révèlent la confusion des esprits dans laquelle se trouve le pouvoir. La nouvelle trajectoire budgétaire transmise par Bercy à Bruxelles porte la marque de la crise sociale. Dans un contexte de croissance moins forte qu'attendu, tous les objectifs initiaux sont devenus autant de renoncements.
Le retour à l'équilibre budgétaire en 2022 est abandonné, ce qui n'est pas en soi un drame tant personne n'y a jamais cru, mais il révèle l'impérative nécessité de dégager des marges de manœuvre pour calmer les classes populaires et moyennes. La baisse des prélèvements obligatoires sera donc plus importante que prévu, celle de la dette un peu moindre. Bref, les « petits comptables illustrés » de Bercy, selon l'expression de Gérald Darmanin, sont en train de bidouiller leurs tableurs pour financer un tournant très dépensier du quinquennat en espérant que celui-ci restera contenu.
Taxe carbone, redevance, retraites... d'une impuissance à l'autre
Sur le plan fiscal, le pouvoir est réduit à l'impuissance : impossible d'augmenter le moindre impôt sur un corps social écorché vif. Exit donc la taxe carbone sauf à la redistribuer intégralement. Emmanuel Macron cherche encore la mesure qui aura le plus d'impact sur les esprits. La suppression de la redevance télé est à l'étude, mais on sait bien qu'il ne s'agit que d'un tour de bonneteau qui reporte le financement de l'audiovisuel public sur d'autres impôts. Certains évoquent une baisse des premières tranches de l'impôt sur le revenu, dont l'effet ne peut être qu'homéopathique. Certes, la taxe d'habitation sera bien supprimée pour tous les Français. Mais la fiscalité de l'immobilier semble promise à devenir un réservoir inépuisable pour faire payer un peu plus les « riches ». En gros, les cadres supérieurs aisés « paieront » pour la suppression de la partie « valeurs mobilières » de l'ISF.
Le sujet le plus inquiétant est l'impuissance du gouvernement à faire des économies sur les dépenses publiques. Illustration parfaite avec la « réforme » des retraites, pilotée par Jean-Paul Delevoye, qui tourne vinaigre. Au départ, il s'agissait de faire une réforme « non paramétrique », comme disent les experts, c'est-à-dire sans reculer l'âge légal de départ. Emmanuel Macron candidat s'y étant engagé, on n'y touchera donc pas, alors qu'il manque au moins deux ans de cotisations pour ne pas menacer le niveau des pensions. On tergiverse aussi face aux coûts de la dépendance alors que la situation de nos anciens dans les Ehpad a des airs de pays sous-développé. Seule Agnès Buzyn a osé dire tout haut la vérité. La France ne sauvera pas son modèle social sans travailler plus longtemps.
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