Appellations, certifications, labels, récompenses : le grand flou

OPINION. Jamais les consommateurs n'ont exigé autant de transparence et d'éthique de la part des marques, avec un regard toujours plus acerbe sur leur raison d'être, l'origine de leurs produits, leurs méthodes de production, leur empreinte carbone... Par Alexandre Tepper, co-fondateur de Cosme
(Crédits : DR)

Pour répondre aux attentes légitimes du public, « Made in France », « Origine France Garantie », « AB », « Point Vert »...sont autant d'indicateurs qui ont su trouver une place de choix sur les packagings des produits et dans les argumentaires marketing.

Créés à l'origine pour mieux éclairer le consommateur, valoriser des produits et des entreprises françaises plus vertueux, ils ont aujourd'hui outrepassé cette simple notion d'information pour devenir de véritables prescripteurs, capables d'orienter les achats. Devenus très importants dans l'esprit des consommateurs et, par extension, pour les marques, il est donc crucial de s'assurer de leur fiabilité.

Or, la multiplication des labels a vu naître une grande confusion, avec à la fois des indicateurs sérieux en soutien aux consommateurs et d'autres non-officiels qui relèvent plutôt d'opérations de communication et de marketing. Il est temps de remettre la transparence au cœur du processus de consommation, pour pouvoir distinguer un véritable engagement d'une démarche marketing.

Crise de confiance

La création des labels a été lancée pour pallier une crise de confiance entre les marques et les consommateurs, toujours plus engagés, avec l'ambition de créer un tiers de confiance rassurant. Ce n'est pas le principe même qui doit être remis en question, car ils restent essentiels dans l'intérêt des consommateurs, soucieux d'être guidés, de comprendre et d'analyser les produits plus facilement, plus rapidement, et ainsi se tourner vers des achats plus conscientisés (et in fine raisonnés).

Mais aujourd'hui, l'effet "solution miracle" a disparu, avec la multiplication des labels et certifications. Alors qu'initialement, les consommateurs devaient déchiffrer les engagements des marques, ils doivent désormais prendre du temps pour comprendre ces nombreux labels, qui posent finalement plus de questions qu'ils n'apportent de réponses.

À quoi correspondent-ils ? Par qui sont-ils délivrés ? Lesquels sont gage de sérieux et d'engagements concrets des marques ? Lesquels ont été obtenus contre rémunération ? Quels sont leurs cahiers des charges ?

Chaque label, international, national ou local, impose en effet des contraintes et des clauses plus ou moins draconiennes à ses futurs labellisés.

Les conditions d'obtention, parfois nébuleuses, obligent à une confiance presque aveugle sans savoir exactement à quoi ils correspondent. Chaque indicateur couvre indépendamment certains paramètres d'évaluation d'un produit, mais jamais son ensemble. On assiste donc à une surenchère de labels, certifications et autres appellations, rendant les engagements beaucoup moins lisibles et plus complexes. De la confusion chez le consommateur donc, mais aussi de la complexité pour les marques, devenues dépendantes de ces indicateurs dans leur relation et leur communication vis-à-vis de leurs clients et prospects. Des marques, elles aussi parfois confrontées à ce manque de transparence avec leurs fournisseurs, qui dépendent également des labels. Et de là naît le risque de frenchwashing ou de greenwashing malgré elles.

Le système fait donc face à un réel besoin de régulation.

Remettre la transparence et le consommateur au coeur de la réflexion

Aujourd'hui, le nécessaire travail de transparence doit viser les deux parties.
D'un côté, l'éducation du consommateur est incontournable pour lui permettre d'avoir une vision des plus objectives des produits qu'il achète. Ce travail de pédagogie devra replacer au centre des enjeux de labellisation la transparence, l'impartialité et l'intégrité, parfois malmenées par des pouvoirs publics dépassés, des filières métiers trop impliquées ou des entreprises qui décident de créer leur propre label.

Pour donner au consommateur les clés d'une compréhension totale de ses achats, il est également essentiel de le réintégrer activement au processus de réflexion, pour que l'action aille dans son sens. Aujourd'hui, un trop grand nombre de labels sont financés par des entreprises, créant ainsi une interdépendance problématique ignorée du grand public.

De l'autre côté, la mise en place de davantage de contrôles semble inéluctable pour inciter les marques à s'emparer des problématiques et des enjeux. Il est temps qu'elles se détachent de la labellisation à tout prix pour se concentrer davantage sur leur démarche globale.

Et si finalement, les marques faisaient le choix de sortir du cadre des appellations et des certifications pour changer de paradigmes et placer le client au centre de leurs exigences ? En privilégiant un travail en profondeur sur leurs valeurs et leur éthique à une étiquette dispensée par un tiers, elles s'engageraient mieux pour aller plus loin et faire vraiment bouger les choses.

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Commentaire 1
à écrit le 04/02/2023 à 8:17
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