"Taxer les vols domestiques" Karima Delli

Par Karima Delli  |   |  503  mots
(Crédits : Karima Delli)
[24 Tribunes pour la COP24 | 17/24 ] Les « gilets jaunes » nous prouvent qu'une fiscalité n'est acceptée que si elle est juste. En l'occurrence, la fiscalité sur les carburants, si elle est légitime, est profondément injuste. Par Karima Delli, Députée européenne, présidente de la Commission Transports et tourisme

 Comment pourrait-il en être autrement, alors que son assiette est réduite à certains carburants et pas d'autres ? Trois ans après les accords de Paris pour le climat, le déséquilibre persistant entre les différents carburants d'origine fossile est aberrant : on paie pour les voitures et camions, mais quasiment rien pour les avions et les bateaux ! Alors que s'ouvre la COP24 à Katowice en Pologne, il est grand temps que notre fiscalité écologique soit enfin cohérente.

À l'origine prévus pour être présents dans les accords de la COP21, les secteurs aériens et maritimes avaient réussi à en sortir en catimini, contre la promesse d'innover pour faire baisser leur taux d'émissions de CO2. Bilan des courses ? Rien ou si peu. Difficile dès lors d'accepter les efforts demandés, quand certains en sont exonérés sans plus d'explication.

Malgré sa part de 4 à 5 % du réchauffement climatique global, le secteur aérien reste fiscalement intouchable. Sans taxe sur le kérosène, avec une TVA réduite sur les vols intérieurs et inexistante sur les vols internationaux, le secteur prévoit sans surprise une croissance du trafic toujours plus folle. Et quand l'organisation de l'aviation civile internationale (OACI) se soucie du devenir de notre climat, c'est pour fixer des objectifs non contraignants aux compagnies aériennes, via l'accord Corsia de 2016.

Sans attendre la communauté internationale, la France pourrait pourtant être en cohérence avec ses déclarations. La preuve : l'Allemagne applique un taux plein de TVA aux vols intérieurs, afin de ne pas créer de concurrence déloyale avec le ferroviaire, dont un trajet émet 40 fois moins ; le Japon a d'ores et déjà introduit une taxe sur le kérosène. Pourquoi pas nous ?

L'autre grand oublié du combat contre le réchauffement est le maritime. Si l'Organisation maritime internationale (OMI) a fixé des objectifs au secteur, ils ne sont en rien contraignants, et, de facto, encore moins respectés ! Face aux 60 .000 décès par an et 58 milliards d'euros de dépenses de santé, l'Europe aurait pourtant tout intérêt à réguler enfin la fiscalité du carburant pour enrayer l'explosion du secteur.

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La Tribune a demandé à 12 chefs d'entreprise et 
12 experts de formuler une solution pour sauver la planète.

Isabelle Kocher - Engie | Alexandre de Juniac - IATA | 
Jean-Pascal Tricoire - Schneider Electric | Antoine Frérot - Veolia | 
Jean-Laurent Bonnafé - BNP Paribas | Guillaume Poitrinal - Woodeum |
Thomas Buberl - Axa | Alain Dinin - Nexity | 
Laurence Tubiana - Fondation européenne pour le climat | 
Frédéric Rodriguez - Greenflex | Laurent Solly - Facebook | 
Arnaud Leroy - l'Ademe | Jean-Yves Le Gall - Cnes | 
Cécile Maisonneuve - Fabrique de la Cité | Sylvie Goulard - Banque de France |
Chantal Jouanno - CNDP | Karima Delli - Députée européenne | 
Alain Grandjean - Carbone 4 | François-Michel Lambert - Député | 
Frédéric Mazzella - Blablacar | Eric Scotto Akuo - Energy 
Dominique Bourg - Philosophe | Cyril Dion - Réalisateur 
Patrick Criqui - CNRS.