"Rendre performants les bâtiments existants" J-P. Tricoire, Schneider Electric

[24 Tribunes pour la COP24 | 3/24 ] Le temps de lire cet article, ce sont 20. 000 objets qui auront été connectés à Internet dans le monde, 30 millions dans la journée. C'est une transformation massive. Par Jean-Pascal Tricoire,Président-Directeur général de Schneider Electric
(Crédits : Reuters/Gonzalo Fuentes)

Plus de 50 milliards d'objets seront ainsi interconnectés avant la fin 2020. Dans les bâtiments, ce sont des centaines d'objets et capteurs qui sont dès à présent connectés. Les technologies numériques permettent de visualiser, de corréler et de piloter. Le pilotage dynamique et intelligent du bâtiment change complètement la donne énergétique, et remet l'utilisateur au cœur de l'action. Le temps de l'efficacité énergétique digitale est arrivé.

Comme jamais précédemment, l'efficacité énergétique fait l'objet d'un consensus indiscutable en France et au niveau international, comme le prouvent les rapports du GIEC en septembre, de l'AIE (Agence internationale de l'énergie) d'octobre, de l'ETC (*) de novembre. Plutôt que de passer notre temps à parler de l'offre d'énergie et du mix de production, nous devons agir et attaquer l'énorme potentiel de réduction de la consommation en accélérant la prise de conscience et la transformation des usages.

En 2017, les bâtiments représentaient 30 % de la consommation d'énergie mondiale et plus de 40 % en France. Ils sont globalement inefficaces énergétiquement, le potentiel de réduction de la consommation énergétique de ce secteur est donc massif. Il nous faut en premier lieu cibler les bâtiments existants, sachant qu'en Europe, on ne construit qu'un pourcent du parc chaque année... Les solutions technologiques existent et permettent une efficacité de l'ordre de 30% en moyenne. Elles représentent l'avenir du secteur, aussi comment les faire adopter massivement par les acteurs ?

Alors que l'on projette une augmentation mondiale du parc d'environ 60 % dans les vingt ans à venir, soit une augmentation massive des émissions liées à leur construction et à leur utilisation, un projet ambitieux d'efficacité énergétique des bâtiments existants, résidentiels et tertiaires, permettrait des économies à grande échelle pour stabiliser la consommation. L'enjeu est clé. L'efficacité énergétique digitale vient rendre possible dès maintenant un déploiement à grande échelle, rapide, peu couteux, moins de 20 €/m² et avec un retour sur investissement inférieur à cinq ans.

Prenons un exemple. Les bâtiments scolaires. Au regard du parc actuel, la facture d'énergie moyenne annuelle de cette typologie de bâtiment est de 10 à 15 euros/m². Une économie de 20 à 30 % de cette facture représente 50 .000 euros pour un lycée moyen de 18. 000 m² avec un retour sur investissement autour de cinq ans. Quand on réalise qu'il y a en France plus de cent millions de mètres carrés consacrés à l'éducation, on envisage alors une économie de plusieurs centaines de millions d'euros par an, dont le redéploiement pourrait être alloué à la pédagogie, au matériel d'enseignement ou à des classes plus petites. Et cette même logique s'applique à l'ensemble des bâtiments gérés par l'état et les collectivités locales.

Un tel plan serait de surcroit créateur de beaucoup d'emplois d'avenir dans des secteurs passionnants comme la domotique, le bâtiment intelligent... Nombre de nouveaux métiers, de spécialistes et d'intégrateurs de proximité auraient pour mission de digitaliser le parc existant. Selon l'Ademe, plus de 150 000 emplois sont liés à l'amélioration de l'efficacité énergétique des bâtiments. Dans le secteur énergétique, cela conduirait à une multiplication et à une décentralisation des emplois au plus proche des utilisateurs et au plus proche des communautés.

Ce qui était hier un rêve futuriste devient aujourd'hui réalité et change complètement la manière d'aborder les problèmes énergétiques. Les solutions technologiques existent déjà et sont en perpétuelle amélioration avec de nombreuses innovations. Ses champions sont français et prêts à s'investir encore davantage. Une bonne nouvelle au moment où s'ouvre la COP24.

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(*) Coalition mondiale de l'industrie sur la décarbonisation de l'économie comprenant une trentaine d'entreprises.

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La Tribune a demandé à 12 chefs d'entreprise et 
12 experts de formuler une solution pour sauver la planète.

Isabelle Kocher - Engie | Alexandre de Juniac - IATA | 
Jean-Pascal Tricoire - Schneider Electric | Antoine Frérot - Veolia | 
Jean-Laurent Bonnafé - BNP Paribas | Guillaume Poitrinal - Woodeum |
Thomas Buberl - Axa | Alain Dinin - Nexity | 
Laurence Tubiana - Fondation européenne pour le climat | 
Frédéric Rodriguez - Greenflex | Laurent Solly - Facebook | 
Arnaud Leroy - l'Ademe | Jean-Yves Le Gall - Cnes | 
Cécile Maisonneuve - Fabrique de la Cité | Sylvie Goulard - Banque de France |
Chantal Jouanno - CNDP | Karima Delli - Députée européenne | 
Alain Grandjean - Carbone 4 | François-Michel Lambert - Député | 
Frédéric Mazzella - Blablacar | Eric Scotto Akuo - Energy 
Dominique Bourg - Philosophe | Cyril Dion - Réalisateur 
Patrick Criqui - CNRS.

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