Ce sont en effet 500 000 voyageurs supplémentaires qu'il faudra emmener assister aux sessions sportives quotidiennes des JOP, réparties sur 25 sites différents en Île-de-France. Des visiteurs à transporter en plus des 5 millions d'usagers habituels. De quoi exacerber les risques de bagages oubliés, incidents voyageurs et problèmes techniques en tout genre.

À ce jeu, les acteurs des transports publics français sont loin d'être des amateurs. Ils exploitent, rappelons-le, le deuxième réseau de transport urbain le plus dense au monde avec 9,4 millions de déplacements chaque jour : le RER A est ainsi la ligne la plus fréquentée d'Europe, et la gare du Nord parmi les plus importantes du monde en nombre de voyageurs. Ils ont aussi bénéficié d'un tour de chauffe réussi lors de la Coupe du monde de Rugby à l'automne dernier.

Surtout, les parties prenantes ont lancé leur « préparation physique » dès l'annonce des Jeux de Paris en 2017. Ensemble, elles ont adapté le plan de transport, pour proposer 15 % d'offre supplémentaire pendant la période olympique. La maintenance a par ailleurs été largement anticipée ces dernières années pour minimiser les risques d'incidents pendant l'épreuve.

Avec cette planification, globalement, tout est déjà joué côté infrastructures

Il n'y a pas de miracle à attendre : les transports des Jeux de Paris ressembleront grossièrement ceux que nous connaissons aujourd'hui. Devenir, comme espérer, champions de l'accessibilité est un rêve qui restera malheureusement hors de portée pour l'un des plus vieux réseaux de métro du monde, dont l'utilisation intensive complique toute modernisation.

Côté arbitrage, la sécurité s'est vue renforcée, avec notamment une augmentation de 20% des effectifs côté sûreté ferroviaire à la SNCF. 5 millions d'euros ont également été investis pour sécuriser 100 sites du réseau francilien avec des moyens humains et matériels accrus. Un gage de fair-play face aux imprévus.

Là où il reste une marge de manœuvre pour les transports - et une marge qui peut faire toute la différence -, c'est du côté du mental. Celui des personnels, d'abord. Cet été, il y aura sur les rails 280 conducteurs de métro de plus qu'un été classique. C'est énorme, mais il reste encore un important coup de collier à donner pour recruter, former et motiver tous les effectifs indispensables pour assurer correctement la circulation sur les voies, les routes et dans les gares pendant les Jeux. Espérons que les grèves qui menacent ne sape pas tous ces efforts.

L'esprit d'équipe des Franciliens est l'autre variable non maîtrisée

Vont-ils adapter leurs déplacements estivaux pour soulager un réseau saturé ? Ils y sont en tout cas incités à grand renfort de communications et d'outils dédiés, comme le site « Anticiper les Jeux » et l'imminente application « Transport Public Paris 2024 ». Avec son prix exorbitant de 4 euros, le ticket de métro, s'il a reçu un carton rouge du public, vise-lui aussi à désengorger les transports. Et à faire porter le surcoût de 200 millions des transports aux touristes. Arbitrage politique.

À quelques mois des JOP, il serait dommage de faire de l'antijeu en jouant les Cassandre. Etat, Région, Mairie de Paris, opérateurs, voyageurs : à l'image du QG dans lesquels seront bientôt rassemblées les parties prenantes des transports pour les Jeux, l'heure est à l'effort collectif dans cette dernière ligne droite pour se donner les moyens du succès. Il sera toujours temps de refaire le match une fois qu'il sera joué.

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(*) Julien Joly est spécialiste des transports au sein du cabinet de conseil Wavestone. Il accompagne les entreprises du secteur des transports dans leurs projets de transformation. Il intervient régulièrement dans les médias pour partager sa vision sur les sujets de mobilités.