ZFE : pourquoi Rouen peut espérer échapper au couperet du Crit’air 3

Rouen pourrait bien avoir désamorcé « la bombe sociale » que redoutait le président de la Métropole, Nicolas Mayer Rossignol, s’il lui avait fallu interdire les véhicules étiquetés Crit’air 3 à l’intérieur de la Zone à Faibles Emissions. Explications.
Les véhicules Crit'air 4 et 5 sont interdits de circulation dans 13 communes de la Métropole de Rouen depuis un an.
Les véhicules Crit'air 4 et 5 sont interdits de circulation dans 13 communes de la Métropole de Rouen depuis un an. (Crédits : DR)

Lorsqu'en septembre 2022, le président PS de la Métropole de Rouen décide d'aller au-delà de ce que lui impose la loi Climat et Résilience en interdisant la circulation non seulement des véhicules estampillés Crit'air 5 mais aussi ceux Crit'air 4, il sait qu'il ne va pas se faire que des amis. De fait. De manifestations en pétitions, l'exécutif affronte des tirs de barrage nourris, tant de la part de son opposition que de certains élus de sa majorité, oublieux que la capitale administrative de la Normandie figure dans le top 5 des conurbations les plus polluées de France.

Un an plus tard, Nicolas Mayer Rossignol peut se féliciter d'avoir devancé les injonctions du législateur. Au contraire de Paris et Lyon, l'agglomération rouennaise ne devrait pas être obligée d'élargir sa Zone à Faibles Emissions à d'autres catégories de véhicules, ce qui lui pendait pourtant au nez.

Responsable ? Une disposition un peu alambiquée du décret régissant les ZFE. Celle-ci concerne exclusivement les cinq métropoles qui dépassaient régulièrement les seuils règlementaires de qualité de l'air avant le vote de la loi. A savoir : Rouen, Marseille/Aix, Strasbourg, Lyon et Paris. Le texte veut que si ces dernières dépassent de nouveau les seuils pendant trois ans sur la période 2019-2023, elles se voient contraintes de bannir les voitures particulières estampillées Crit'air 3 à compter du 1er janvier 2025. En clair, de barrer la route à tous les véhicules à moteur diesel immatriculés avant 2016 et à ceux à moteur essence d'avant 2006.

« Si j'avais fait l'autruche... »

A ce stade, cette épée de Damoclès plane toujours au-dessus de la tête de la Métropole de Rouen. Comme Marseille et Strasbourg, elle est bien repassée sous la barre fatidique des 40 microgrammes de dioxyde d'azote par mètre cube d'air pendant deux ans (en 2020 et 2021 dans son cas) mais l'a franchi en 2019 et 2022. L'année en cours restait donc celle sur laquelle tablait son président pour échapper au couperet. De ce point de vue, les derniers relevés d'Atmo Normandie, l'entité jumelle d'AirParif pour la capitale, sont encourageants.

La qualité de l'air s'est sensiblement améliorée au cours des premiers mois de 2023, laissant à penser que Rouen est « en passe de réussir son pari », pour reprendre les termes de Nicolas Mayer Rossignol. L'intéressé se garde bien d'en attribuer le seul mérite à la ZFE, il évoque la montée en puissance des deux roues et du covoiturage ainsi que le verdissement de la flotte de bus. Pour autant, il ne cache pas son soulagement.

« Si j'avais fait l'autruche, nous n'en serions pas là. On a sauvé notre peau, souffle-t-il. Interdire une voiture sur cinq aurait été une bombe sociale. Au reste je défie quiconque de mettre en pratique cette interdiction ».

Vers un assouplissement

Moyennant quoi, l'exécutif métropolitain songe aujourd'hui à desserrer (un peu) l'étau. Son patron évoque pour l'an prochain la mise en place d'un « pass » , ce à quoi il s'était refusé jusqu'ici. Celui-ci permettrait aux véhicules les plus anciens de déroger à la règle jusqu'à 24 fois par an. Au delà, Nicolas Mayer Rossignol table sur le renouvellement mécanique du parc automobile pour améliorer durablement  la qualité de l'air. Il fait valoir les 40 millions d'aides mis sur la table par sa collectivité au profit des conducteurs les plus désargentés : « les plus généreuses de France ».

Reste à espérer que cette prodigalité soit payée en retour. Malgré les progrès récents, la capitale administrative de la Normandie -comme d'ailleurs ses consoeurs en ZFE- demeure très en deçà des seuils « recommandés » par l'Organisation Mondiale de la Santé. A savoir 10 microgrammes de dioxyde d'azote par mètre cube d'air à comparer avec les 37 microgrammes enregistrés à Rouen l'an dernier. Un gap qui dit bien la difficulté de concilier social et écologie.

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Commentaires 4
à écrit le 19/09/2023 à 14:05
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Comment attribuer les effets de la baisse de la pollution à la ZFE alors qu’elle n’était pas encore mise en place : un peu de rigueur dans les articles de presse ne ferait pas de mal

à écrit le 19/09/2023 à 8:20
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"Un gap qui dit bien..." Mesdames et messieurs les journalistes, pourriez-vous SVP faire l'effort de parler français. Il existe un mot français pour "gap" : écart.

à écrit le 19/09/2023 à 6:23
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Ben disons qu'encore une fois on met les forces de l’ordre en porte à faux avec la population on comprend pourquoi ils pètent les plombs les flics avec tout ce qu'on leur demande alors que cela ne devrait pas être leur rôle.

à écrit le 18/09/2023 à 20:32
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Une ville où la pollution est sous le seuil 'charnière' n'a pas à durcir les règles Crit'Air des ZFE mais il va baisser, le seuil, il faut donc le prévoir et anticiper. A Paris, jour sans voiture, le NOx a baissé de 5 à 20%, c'est 'peu', à voir pour ...

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