Pays de la Loire : dans les Mauges, les entreprises doivent composer avec le plein-emploi

Ce n’est pas un scoop, l’emploi se porte très bien dans les Mauges, parfois nommées « le pays des entreprises à la campagne », au cœur du triangle Nantes-Angers-Cholet. A tel point qu’elles rencontrent des difficultés de recrutement aussi croissantes que persistantes. Or, elles se répercutent directement sur l'activité et les capacités des entreprises à se développer, les forçant à composer avec cette situation de plein-emploi.
(Crédits : ©D.Drouet)

Bon nombre d'entreprises viennent s'installer sur le territoire de Mauges Communauté (1) pour croître dans le deuxième bassin industriel des Pays de la Loire, qui se trouve au carrefour d'Angers, Nantes et Cholet. Situé dans le département du Maine-et-Loire, il est directement relié aux autoroutes A11 et A87. Il a ainsi la particularité de regrouper six communes nouvelles (Beaupréau-en-Mauges, Chemillé-en-Anjou, Mauges-sur-Loire, Montrevault-sur-Èvre, Orée-d'Anjou et Sèvremoine) depuis 2016 (anciennement, il y avait 64 communes historiques) et environ 120.000 habitants.

Lire aussiPays de la Loire : l'association Fibois veut mettre autour de la table institutions et acteurs privés de la filière bois

Quelque 9.000 entreprises (dont les micro-entreprises) cohabitent sur cette intercommunalité employant pas moins de 41.000 salariés. Dans le détail, 40% œuvrent dans le tertiaire, 30% dans l'industrie, 20% dans l'artisanat et 10% dans l'agriculture. Deux tiers de ces entreprises ont moins de trois salariés, 20% entre 3 et 10 salariés et 12% plus de 10 salariés.

« Sur les dix dernières années, dans 94% des installations, les chefs d'entreprise viennent du territoire », souligne Franck Aubin, vice-président Développement Économique de Mauges Communauté.

Les entreprises en provenance de l'extérieur, elles, sont plutôt de grande taille, à l'image du géant espagnol de l'aluminium Cortizo installé depuis 2014 à Chemillé-Melay ou de l'usine Isover (filiale du groupe Saint-Gobain) à Chemillé-en-Anjou depuis 2010. Et le constat est sans appel : « Tous les secteurs recrutent ! Partout, les entreprises affichent leurs offres d'emploi sur des banderoles », observe-t-il.

Autre chiffre éloquent : le nombre d'offres d'emploi y a progressé de 17,7% en un an, contre 4,4% au niveau départemental, indique Karine Le Gendre, directrice générale d'Ôsez Mauges tourisme et développement. Le hic : les difficultés de recrutement. Dans les Mauges, le chômage ne cesse de reculer pour afficher un taux à 4% environ (contre à 5,5% avant 2020). De quoi conforter sa situation de plein-emploi. Le territoire figure ainsi parmi les zones les moins touchées par le chômage en France, le podium étant occupé par les voisins vendéens Les Herbiers-Montaigu (3,2%).

« Des retards de livraison »

Dans ce contexte, les entreprises tentent de maximiser leurs chances de séduire de potentiels candidats. 94 d'entre elles ont notamment participé à l'opération « C'est quoi ton entreprise ? » organisé pendant le mois d'octobre par l'office du tourisme. Parmi les sociétés participantes, un nouveau venu : Jogam Composants spécialisé dans production de pièces mécaniques, d'engrenages et d'équipements mécaniques, électromécaniques et hydrauliques pour les secteurs de l'aéronautique civile, la Défense et l'armement.

« Nous avons besoin de recruter des usineurs, tourneurs, fraiseurs... (soit une dizaine de personnes à court terme) pour répondre à la hausse croissante des commandes. Mais nous sommes en pénurie de personnel », se désole Bruno Burgevin, le directeur d'exploitation de cette entreprise qui emploie 90 salariés.

Et d'ajouter : « Avant la crise sanitaire, nous ne rencontrions pas cette problématique. Les effectifs étaient suffisants. Mais, après une chute de nos activités en 2020, elles ont repris très rapidement et beaucoup plus fortes que prévues, dès la fin 2021. »

Aujourd'hui, l'entreprise en fait directement les frais. « C'est limitant par rapport à nos capacités de production. Ces problématiques de performances engendrent des retards de production et donc les délais de livraison s'allongent », énumère-t-il.

Alors l'entreprise multiplie les actions pour attirer des candidats : cooptation, formation de personnel non-qualifié, forum de l'emploi, foire expo, réseaux sociaux... Elle n'hésite pas non plus à sortir des frontières régionales pour aller chercher de nouveaux talents.

Lire aussiPénurie de main-d'œuvre : les bonnes pratiques pour recruter rapidement dans les métiers en tension

Pour la première fois, elle a donc ouvert ses portes en octobre dernier, pour accueillir une vingtaine de personnes, principalement des retraités et donc pas de candidats potentiels. « Pour autant, cette opération reste une opportunité pour nous faire connaître, car notre secteur souffre d'un manque de reconnaissance », souligne Mélanie Charozé, chargée des ressources humaines.

« Nous ne recevions aucun CV ! »

A l'ouest, à une vingtaine de kilomètres de là, à Sèvremoine, la société Audouin-Bosabo, un fabriquant de sabots, sandales et chaussons en petites séries (25.000 à 30.000 paires par an) 100% made in France depuis 1890, a dû lui aussi composer avec cette situation de plein-emploi. L'entreprise d'une quinzaine de salariés dit être au complet et n'a pas de besoins immédiats.

Mais cela n'a pas toujours été le cas. « Depuis 2020, nous avons dû recruter pour faire face à l'augmentation de l'activité et à plusieurs départs en retraite. Mais nous ne recevions aucun CV ! Grâce au bouche-à-oreille, nous avons donc recruté des personnes sans expérience que nous avons formées en interne. Mais, cela a été compliqué. Ces deux dernières années, nous étions en sous-effectif et avons dû arrêter les prises de commandes deux mois plus tôt qu'habituellement », explique Alexis Audoin, responsable d'atelier qui représente la 5e génération.

Pour la quatrième année, Audouin-Bosabo a donc renouvelé sa participation à l'opération locale et organisé des portes ouvertes le 17 octobre dernier. Si, cette année, l'événement ne s'est pas soldé par des embauches, ce fut en revanche le cas lors de l'édition 2021. « Nous avions alors recruté une personne en reconversion professionnelle », se souvient Alexis Audoin.

« Nous avons accéléré nos recrutements »

Autre acteur majeur sur le territoire : le groupe industriel Lacroix. Ce dernier a inauguré en 2022 Symbiose, son usine 4.0 dédiée à l'assemblage de composants électroniques. Plus d'un an après cette inauguration à Beaupréau-en-Mauges, le site qui compte déjà 450 salariés recrute au rythme des commandes en forte croissance.

« Nous avons accéléré nos recrutements depuis cet été pour répondre aux enjeux de réindustrialisation de la France. Ainsi, depuis le début de cette année, nous avons embauché 150 personnes à la production, l'ingénierie, la qualité, aux fonctions support... contre une vingtaine de personnes habituellement », indique Karine Raguin, DRH au sein du groupe nantais.

Non sans mal. « Nous avons des difficultés à recruter, admet-elle. En conséquence, nous avions pris du retard sur certains marchés. Avant l'été, nous avons dû faire appel à de la main-d'œuvre étrangère. Aujourd'hui, nous voyons à nouveaux des profils locaux. » Signe que ses actions semblent porter ses fruits : travail sur la marque employeur, renforcement des partenariats avec les écoles, notamment pour faire connaître les métiers de l'électronique auprès des jeunes filles, job dating, mise en avant du centre de formation interne créé il y a une dizaine d'années, site internet dédié aux recrutements...

(1)  Ôsez Mauges tourisme et développement comptabilise 1.150 créations d'entreprises en 2022, contre 600 en 2018.

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaires 2
à écrit le 26/11/2023 à 17:18
Signaler
Il serait intéressant que les entreprises s’installent là où il y a de la main d’oeuvre. Les campagnes ont été vidées de leurs population. Installer son entreprise prés de l’ancrage de son voilier, ou de sa villa de vacances pose donc des problèm...

à écrit le 15/11/2023 à 19:00
Signaler
Bonjour, Dans les années de fin années 60 il y avait aussi des problèmes de recrutement a partir de bac. plus 2 Or certaines études s'arrêtaient a bac plus 1, les entreprises en lien avec les AFPA avaient lancé des classes de niveau terminal a bac...

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.