Biathlon : Julia Simon, dame nature

Reine des Mondiaux avec quatre médailles d’or avant la mass start, la Savoyarde n’aime rien tant que l’air pur de ses montagnes et le travail du bois.
Julia Simon a conclu le relais féminin, victorieux hier pour la première fois de son histoire, à Nove Mesto (République tchèque). Le relais masculin a décroché le bronze.
Julia Simon a conclu le relais féminin, victorieux hier pour la première fois de son histoire, à Nove Mesto (République tchèque). Le relais masculin a décroché le bronze. (Crédits : © Joe Klamar / AFP)

À quoi tient un destin ? À une grosse frayeur, dans le cas de Julia Simon. L'adolescente savoyarde a suivi son père, très porté sur le ski alpin et qui tenait à lui faire goûter les joies de la glisse. Mais un jour, une piste un peu trop rapide lui a collé une peur bleue. Aussitôt, elle a pris la décision de s'en tenir au nordique, qu'elle pratiquait déjà. Elle s'est toujours plu « au milieu de la nature », et ce n'est pas pour réguler la population animale qu'elle a accroché une carabine dans son dos, à l'âge de 15 ans. Plutôt pour imiter son modèle, Raphaël Poirée, première locomotive du biathlon français dans les années 2000. Très vite, un premier titre de championne de France juniors a confirmé le bien-fondé de son orientation.

D'espoir à star, Julia Simon n'a pas traîné en route. Jusqu'à la consécration absolue lors de ces championnats du monde à Nove Mesto (République tchèque). À 27 ans, elle a remporté l'or sur le sprint, la poursuite, le relais mixte et le relais féminin (hier, une première pour la France), ainsi que le bronze sur l'individuel. Elle peut compléter sa folle moisson lors de l'ultime épreuve de ce marathon, la mass start (14 h 15). Elle en a laissé un peu aux autres, jeudi, quand le staff tricolore a choisi Lou Jeanmonnot pour accompagner Quentin Fillon Maillet sur le relais simple mixte - un triomphe bleu de plus. « Je ne suis pas une machine », a justifié « la biathlète la plus complète qu'on ait vue », d'après la légende norvégienne Ole Einar Bjoerndalen.

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« Une gamine timide qui manquait de confiance en elle »

Et dire qu'au premier jour de la saison, le 26 novembre à Östersund (Suède), la tenante du gros globe de cristal de la Coupe du monde se disait « cuite mentalement » après la révélation d'une enquête pour escroquerie à la carte bancaire au détriment de sa coéquipière en équipe de France Justine Braisaz-Bouchet, licenciée aux Saisies comme elle. Une drôle d'affaire qui a valu à Julia Simon une garde à vue et un début de saison pénible. Trois mois plus tard, elle a véritablement touché le jackpot.

Dossard épinglé sur la combinaison, elle parcourt le monde pour dégommer des cibles et doubler ses concurrentes. Mais son bonheur se trouve dans un rayon de 40 kilomètres autour deVillard-sur-Doron, sa commune en Savoie, située entre 600 et 2 000 mètres d'altitude. D'Albertville, où elle est née, à Moûtiers, où elle a passé quatre années en sport-études, en passant par son collège à Beaufort. Pendant les Mondiaux, la station des Saisies a bruyamment accompagné ses exploits télévisés. « Elle a débuté et progressé là-haut, alors qu'elle était une gamine timide qui manquait de confiance en elle, se souvient son père, Pierre Simon, pisteur secouriste sur le site. La section nordique des Saisies, c'est sa deuxième famille. »

Demain, elle rentre chez elle pour une dizaine de jours, avant la prochaine étape de la Coupe du monde, à Holmenkollen (Norvège). Respirer et déconnecter dans « le paysage incroyable » du Beaufortain, qu'elle aime parcourir « seule au monde », hiver comme été, pour cueillir des champignons. Ambassadrice du fonds de dotation ONF-Agir pour la forêt, Julia Simon s'investit pour la protection de la biodiversité.

Bois de cerf, résine époxy et colère agricole

Quelques moments de plénitude avant les trois derniers rendez-vous de l'hiver. À l'approche du printemps, il lui arrive de ramasser des bois de cerf. Titulaire d'un CAP en menuiserie, la vice-championne olympique de Pékin sur le relais mixte s'imagine une prochaine vie d'ébéniste. Travailler le bois l'apaise. Casque sur les oreilles, ponceuse en main, elle fabrique des meubles ou des tableaux dans son atelier de Villard, qu'embaume le parfum de la résine époxy. Hors saison, elle y mûrit un projet de construction.

Le biathlon n'a pas tellement sa place à la maison. « On n'a pas non plus parlé de la colère récente du monde agricole, chacun ses problèmes, glisse Pierre Simon, producteur de lait depuis bientôt trente ans. Mais on sait bien que Julia n'est pas indifférente aux longues heures que l'on passe à travailler. » Les parents ont élevé trois filles au grand air. L'une vient d'obtenir un diplôme de pharmacienne au Canada, l'autre partage son temps entre un magasin de sport et un troquet. Julia, elle, a besoin de grands espaces où s'évader. C'est dans sa nature.

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