La billetterie « para » en mode commando

Deux tiers des billets des Jeux paralympiques restent à écouler. L’enjeu financier est faible, mais celui de l’engouement populaire est majeur.
Finale du 100 mètres féminin des Jeux paralympiques de Tokyo, le 3 septembre 2021.
Finale du 100 mètres féminin des Jeux paralympiques de Tokyo, le 3 septembre 2021. (Crédits : © LTD / ATHIT PERAWONGMETHA/reuters)

C'est une rengaine connue du milieu. Après chaque édition des Jeux paralympiques, les organisateurs regrettent de ne pas en avoir fait plus pour alerter sur « la dimension extraordinaire de cet événement », raconte Michaël Aloïsio, directeur délégué de Paris 2024, et témoin à Londres en 2012 de compétitions qui l'ont marqué. Cette expérience, qu'il partage avec son président, Tony Estanguet, et d'autres cadres du comité d'organisation, n'est pas étrangère à l'offensive menée ces dernières heures auprès de l'État, des collectivités locales, des diffuseurs et des entreprises partenaires : « On est en train de multiplier les rendez-vous pour les pousser à mieux promouvoir les Jeux paralympiques. C'est notre priorité du moment, assumée d'autant plus facilement qu'on a la chance de ne pas avoir de sujets d'inquiétudes majeurs avec les JO. »

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Indicateur phare de l'engouement populaire recherché, la billetterie paralympique est « surveillée comme le lait sur le feu », image Élie Patrigeon, directeur général du comité paralympique français. À ce jour, 900 000 des 2,8 millions de places ont été vendues, mais 650000 à des institutionnels (entreprises partenaires, État, collectivités locales) et seulement 250000 à des particuliers. Des compétitions affichent complet (escrime fauteuil, tir sportif, paratriathlon), d'autres ne sont pas loin de l'être (paracyclisme, paraéquitation, tennis fauteuil), mais beaucoup séduisent peu. Quand elles ne sont pas délaissées, comme la boccia, sorte de pétanque inconnue du grand public. « On n'a médiatisé aucune course, regrette Alexis Hanquinquant, médaillé d'or en paratriathlon à Tokyo en 2021. À partir du moment où les gens ne connaissent pas, ils se posent la question de l'intérêt. » Celui-ci ne se montre pourtant « pas inquiet ».

«Très loin d'une mise en péril »

Au regard des éditions précédentes, il est en effet hâtif de s'alarmer. Et peu pertinent
de comparer avec les JO, pour lesquels la bataille afin d'assister aux épreuves est
mondiale et fait rage très en amont: 7,8 des 10 millions de sésames ont déjà trouvé preneurs, dont 6 pour les particuliers. Pour les Jeux paralympiques, il est de tradition que les locaux constituent 90 % des acheteurs et que la billetterie décolle entre la fin des JO et le début de la compétition, puis s'affole grâce aux premières épreuves télévisées. « À Londres, la moitié des 2,3 millions de billets s'étaient vendus dans cette dernière ligne droite », rappelle Élie Patrigeon. Même à Rio en 2016, où la tenue des « Para » est longtemps restée incertaine à cause de problèmes logistiques, la fête a fini par être belle.

Sujets d'inquiétude pour certains acteurs publics selon Le Monde, les enjeux financiers liés à la billetterie paralympique semblent pourtant mineurs. Ses 90 millions de revenus potentiels, dont 30 déjà engrangés, pèsent bien peu par rapport aux 1,2 milliard de tickets mis en vente par Paris 2024, et aux 4,4 milliards de revenus globaux. « On ne voudrait pas que ces 60 derniers millions manquent, mais on est très loin d'une mise en péril », assure Michaël Aloïsio. Depuis leur création en 1960, les Jeux paralympiques n'ont jamais pu se financer. Paris ne fera pas exception. L'événement vit des revenus tirés des JO (contribution du Comité international olympique, partenaires, billetterie...), et un peu de subventions publiques directes (171 millions d'euros) et indirectes (places achetées pour les scolaires...).

L'effet « Quotidien »

Cela permet au moins de mener une politique tarifaire attractive. La moitié des billets sont proposés à moins de 25 euros. Le prix d'entrée est de 15 euros pour toutes les compétitions, y compris celles organisées dans des sites prestigieux que les athlètes handicapés partagent avec les valides. Le billet le plus cher, pour des finales de para-athlétisme au Stade de France, est à 100 euros. La même place pour assister à la finale du 100 mètres des valides était proposée à 950 euros. « Il faut nourrir la curiosité, déclencher l'intérêt », pointe la paratriathlète Gwladys Lemoussu. Membre de la commission des athlètes paralympiques, cette dernière aurait rêvé qu'il y ait davantage d'initiatives.

Pour familiariser le public avec les champions, le comité d'organisation a misé sur une opération de communication, lancée le 20 mai, à J-100 de la cérémonie d'ouverture. Elle mettra en avant des membres de l'équipe de France tels qu'Alexis Hanquinquant, Sandrine Martinet (judo), Lucas Mazur (badminton), Alexandre Léauté et Marie Patouillet (cyclisme). Le 12 février, le passage dans l'émission Quotidien (TMC) du champion paralympique de saut en longueur Arnaud Assoumani a eu un effet immédiat sur la billetterie, inhabituellement sollicitée le lendemain. Élie Patrigeon insiste: « Il n'y a pas d'événement plus puissant que les Jeux pour changer le regard des Français sur le handicap. »

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