Droit à l'oubli, plaintes... Les Français s'accaparent leurs droits numériques. "2017 a été une année très active pour la Cnil : nous avons de plus en plus de sollicitations", affirme Isabelle Falque-Pierrotin, présidente de la Commission nationale informatique et libertés (Cnil) lors de la présentation ce mardi du rapport d'activité 2017.
"La digitalisation de notre société va de pair avec une inquiétude croissante des citoyens sur l'utilisation de leurs données personnelles", poursuit-elle.
Conséquence : les plaintes grimpent en flèche. La Cnil a reçu un nombre record de 8.360 plaintes l'année dernière - contre 7.703 en 2016. Elles sont en hausse de 44% par rapport à 2015. Parmi les plaintes reçues, 27% portent sur la réputation en ligne avec 335 demandes de déréférencement. Deuxième motif de plainte : le secteur marketing/commerce, qui recueille 25% des plaintes, notamment pour de la prospection par courriel, téléphone ou courrier. Le conseil de la Cnil pour éviter les spams : créer des adresses électroniques selon les usages (professionnel, achats en ligne, réseaux sociaux...)
Les plaintes donnent aussi une indication sur les nouvelles préoccupations des internautes. Parmi les tendances, la Cnil identifie les objets connectés (cf. "l'Internet des objets", ou IoT), tels que les compteurs Linky, ou encore les enceintes connectées.
Prise de conscience des internautes
Cette augmentation des plaintes s'accompagne d'une "explosion des visites sur le site internet de la Cnil", se félicite Isabelle Falque-Pierrotin. En effet, le site a plus que doublé de fréquentation, en recensant 4,4 millions de visites en 2017 (+59% par rapport à 2016). Les requêtes sur la plateforme "besoin d'aide" ont aussi grimpé de 21% pour s'établir à 14.701 saisines en ligne en 2017. "Le premier outil de régulation pour la Cnil est la pédagogie", martèle la présidente de la Commission.
L'activité de la Commission est aussi portée par les différentes polémiques d'utilisation ou de collecte détournée des données personnelles. Dernier scandale en date : l'affaire Cambridge Analytica, qui plonge Facebook la tourmente. Le cabinet d'analyse Cambridge Analytica, au service de Donald Trump pendant sa campagne électorale et pour le mouvement "Leave.EU" lors du Brexit en 2016, a mis la main sur les données personnelles de 87 millions d'utilisateurs Facebook, sans leur consentement direct.
"Ce genre de scandale accentue la prise de conscience des internautes. Nous sommes dans la pédagogie par le drame", estime Isabelle Falque-Pierrotin.
Et de poursuivre :
"Cambridge Analytica prend de revers la logique des grands acteurs d'internet. Beaucoup d'entre eux se sont longtemps présenté comme des acteurs de la démocratie, de la transparence... C'est la raison pour laquelle l'effet image est particulièrement négatif."
"Le RGPD est une chance pour l'Europe"
En guise de réponse, la Cnil mise sur le fameux Règlement général sur la protection des données (RGPD), qui entrera en vigueur le 25 mai prochain. "Le RGPD est une chance pour l'Europe. Il offre un cadre juridique de confiance pour le développement de nos sociétés numériques, assure la présidente de la Commission. C'est une réponse opérationnelle face à une crise de confiance, entamée en 2011." En cas de violation du règlement, les entreprises peuvent encourir des sanctions allant jusqu'à 4% de leur chiffre d'affaires mondial... Pour autant, la Cnil assure vouloir être "pragmatique".
"Il en va de la crédibilité des régulateurs européens de faire appliquer le RGPD, donc il n'y aura aucune période de grâce par principe, affirme Isabelle Falque-Pierrotin. En revanche, nous n'aurons pas un tableau de chasse des sanctions. Nous prendrons en compte les efforts réalisés pour la mise en conformité, la bonne foi, les obligations nouvelles ou encore le type d'entreprise."
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