Cybersécurité : le français Vade Secure lève 70 millions d'euros pour protéger les emails

Grâce à ses récents contrats avec certains des plus gros opérateurs mondiaux (Softbank, Comcast, Orange...), la startup lilloise protège désormais les messageries électroniques de plus de 600 millions de personnes dans le monde. Elle lève 70 millions d'euros auprès de fonds américains pour accélérer sa conquête du marché de la protection de l'email et poursuivre le développement de l'intelligence artificielle dans ses produits.
Sylvain Rolland
Vade Secure vérifie environ 10 milliards de courriels par jour. Ses 5000 clients sont répartis dans 76 pays.

"Nous voulons devenir un leader mondial de la sécurité, devenir une licorne et, pourquoi pas, entrer en Bourse." Georges Lotigier, Pdg du champion français de la sécurité des messageries électroniques Vade Secure, affiche haut ses ambitions. Et pour cause : grâce à la signature, ces derniers mois, de contrats majeurs avec certains des plus grands opérateurs télécoms mondiaux dont Comcast, Softbank ou encore Orange, la pépite de Hem, dans la banlieue lilloise, protège les emails de plus de 600 millions de personnes dans le monde. Une performance qui lui a permis de réaliser en quelques semaines une nouvelle levée de fonds, sa deuxième, d'un montant de 70 millions d'euros, auprès du fonds américain General Catalyst, basé à Boston.

"Notre technologie est la meilleure au monde sur la protection des emails, c'est pour ça qu'une petite boîte française comme nous a pu signer des contrats énormes, au nez et à la barbe des géants du secteur. C'est donc le moment d'accélérer notre expansion mondiale pour conquérir le marché car nous sommes encore un petit avec 1% du marché de la sécurité du mail", affirme le dirigeant, qui cible surtout les États-Unis, l'Europe et le Japon.

Une technologie maison qui arrête 99,9% des attaques par mail

Créé en 2009 mais rachetée en 2013 par quatre entrepreneurs dont Georges Lotigier, Vade Secure s'est concentré pendant de longues années au développement de sa technologie. Celle-ci permet de protéger les messageries électroniques des cyberattaques comme le phishing et le spear-phishing (hameçonnage en français, une technique qui consiste à récupérer des données personnelles via un courriel frauduleux pour usurper l'identité de sa cible), les malwares (logiciels malveillants qui injectent un virus en cliquant sur un lien dans un courriel) ou encore les ransomwares, qui, à partir du lien frauduleux, bloquent l'accès à l'ordinateur et demandent une rançon pour en retrouver l'usage. Une nécessité absolue pour les entreprises, étant donné que le courriel reste le vecteur d'attaque privilégié des cybercriminels. Accenture estime même à 5,2 milliards de dollars sur cinq ans le coût des attaques ciblant les entreprises.

Vade Secure -qui s'appelait jusqu'à 2016 Vade Retro- a véritablement percé il y a quatre ans grâce à ses algorithmes de reconnaissance des attaques ciblées, ce qui lui a permis, en 2017, de réaliser sa première levée de fonds, de 10 millions d'euros, auprès du fonds français Isai. Mais c'est en 2018, avec le lancement de la solution Vade Secure pour Office 365, que l'entreprise a franchi un cap. La solution cartonne auprès de plus de 5.000 clients via la vente en marque blanche, et a gagné plusieurs récompenses prestigieuses du secteur, notamment l'Award InfoSec 2019, décerné par le Cyber Defense Magazine.

"Le marché de la cybersécurité est très concurrentiel, mais il y avait bizarrement peu de vraies innovations sur l'antispam. On a identifié ce trou dans la raquette et on a tout misé dessus", explique Georges Lotigier, qui assume un vrai "pivot" sur son dernier produit pour Office 365.

L'intelligence artificielle pour conquérir des parts de marché

Aujourd'hui, Vade Secure vérifie environ 10 milliards de courriels par jour. Ses 5.000 clients sont répartis dans 76 pays et se divisent entre des opérateurs télécoms (Vodafone, Orange, Comcast, British Telecom), des PME, des OEM (équipementiers) et des entreprises comme Le Point, L'Humanité et des collectivités locales. La France pèse environ la moitié de son activité, le reste étant divisé entre l'Asie (15%), le reste de l'Europe et la Russie. Si les comptes consolidés demeurent secrets, le dernier chiffre d'affaires publié s'élevait à 7,4 millions d'euros pour l'exercice 2017, avec une perte nette de 1,53 million.

Pour consolider ses positions, l'entreprise mise énormément sur l'IA.

"Pour être performant et améliorer sans cesse nos algorithmes grâce à l'apprentissage profond, il faut énormément de données. C'est notre force car nous avons 600 millions de boîtes mails. Derrière Google, qui en aurait 1,5 milliard, peu d'acteurs peuvent disposer d'autant de données que nous sur segment", précise Georges Lotigier.

À l'avenir, Georges Lotigier souhaite concentrer ses efforts sur Vade Secure pour Office 365, avec une stratégie de commercialisation concentrée sur la vente au travers des MSP (prestataires informatiques qui gèrent à distance l'informatique de leurs clients) et des agrégateurs, pour adresser les PME en Amérique du Nord, où tout reste à faire ou presque, en Europe et au Japon principalement.

Revers de la médaille : pour accéder à l'énorme marché américain via le fonds General Catalyst, les quatre "fondateurs" français, qui l'ont rachetée en 2013, doivent lâcher leur contrôle. Le pool d'investisseurs mené par General Catalyst devient majoritaire au capital, tandis que les quatre dirigeants ainsi que trois autres salariés et Isai, passent en minorité même s'ils conservent des parts.

Sylvain Rolland

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