La deeptech Prophesee lève 25 millions d'euros pour donner la vue aux aveugles et aux machines

Après avoir rendu la vue à quelques dizaines d'aveugles grâce à la première rétine en silicium au monde, la deeptech française Prophesee veut désormais équiper les machines dans les usines et vise à terme l'électronique et l'Internet des objets grand public, y compris les véhicules autonomes de demain.
Sylvain Rolland
Fruit d'une quinzaine d'années de recherche et développement (R&D), la technologie de Prophesee permet de donner aux machines une vision artificielle pour la maintenance prédictive.
Fruit d'une quinzaine d'années de recherche et développement (R&D), la technologie de Prophesee permet de donner aux machines une vision artificielle pour la maintenance prédictive. (Crédits : DR)

C'est l'un des succès les plus spectaculaires de la deeptech française. Basée à Paris et à Grenoble, la jeune pépite Prophesee annonce ce lundi 28 octobre le succès de sa troisième levée de fonds, d'un montant de 25 millions d'euros. Au total, l'entreprise a récolté 61 millions d'euros depuis sa création en 2014, une rareté pour ce type de startups en France. Cette fois, l'entreprise est soutenue par la Banque européenne d'investissement (BEI), tandis que ses investisseurs historiques iBionext 360 Capital Partners, Intel Capital, Robert Bosch Venture Capital et Supernova Invest remettent au pot.

Lire aussi : Vision artificielle : le français Prophesee lève 19 millions de dollars

Une rétine artificielle qui rend la vue aux aveugles et la donne aux machines

Fruit d'une quinzaine d'années de recherche et développement (R&D) menée par l'Institut de la vision (CNRS, UPMC, INSERM) sur le cerveau et l'œil depuis le début des années 2000, Prophesee s'est lancée en tant que startup en 2014 avec l'objectif d'imposer sa technologie révolutionnaire de vision neuromorphique, qu'on appelle aussi vision par ordinateur ou vision artificielle. Son secret : s'inspirer du fonctionnement de l'oeil humain pour "donner la vue" aux machines.

"La technologie de Prophesee permet ce qu'on appelle la vision par événement, c'est-à-dire le fait de n'enregistrer que le mouvement, à une vitesse inédite jusqu'à 100.000 images par seconde, à partir d'une rétine artificielle intégrée dans les capteurs. Une caméra classique n'en enregistre qu'une vingtaine par seconde", explique le Pdg et cofondateur Luca Verre depuis Tokyo, où son entreprise dispose aussi de bureaux, comme aux Etats-Unis et en Chine.

Lorsqu'ils se lancent dans le grand bain de l'entrepreneuriat, les quatre cofondateurs Bernard Gilly, Christoph Posch, Luca Verre et Ryad Benosman décident de marquer les esprits et de prouver la pertinence de leur technologie en... rendant la vue aux aveugles. Ils ont donc développé la première rétine artificielle en silicium au monde, qui a permis à "plusieurs dizaines d'aveugles de voir à nouveau", d'après Luca Verre. Les deux premières levées de fonds, en 2016 et 2018 (36 millions d'euros en tout), ont principalement servi à développer la deuxième et la troisième génération de la technologie, avec le support d'acteurs industriels.

L'objectif : conquérir le secteur de l'industrie 4.0 en révolutionnant la maintenance prédictive. Le capteur Metavision, désormais prêt à l'emploi et à la production de masse, a déjà trouvé des clients dans plusieurs industries. Fruit d'une collaboration avec l'entreprise allemande Imago, spécialiste des caméras industrielles, Metavision intègre toutes les briques technologiques de Prophesee: les capteurs de vision, les algorithmes et la puissance de calcul embarquée. De quoi permettre une analyse des données sur le site (edge computing ou informatique en périphérie de réseau) qui va beaucoup plus loin que les solutions actuelles.

Demain, les véhicules autonomes ?

51 brevets protègent aujourd'hui la technologie de rupture de Prophesee, qui estime qu'elle est désormais prête à conquérir le monde de l'industrie. Les 25 millions d'euros levés en Série C serviront donc à nettement accélérer le déploiement et la commercialisation de Metavision.

"Notre technologie est très loin d'avoir montré tout son potentiel. Les applications dans l'industrie mais aussi dans l'Internet des objets sont très vastes. La quatrième génération nous ouvrira les marchés de l'automobile, notamment les systèmes Adas d'aide à la conduite et les futurs véhicules autonomes, mais aussi tous les objets connectés qui auront besoin de notre technologie, par exemple dans la réalité virtuelle et augmentée", décline Luca Verre.

Depuis la précédente levée de fonds, en 2018, Prophesee est passée de 70 à 100 employés. Elle compte moins recruter qu'accélérer la commercialisation de sa solution, notamment en Europe, et améliorer toujours les performances de sa technologie. L'arrivée de la Banque européenne d'investissement (BEI) parmi les investisseurs est indéniablement un signe du potentiel de l'innovation de rupture de Prophesee.

Lire aussi : Plan Deep tech : 800 millions d'euros d'aides nouvelles pour l'innovation de rupture

Sylvain Rolland

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Commentaires 4
à écrit le 28/10/2019 à 16:12
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Le Silicium et la France........ CEA, INES, CNRS, IEMN, ONERA et bien d'autres R&D. Soitec, STM, Nanomakers, Silmach, Thales et Gemalto Return, Kalray, Insolight (suisse mais en collaboration avec le CEA), Riber, Scintil Photonics, etc. J'en oubli...

à écrit le 28/10/2019 à 11:35
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Extraordinaire start up. A développer au maxi!!!

à écrit le 28/10/2019 à 10:46
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On ne peut dire que Bravo !

le 28/10/2019 à 14:01
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En effet, je suis d'accord avec vous. On ne peut que les féliciter. La page commentaires de ce journal va quand même nous fournir quelques blasés et frustrés y voyant quelque chose de négatif, ne serait ce que parce que des gens brillants et audacieu...

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