Mounir Mahjoubi : « Faire venir des chercheurs étrangers de l'intelligence artificielle en France »

[SÉRIE] À l'occasion de la Nuit de l'IA, le secrétaire d'État au numérique, Mounir Mahjoubi, a mis l'accent sur le nécessaire effort de pédagogie.
Laurent Lequien

LA TRIBUNE - Avez-vous l'impression qu'il y a des réticences en France face à l'intelligence artificielle ?

MOUNIR MAHJOUBI - Il y a des résistances qui sont légitimes et d'autres pas. Certaines personnes ne veulent pas que vous avanciez dans l'intelligence artificielle (IA) par peur, parce qu'elles n'ont pas été formées et que l'on n'a pas ou peu expliqué ce que l'on voulait faire avec les IA. Ma façon de les convaincre est de leur expliquer que toute la recherche que l'on va faire en France et en Europe est basée sur des piliers de valeurs : la performance et l'humanisme.

Avez-vous des exemples ?

Lors du débat sur la protection des données personnelles à l'Assemblée nationale, nous avons évoqué ces sujets sensibles. Nous nous sommes interdit d'utiliser des algorithmes dont on est incapable d'expliquer le fonctionnement a posteriori. Également, nous avons écarté ceux qui traitent des informations trop sensibles pour les personnes. Cela donne des gages pour rassurer les politiques et surtout les citoyens. L'intelligence artificielle fera ce que l'on souhaitera qu'elle fasse.

Comment percevez-vous l'écosystème français de l'IA ?
Comment donner naissance aux futurs champions de ce domaine ?

Ma première préoccupation, que je partage avec le ministre de l'Économie, est de faire émerger des startups : à la fois celles qui innovent dans la recherche en intelligence artificielle et celles qui utilisent ces technologies pour créer de nouveaux usages. Sur ces deux typologies de jeunes pousses, la France peut et doit jouer un rôle important dans le monde.

Les grands groupes se sont transformés ces dernières années. Allons-nous avoir des champions de l'IA venant de l'économie traditionnelle ? Peut-être... La vraie question est de savoir si nous sommes capables d'avoir de tels champions dans ces domaines, avec des entreprises qui vont se transformer en leader de l'innovation, et si des entreprises de moins de dix ans vont pouvoir devenir les champions de demain. Sur ce dernier point, il faut aider les jeunes pousses à grandir très vite et à conquérir des marchés à l'international en les épaulant lors du passage à l'échelle.

L'arrivée d'acteurs comme Facebook ou Google, qui installent leur centre
de recherche en IA en France, est-elle bénéfique pour notre écosystème ?

C'est toujours vertueux d'avoir des centres de recherche qui s'installent chez nous.

C'est préférable à l'ouverture de centres à l'étranger qui recrutent nos jeunes chercheurs, lesquels ne reviendront alors plus en France. Les investissements étrangers qui participent à créer des pôles de recherche sont une bonne chose pour l'économie française. C'est aussi potentiellement des chercheurs étrangers de grande valeur qui vont venir s'installer en France et qui pourront rester plus tard.

L'IA comme la robotique vont « disrupter » le travail. 
Comment éviter cette nouvelle fracture numérique et donc sociale ?

Il faudra traiter la fracture entre ceux qui maîtrisent et ceux qui ne maîtrisent pas ces technologies. La seule réponse à cette situation passe par les compétences. Comment former ceux qui ne savent pas du tout les utiliser, et comment former ceux qui vont perdre ou devoir transformer leur emploi ? Voilà les enjeux de demain.

Ces technologies vont bouleverser les équilibres économiques et il faudra que la France soit prête. C'est pour cela que le gouvernement a débloqué 15 milliards d'euros sur cinq ans dans le Plan d'investissement compétences [ou PIC, ndlr] pour que chacun soit en droit de se former, de se re-former, pour affronter toutes ces mutations.

Laurent Lequien

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Commentaires 18
à écrit le 28/03/2018 à 11:32
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Pourquoi je suis opposé à l’IA ( l’outil)? Car tout sera superficiel : Question : l’homme peut il exister à moitié ? Laisser les émotions et le stress pour l’homme et ne pas lui permettre d’avancer ou d’évoluer car «  les calculs mathématiques «  fer...

à écrit le 27/03/2018 à 15:35
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Il n’est pas du tout certain que le niveau des salaires, trop bas, et celui des impôts, trop élevés soient de nature à attirer les chercheurs visés qui préfèrent aller dans les Pays plus respectueux de leur niveau de vie. Dommage pour nous !!!!

à écrit le 27/03/2018 à 11:56
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voir la récente étude Harvard/LSE sur les dépenses de santé aux US et autres pays développés (“Health Care Spending in the United States and Other High-Income Countries,” Journal of the American Medical Association, 13/03/2018 ; résumé disponible sur...

à écrit le 27/03/2018 à 11:40
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Je suis un Nord-Américain, et j'ai travaillé un peu partout au Canada et aux États-Unis pendant plus de 40 ans... comme entrepreneur, manager en informatique et comme consultant senior dans plusieurs grandes entreprises et multinationales. Lorsqu...

le 02/04/2018 à 9:34
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Certes , mais un ou deux cas ne détermine pas une «  généralité «  Quand nous avons «  des filtres d’à priori » et quand nous rencontrons «  les gens » même si ces gens font des «  efforts » eh bien nous les mettons quand même «  dans l’étiquette à ...

le 02/04/2018 à 14:10
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@ Citoyen Ordinaire Malheureusement, je parle d'une réalité très largement répandue que j'ai vu et constaté depuis 40 ans et correspond à la majorité des cas... donc, ce n'est pas 2 ou 3 cas pris au hasard. Le constat que je fait est aussi le résu...

le 02/04/2018 à 16:08
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...Il y a les Français et les «  Parisiens «  Et le «  modèle social Français «  qui ne s’exporte pas à l’étranger. Les «  gens » qui s’expatrient en général viennent de milieux aisés ( très aisés) Certains se remettent jamais en question Les Amér...

le 02/04/2018 à 16:56
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Je lis souvent qu'il faut ne pas avoir d'à priori, vous voulez sans doute dire pas de préjugés... mais l'expérience que l'on a d'un phénomène si celui-ci se vérifie et se répète coup après coup dans le temps long, ne serait-il pas plus juste et honnê...

à écrit le 27/03/2018 à 11:33
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si l'Europe venait a échouer,la France pourrait se replier sur une zone économique commune avec les pays de la zone "franc CFA" en Afrique.Cela sous entendrait la libre circulation, des biens et capitaux,des travailleurs et citoyens.Cela redynamiser...

le 28/03/2018 à 8:10
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Les Africains de l'ouest partent en majorité de l'autre côté de l'Atlantique plutôt que de l'autre côté de la Méditerranée. Pourquoi? Nombreux sont ceux qui y ont de la famille., d'une part, deuxio , les universités US et canadiennes sont hélas, plus...

à écrit le 27/03/2018 à 10:26
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Cela signifie-t-il que les chercheurs étrangers seraient plus performant que les chercheurs français ? On pourrait peut-être alors élire des politiciens étrangers pour résoudre les problèmes de la France, non ?

le 29/03/2018 à 9:18
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On ne peut que constater le mépris envers les chercheurs Français, qui sont pourtant très courtisés par les pays étrangers. Y-a-t-il encore des politiciens nationalistes au gouvernement ? Et la France est-elle encore une nation ?

à écrit le 27/03/2018 à 10:24
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très joli tout cela. Pourrait on s’arrêter un peu, regarder et réfléchir ? à quoi sert tout cela, pourquoi cette course continuelle à l’échalote du "progrès", pour la beauté de la recherche scientifique? pour l'amélioration de la condition humaine? p...

à écrit le 27/03/2018 à 9:48
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Les USA ont autorisé des tests depuis longtemps alors qu'en France, on interdit tout. L'innovation est freinée plutôt que d'être encouragée, la création d'entreprise est fastidieuse, les charges et la complexité ambiante plombe toute velléité d'entre...

le 27/03/2018 à 10:02
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Faites attention vous avez déjà écrit le même type de commentaire mais sous un autre pseudo juste en dessous, "L'état français gna gna..."

à écrit le 27/03/2018 à 9:35
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Vous n'avez pas tout a fait compris. Une partie non negligeable des chercheurs cles en IA sont francais, et sont partis en Californie parceque la loi francaise (fiscalite, loi CNIL) est trop restrictive, empeche le developement de ces technologies en...

à écrit le 27/03/2018 à 8:44
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Faire venir des travailleurs polonais à 300 euros par mois, ou moldaves ou roumains aussi, bref nos marcheurs n'ont absolument aucune idée neuve, que des vieilles recettes rincées à la corde et n'ayant prouvé que leur inefficacité. Et former nos ...

à écrit le 27/03/2018 à 8:22
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Faire venir....non merci, nous avons nos enfants qui font les mêmes études et qui sont tout aussi brillants...il y en a assez de cette "élite" internationalisée qui ne pense qu'exotisme....car au final ce n'est que cela!

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