5G : le marché français sérieusement obscurci pour Huawei avec les restrictions de l'Anssi

C'est une question de "gestion des risques" et de "souveraineté nationale", explique Guillaume Poupard, le directeur général de l'Anssi, chargée par le gouvernement d'instruire ce dossier. Huawei ne fera pas l'objet d'un "bannissement total" mais les opérateurs français l'utilisant vont, au mieux, recevoir des autorisations d'exploitation limitées à huit ans, selon l'Agence nationale de sécurité des systèmes informatiques (Anssi). Entre autres problèmes à venir, les opérateurs ont prévenu qu'ils demanderont une compensation si l'État barre la route au groupe chinois.
Seuls trois équipementiers télécoms, les européens Nokia et Ericsson et le chinois Huawei, sont capables de fournir les équipements pour les futurs réseaux 5G, le futur système de télécommunications mobile.
Seuls trois équipementiers télécoms, les européens Nokia et Ericsson et le chinois Huawei, sont capables de fournir les équipements pour les futurs réseaux 5G, le futur système de télécommunications mobile. (Crédits : ALY SONG)

L'avenir du géant chinois des télécoms Huawei sur le marché de la 5G en France s'est sérieusement obscurci : l'agence nationale chargée de la sécurité informatique a fait savoir qu'elle restreindrait fortement les autorisations d'exploitation des opérateurs français partenaires du groupe.

Lire aussi : Mobile : les enchères 5G se dérouleront fin septembre

Huawei ne fera pas l'objet d'un "bannissement total" mais les opérateurs français l'utilisant vont, au mieux, recevoir des autorisations d'exploitation limitées à huit ans, selon l'Agence nationale de sécurité des systèmes informatiques (Anssi).

"Ce que je peux dire, c'est qu'il n'y aura pas un bannissement total. Les opérateurs qui n'utilisent pas Huawei, nous les incitons à ne pas y aller car c'est un peu le sens naturel des choses. Ceux qui l'utilisent déjà, nous délivrons des autorisations dont la durée varie entre trois et huit ans", a déclaré Guillaume Poupard, le directeur général de l'Anssi, chargée par le gouvernement d'instruire ce dossier, dans un entretien au journal Les Echos.

"Les décisions sont prêtes", a déclaré M. Poupard, confirmant une information de l'AFP mardi selon laquelle ces décisions n'attendent plus que d'être signées par l'exécutif.

Un cercle restreint de fournisseurs d'équipements pour la 5G

Seuls trois équipementiers télécoms, les européens Nokia et Ericsson et le chinois Huawei, sont capables de fournir les équipements pour les futurs réseaux 5G, le futur système de télécommunications mobile.

"Il y aura des refus", a indiqué M. Poupard aux Echos, excluant toutefois que ces refus concernent Nokia et Ericsson, et indiquant ainsi en creux que seul Huawei est concerné.

Ces décisions, qui vont bien au-delà du simple aspect industriel, interviennent sur fonds de tensions diplomatiques persistantes entre Washington et Pékin : les Etats-Unis font en effet pression sur leurs alliés pour qu'ils bannissent Huawei pour raison de sécurité, invoquant sa proximité avec le gouvernement chinois. L'entreprise a toujours démenti ces allégations.

Quoi qu'il en soit, l'enjeu est particulièrement important en France pour les opérateurs SFR (Altice) et Bouygues Telecom qui utilisent déjà des antennes Huawei dans leurs réseaux 4G et veulent s'appuyer dessus pour déployer la 5G.

Les opérateurs veulent des compensations

Alors que l'Arcep, le régulateur des télécoms, a fixé à septembre les enchères pour l'attribution des nouvelles fréquences et que les premières offres commerciales pourraient être disponibles en France avant la fin de l'année, les deux opérateurs s'inquiètent de devoir changer d'équipementier, ou même démonter leurs anciens équipements en cas d'incompatibilité.

Ils ont prévenu qu'ils demanderont une compensation si l'État barre la route au groupe chinois.

Lire aussi : 5G : la France ne veut pas se laisser influencer par les investissements Huawei

"Ce que l'on fait sur la 5G en France, c'est un compromis. Il faut développer la 5G dans des conditions économiques acceptables pour les opérateurs télécoms et aussi souveraines, qui nous permettent de ne pas être dépendants de tel ou tel équipement ou pays", a tenté de déminer le directeur de l'Anssi.

"Beaucoup d'antennes installées sont compatibles avec la 5G", a-t-il notamment réagi au sujet du caractère dissuasif de ces restrictions, compte tenu du montant à investir pour les opérateurs.

Une question de "risques" et de "souveraineté" (Poupard)

"Nous ne sommes pas dans du Huawei bashing, ni dans du racisme anti-chinois", a assuré Guillaume Poupard, le directeur général de l'Anssi.

Il ajoutait:

"Nous sommes dans une gestion de risques. Tous les équipementiers télécoms ne se valent pas. Je ne cite pas de nom, mais il est clair que l'on n'est pas dans les mêmes risques quand on parle d'équipements chinois ou américains. Nous sommes prudents vis-à-vis des équipementiers non-européens, évidemment, tout comme nous le serions aussi, par exemple, si tous les opérateurs avaient recours au même équipementier, même s'il était français - ce serait catastrophique."

Il concluait en ces termes:

"Voilà tout le sens de la discussion avec les opérateurs télécoms sur le choix de leurs équipementiers. Ce n'est pas un procès d'intention que l'on fait à telle entreprise ou tel pays. La question, c'est juste celle de la souveraineté."

L'autre inconnue: l'évaluation des effets sanitaires de la 5G

Une autre inconnue pèse sur le déploiement de cette nouvelle technologie: le 21 juin, la ministre de la transition écologique Élisabeth Borne a annoncé avoir demandé au Premier ministre d'attendre l'évaluation des effets sanitaires de la 5G par l'Anses - espérée pour la fin du premier trimestre 2021 - avant de la déployer.

Le Conseil d'État, saisi par des associations inquiètes des potentiels effets néfastes de la 5G sur la santé et l'environnement, doit se prononcer prochainement.

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Commentaires 8
à écrit le 07/07/2020 à 19:37
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boycott de tous les opérateurs qui utiliseront Huawei!!

à écrit le 06/07/2020 à 21:52
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Enfin si on compte sur Orange pour déployer la 5G on n’est pas rendus ou alors faut aussi un remaniement ministériel chez Orange.

à écrit le 06/07/2020 à 17:44
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Ca fait déjà pas mal de "souveraineté" qu'on a vendu, bradé, dilapidé. Il aurait fallu se poser les questions bien avant. Et quand on voit le chemin que prend la Chine, ça promet pour après demain... On pleurera même l'oncle Donald, si,si (pourtant, ...

à écrit le 06/07/2020 à 16:42
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La chine demande de l'équité face à ses concurrents à la France. C'est sur La Chine pays autoritaire nationaliste dictature qui cherche à imposer son idéologie anti-démocratique veut s'implanter afin de contrôler nos infrastructures communications et...

le 06/07/2020 à 21:19
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ne soyons pas dupe .... j'ajouterai: appropriation de terrains et matières premières en Afrique, élimination par des méthodes inadmissibles du peuple Ouïgours, intimidation armées des voisins en mer de chine pour s'approprier des iles, Port en Grèce,...

à écrit le 06/07/2020 à 11:45
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Jusqu'au bout, les fossoyeurs de notre civilisation privilégieront leur intérêt personnel au détriment de l'intérêt commun. La 5G est une science de laboratoire dont l'application publique ne présente pas d'intérêt au vu des coûts induits.

à écrit le 06/07/2020 à 11:17
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Quand on voit le sérieux apporté par Huawei pour mettre à jour les équipements grands publics, on peut légitimement se poser de très sérieuses questions sur le matériel professionnel : c'est simple, regardez les sites des CERT qui recensent les mises...

à écrit le 06/07/2020 à 10:03
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Une économie pourrie, tout comme le business de nos données, dont l'exploité ne profite jamais, s'ils étaient intelligents ils en profiteraient pour dénoncer cette gigantesque hypocrisie mais comme ils en profitent de plusieurs côtés à la fois ils ne...

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