Gaz : risque de « tensions sur le marché » dans l’Union européenne cet hiver, alerte l’AIE

L’Agence internationale de l’énergie (AIE) a déclaré, dans un rapport publié ce mardi, que l’Europe pourrait manquer de gaz ou devoir en acheter à prix d’or cet hiver en cas de grand froid, et surtout, à cause de sa dépendance toujours forte à la Russie.
Les Etat membres ont ainsi gonflé de 70% l'année dernière leurs achats de GNL.
Les Etat membres ont ainsi gonflé de 70% l'année dernière leurs achats de GNL. (Crédits : Reuters)

Le scénario d'un hiver cauchemardesque sur les prix du gaz pourrait-il de nouveau se produire cette année? C'est ce sur quoi l'Agence internationale de l'énergie (AIE) a mis en garde ce mardi dans un rapport sur les perspectives du marché du gaz à 2026.

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« Malgré le rééquilibrage progressif des marchés du gaz, les risques et les incertitudes pèsent sur les perspectives pour l'hiver 2023-24 », souligne l'AIE dans ce rapport. « Le risque de volatilité des prix, notamment en cas d'hiver froid, est donc préoccupant », ajoute-t-elle dans un communiqué.

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Les stockages de gaz de l'Union européenne ont beau être quasi-remplis à 96% à l'entrée dans la saison de chauffage, l'AIE se montre prudente sur la sécurité d'approvisionnement, qui a causé une flambée des prix au-dessus des 300 euros le mégawattheure et fait craindre une pénurie en 2022 après l'invasion de l'Ukraine.

Une Europe toujours trop dépendante du gaz russe

« Nous sommes en meilleure position » cette année, mais l'Europe est confrontée « à au moins deux défis majeurs », assurait déjà le 18 septembre, le chef de l'AIE, Fatih Birol. Dans son nouveau rapport, l'agence mentionne notamment la température : « Un hiver froid associé à une moindre disponibilité de gaz liquéfié » acheminé par navires pourrait être le premier facteur de risque. « Le risque de volatilité des prix, notamment en cas d'hiver froid, est donc préoccupant », ajoute-t-elle dans un communiqué.

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Faith Birol avait aussi ajouté que « deuxièmement, l'Europe reçoit encore du gaz de Russie, et ce gaz peut être coupé d'un jour à l'autre ».

Une menace de nouveau brandie dans le rapport qui affirme qu' « une nouvelle baisse des livraisons de gaz russe par canalisation pourraient raviver les tensions sur le marché, en particulier vers la fin de l'hiver 2023-24 ».

Depuis l'invasion de l'Ukraine en février 2022, Moscou a fortement réduit ses acheminements par gazoduc vers l'UE, poussant les Etats à réorganiser dans l'urgence leurs approvisionnements. Les Etat membres ont ainsi gonflé de 70% l'année dernière leurs achats de GNL, venu à plus de 40% des États-Unis mais aussi de Russie (17% des achats européens de janvier à juillet 2023). Quelques pays d'Europe de l'Est continuent aussi de recevoir un peu de gaz non liquéfié, russe, via l'Ukraine.

De nouvelles capacités de GNL très attendues

Le salue de l'Europe devrait passer par de nouvelles infrastructures dont la mise en service de nouvelles capacités de GNL attendues en 2025-2026 ce qui « devrait atténuer certaines des inquiétudes liées (...) à la sécurité d'approvisionnement que connaissent les marchés depuis que la Russie a commencé à retenir ses approvisionnements », a indiqué Keisuke Sadamori, directeur des marchés énergétiques et de la sécurité à l'AIE, cité dans le communiqué.

La France n'a d'ailleurs pas attendu cette date pour renforcer ses capacités de regazéification puisqu'elle a annoncé cet été, se doter d'un cinquième terminal d'importation de gaz naturel liquéfié au Havre, géré par TotalEnergies. Concrètement, l'infrastructure reposera sur deux navires FSRU (unité flottante de regazéification) de TotalEnergies « qui (permettront) d'injecter jusqu'à 5 milliards de m3 de gaz naturel (environ 60 % du gaz russe importé par la France en 2021) par an dans le réseau national ».

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Mais en dehors de ces initiatives pour augmenter la production et l'acheminement de gaz, pour l'AIE, la crise énergétique mondiale de 2022 « a marqué le début d'une nouvelle ère pour les marchés mondiaux du gaz, après une décennie de forte croissance entre 2011 et 2021 », qualifiée « d'Âge d'or du gaz ». L'Agence s'attend à l'avenir à un ralentissement de croissance de la demande mondiale de gaz portée à +1,6% par an entre 2022 et 2026, contre une moyenne annuelle de 2,5% entre 2017 et 2021. Ce ralentissement est dû à la baisse de la consommation dans les « marchés matures », en Asie-Pacifique, en Europe et en Amérique du Nord, où la demande gazière a atteint un pic en 2021 et devrait décliner de 1% par an jusqu'en 2026, grâce à « l'accélération du déploiement des énergies renouvelables et l'amélioration de l'efficacité énergétique ».

L'AIEA voit un fort essor du nucléaire dans les prochaines années

Si le gaz n'aura bientôt plus le vent en poupe selon l'AIE, le nucléaire devrait à l'inverse beaucoup se développer partout dans le monde a annonce l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA). Dans le scénario le plus favorable au nucléaire, l'AIEA prévoit le doublement au moins de la puissance installée, qui grimperait à 890 gigawatts en 2050 contre 369 GW actuellement. Elle misait auparavant sur 873 GW. « Le changement climatique joue un rôle clé, tout comme la sécurité de l'approvisionnement énergétique », a déclaré le directeur général de l'instance onusienne, Rafael Grossi. Devant « la situation géopolitique et les conflits militaires, de plus en plus de pays considèrent l'énergie nucléaire comme une source d'énergie résiliente et fiable », explique l'instance onusienne.

Mais pour le moment, cette énergie ne représente que 9% de l'électricité mondiale dans 31 pays, loin du charbon dominant, selon l'Agence internationale de l'énergie (AIE), basée à Paris. « Cette part était de 18% il y a 20 ans », a rappelé lundi dans la capitale autrichienne son directeur Fatih Birol. Il a regretté « l'erreur stratégique de nombreux gouvernements européens » qui ont décidé de « tourner le dos à l'atome », alors que « ce peut être une solution en plus du solaire et de l'éolien ».

(Avec AFP)

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Commentaires 8
à écrit le 10/10/2023 à 19:22
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Après le pétrole, l'électricité, voici le tour du gaz! On a évoqué le charbon et la tourbe. On verra, cet hiver, de quel bois je me chauffe!

à écrit le 10/10/2023 à 14:15
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Dire que l'AIE est "très conservatrice" est un euphémisme. Elle ne supporte rien moins qu'un bouquet de technologies émergentes comme les différentes batteries (embarquées et soutien au réseau), l'hydrogène ou les différentes approches de gestion d'i...

à écrit le 10/10/2023 à 10:05
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Et en parallèle, question des énergies, dans son rapport annuel World Oil Outlook, l'OPEP a déclaré que le monde a besoin de 14 000 milliards de $ d’investissements cumulés dans le secteur pétrolier d’ici 2045 pour garantir la stabilité du marché et ...

le 10/10/2023 à 12:16
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@Raymond Qui va investir des centaines de milliards dans un secteur condamné ? Personne. Il y a déjà plusieurs années que les investissements dans le raffinage sont nuls.

le 10/10/2023 à 18:50
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@Valbel89. Les banques, les acteurs privés, les fonds d'investissement, les fonds souverain et même certaines banques centrales, par exemple, comme la BNS (Banque nationale suisse) qui s'est à nouveau fait épinglée cette année pour ses investissement...

à écrit le 10/10/2023 à 9:37
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"Moscou a fortement réduit ses acheminements par gazoduc vers l'UE" Logique ,puisque l'UE n'en voulait plus.

le 11/10/2023 à 0:31
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L'UE n'en voulait plus mais a tout de même continué d'acheter du gaz russe indirectement auprès des pays non alignés clients de la Russie (plus cher d'ailleurs). En outre, les Etats-Unis ont aussi réduit les approvisionnements de l'Europe et de l'Al...

à écrit le 10/10/2023 à 9:13
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Y'aura aucune pénurie AIE nous prend pour des jambons !!!!!!!

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