Les Rendez-vous de septembre : les réassureurs entament les négociations avec les assureurs en position de force

Après de violentes hausses de prix de la réassurance l’an dernier, le traditionnel rendez-vous des assureurs et réassureurs à Monaco, qui ouvre ses portes ce dimanche, devraient se dérouler dans un climat plus serein pour la prochaine campagne de renouvellement des contrats au 1er janvier. Il n’y aura sans doute pas de nouvelles hausses tarifaires significatives mais il ne faut pas s’attendre non plus à une baisse des prix de la réassurance pour la saison 2024.
Chaque année, en septembre, les réassureurs et les assureurs commencent à discuter des conditions tarifaires pour la prochaine campagne de renouvellement
Chaque année, en septembre, les réassureurs et les assureurs commencent à discuter des conditions tarifaires pour la prochaine campagne de renouvellement (Crédits : DR)

« Une bonne grippe nous assomme pendant cinq ou six jours et il faut ensuite plusieurs jours pour se rétablir complètement. Et bien là, dans la réassurance, nous sommes plutôt au premier jour où les choses vont un peu mieux », résume Nicolas Boudias, délégué général de l'Association des professionnels de la réassurance en France (Apref), pour dresser l'état des lieux de la réassurance, à quelques heures de l'ouverture, dimanche à Monaco, des traditionnels Rendez-vous de Septembre qui rassemble, chaque année, assureurs, réassureurs et courtiers pour commencer à discuter des tarifs de la prochaine campagne de renouvellement des contrats de réassurance pour 2024.

L'ambiance devrait être moins tendue que l'an dernier lorsque les assureurs ont dû faire face à une forte hausse de prix de la réassurance (activité qui consiste à assurer une partie des risques des assureurs) et les réassureurs à une forte baisse des capacités (capitaux pour couvrir des risques). « Les discussions vont être plus sereines car un certain nombre d'ajustements sur les prix ont été faits et que tous les acteurs commencent à prendre la vraie mesure de la sinistralité climatique », avance Bertrand Labilloy, vice-président de l'Apref et directeur général de CCR Ré.

Marché normal

Les assureurs et les réassureurs vont avoir « des choses à se dire », confirme auprès de l'AFP, Jean-Philippe Dogneton, directeur général de Macif, qui se rappelle que les assureurs sont « revenus groggy » de Monaco l'an dernier. Les discussions « resteront techniques », s'amuse un réassureur sous forme de litote pour indiquer clairement que les assureurs ne doivent pas espérer une baisse des tarifs lors de la prochaine campagne de renouvellement au 1er janvier. Pour au moins deux raisons.

La première, selon l'Apref, les ajustements de prix n'ont pas eu lieu partout, et en particulier en Europe. Ensuite, parce que le niveau de rentabilité technique, même s'il est sensiblement redressé, « n'est toujours pas au niveau attendu par les investisseurs », explique Bertrand Labilloy. En clair, les investisseurs, ceux qui apportent les capitaux aux réassureurs, ne sont pas tous revenus sur le marché.

En 2022, il manquait quelque 100 milliards de dollars, avec 575 milliards de dollars de capitaux disponibles (dont 93 milliards de capitaux dits alternatifs), contre 675 milliards en 2021. En 2023, il est peu probable de retrouver le niveau de 2021, voire de 2020, alors que la demande mondiale de protection ne fait qu'augmenter. D'autant qu'avec la hausse des taux, les investisseurs ont désormais un plus grand choix d'actifs à fort rendement, notamment sur les marchés de crédit. Beaucoup de capitaux se sont détournés vers la réassurance faute de placement à rendement attractif pendant de longues années.

Toutefois, réassureurs et assureurs estiment que cette année ils retrouveront un marché « normal » sans risque de voir, comme l'an dernier, des capacités promises disparaître soudainement au 31 décembre.

Le bon prix

Car, après une annus horribilis 2022, notamment en France avec un coût des sinistres climatiques de 10,6 milliards d'euros, la situation des réassureurs se redresse sensiblement. Le ratio combiné des 20 plus grands réassureurs mondiaux (sinistres sur primes) est de 96%, un bon niveau.

Un retournement de tendance après des années de vaches maigres pour la réassurance, salué par l'agence de notation de crédit Standard & Poor's (S&P)qui vient de changer sa perspective sur le secteur au niveau mondial de « négative » à « neutre ». La décision n'est pas anodine pour un secteur ultra-financiarisé où la notation est un élément clé de confiance pour les investisseurs.

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« Nous sommes dans une inversion de tendance », relève Marc-Philippe Juilliard, directeur assurance chez S&P. Explications : « il y a une amélioration générale des conditions de souscription à la fois dans la réassurance non vie et vie et l'amélioration des taux d'intérêt est un élément favorable pour le rendement des portefeuilles des réassureurs ». Toutefois, selon l'expert, le secteur continue d'être traversé par des vents contraires, comme le ralentissement économique, les pressions inflationnistes et le niveau toujours élevé des catastrophes naturelles.

« Je commence à entendre des assureurs ou des intermédiaires qui me disent que les résultats des réassureurs ont été très bons au premier semestre. Mais il ne faut pas oublier qu'ils ont été très mauvais pendant les six années précédentes. Alors, je n'ai pas après six mois de bons résultats que je vais commencer à desserrer les boulons lors des prochains renouvèlements », nous confie un réassureur. Ce que résume Nicolas Boudias par un « arrêtez de râler et payez le bon prix ! ». Monaco restera Monaco.

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