En cas de difficultés de trésorerie liées à la crise du coronavirus, une entreprise peut se tourner vers sa banque pour solliciter un prêt garanti par l'État (PGE), ces prêts distribués depuis le 25 mars dans tous les réseaux bancaires et dont le risque de non remboursement est porté à 90% par l'État. En principe, depuis le 8 mai dernier, les plateformes de prêt en ligne, ayant le statut d'intermédiaire en financement participatif, peuvent aussi proposer ce nouveau produit bancaire. Mais jusqu'à cette semaine, les modalités techniques n'avaient pas encore été arrêtées. C'est maintenant chose faite et quelques acteurs du crowdfunding, comme October, PretUp et Unilend, s'apprêtent à instruire leurs premiers dossiers.
Un taux à 2%
Quelles différences avec un PGE obtenu auprès d'une banque ? À première vue aucune : il s'agit d'un prêt de trésorerie d'une durée d'un an, renouvelable jusqu'à cinq ans, et bénéficiant de la même garantie de l'État qu'un PGE distribué par les réseaux bancaires. La seule variation concerne le prix de ce prêt. Alors que les banques proposent ce dernier à prix coûtant, c'est-à-dire à taux zéro, les plateformes, ne bénéficiant pas des mêmes conditions de financement, le proposent à un taux de 2% la première année. Celui-ci augmente par la suite.
Très concrètement, cela signifie que les investisseurs particuliers qui prêteront de l'argent à une entreprise dans le cadre d'un PGE via ces plateformes en ligne bénéficieront d'une rémunération à hauteur de 2% du montant du prêt. C'est bien moins que les taux auxquels ils accèdent généralement sur ce type de plateforme, qui varient entre 2,5% et 9% selon le niveau de risque de l'opération. Toutefois, en échange de cette rémunération plus faible, ils bénéficient de la fameuse garantie de l'État à hauteur de 90%.
Aider les entreprises et retenir les investisseurs
De leurs côtés, les plateformes de prêt continueront de prélever des frais de dossier mais ces derniers seront limités à hauteur de 1.000 euros sur chaque prêt. "Concrètement, nous allons perdre de l'argent car la gestion du prêt sur la totalité de sa durée de vie nous coûte bien plus que 1.000 euros", explique Olivier Goy, fondateur et directeur général de la plateforme October. Fabien Michel, directeur général de PretUp et Unilend, dresse le même constat : "Nous n'allons pas gagner d'argent sur ce produit", assure-t-il.
Quel intérêt alors de distribuer le PGE ? "Nous pensons que nous avons un rôle à jouer. Lorsqu'un match aussi important se joue, nous n'avons pas envie d'être sur le banc de touche. Notre mission c'est d'aider les entrepreneurs", répond Olivier Goy. Au-delà de l'effort de solidarité nationale, les acteurs du financement participatif entendent, comme les banques, épauler leurs entreprises clientes pour éviter leur faillite et, in fine, les défauts de paiement. L'autre grand enjeu est de retenir sur leurs plateformes les investisseurs particuliers, beaucoup plus frileux en cette période de grandes incertitudes. "Cela nous permettra de maintenir une activité au cours des prochains mois", témoigne Fabien Michel.
Déjà des centaines de demandes
Quid des entreprises, pour qui ces prêts seront moins avantageux qu'un PGE classique ? "La probabilité qu'une banque accorde un PGE à une entreprise qui n'est pas déjà cliente chez elle est très faible. Nous pensons pouvoir apporter un complément utile", répond Olivier Goy, qui indique avoir déjà reçu plusieurs centaines de demandes.
Présente dans cinq pays européens, October distribue d'ores et déjà des prêts garantis par l'État en Italie et s'apprête à déployer ce dispositif aux Pays-Bas. De son côté, Fabien Michel espère collecter entre un et deux millions d'euros sur ce type de prêt d'ici à la fin de l'année.
Au total, une petite quinzaine de plateformes de crowdfunding, ayant le statut d'intermédiaire en financement participatif, ont manifesté leur intérêt pour distribuer ce prêt de trésorerie. Parmi elles, Credit.fr, Les Entreprêteurs, Wesharebonds et Winefunding pour n'en citer que quelques unes. Leur participation au dispositif, dont la valeur totale a été fixée à hauteur de 300 milliards d'euros par le gouvernement, devrait toutefois rester modeste au regard de leur activité. En 2019, les plateformes de prêt aux entreprises ont collecté un montant total de 358 millions d'euros.
Sujets les + commentés