Comment en dix ans le pétrole a métamorphosé le transport aérien

Les cours du pétrole ont continué de reculer ce mardi. Entre juin dernier et aujourd'hui, le prix du baril de Brent est passé de 115 dollars à près de 70 dollars. Jusqu'où descendra-t-il ? Combien de temps durera l'accalmie ? Pour l'heure, La Tribune revient sur la transformation du transport aérien qu'a engendrée la hausse des cours du pétrole depuis dix ans.
Fabrice Gliszczynski
Cette hausse de l'or noir a permis d'accélérer, à un rythme record, certaines tendances qui se dessinaient depuis des années mais qui tardaient à se concrétiser, comme la consolidation du secteur.

Accélération des fusions, recours accru à la technologie et renouvellement des flottes sont les trois points retenus pour expliquer comment le secteur du transport aérien, qui peinait à atteindre l'équilibre en 2003 avec un prix du baril à 28 dollars, est bénéficiaire dix ans plus tard avec un baril à 109 dollars en moyenne sur l'année.

Consolidation accélérée du transport aérien

Cette hausse de l'or noir a permis d'accélérer, à un rythme record, certaines tendances qui se dessinaient depuis des années mais qui tardaient à se concrétiser, comme la consolidation du secteur. La cherté du baril a été un puissant facteur de consolidation du transport aérien. Si quatre grands groupes américains (United, Delta, American, Southwest) se partagent aujourd'hui l'essentiel du marché américain, si trois grands groupes européens dominent le ciel européen (Lufthansa, Air France-KLM, IAG), c'est au pétrole qu'il le doit. Il a contraint les acteurs les plus faibles à accepter l'idée de se placer sous l'aile de plus puissants.

Aux États-Unis, la cherté du baril a provoqué la disparition de plusieurs petits acteurs a été le déclencheur de la fusion Delta-Northwest au printemps 2008, au moment où son cours, qui s'envolait depuis 2007, fonçait vers le fameux pic de 147 dollars atteint en juillet 2008 (avant de retomber à plus de 40 dollars en décembre).

En devenant la première compagnie américaine et mondiale, Delta a contraint ses rivaux à bouger. Deux ans plus tard, en 2010, Southwest acheta Air Tran, et United Airlines fusionna avec Continental Airlines. Cette vague de fusions s'est achevée en 2012 avec le rapprochement d'American et de US Airways. Cette concentration a permis de mettre fin à des surcapacités chroniques, à l'origine de guerres tarifaires sans merci. Aujourd'hui, les compagnies américaines sont les plus rentables de la planète.

En Europe aussi, l'envolée du prix du baril a accéléré la consolidation du secteur. Si Air France et KLM ont ouvert le bal des fusions en 2004, et entraîné dans leur sillage Lufthansa qui a acheté Swiss en 2005, c'est au cours l'année 2008 (où le baril a atteint son paroxysme en juillet) que le processus s'est emballé avec la mise en vente d'Austrian Airlines et de Brussels Airlines, toutes deux achetées en 2009 par Lufthansa (qui a également repris BMI) et l'annonce du mariage de raison entre British Airways et Iberia (juillet 2008). C'est également en 2007/2008 que le gouvernement italien a mis en vente  Alitalia, une opération qui échoua et se solda par la faillite de la compagnie italienne, avant sa reprise par des investisseurs transalpins (fin 2008) avec la participation d'Air France-KLM (début 2009)

Développement tous azimuts des e-services

Au-delà de cette consolidation à laquelle il faudrait inclure le renforcement des alliances commerciales, c'est toute la façon d'exercer le métier qui a été bouleversée par la cherté du prix du baril. Face à un poste de coûts qui représente aujourd'hui 30% de leurs coûts contre 14% en 2003, les transporteurs ont taillé dans le vif dans les autres coûts (en particulier les effectifs) et ont utilisé les nouvelles technologies pour générer de grosses économies et augmenter la productivité du personnel. Au cours de la dernière décennie 2001-2011), elle a bondi de 63% !, selon l'association internationale du transport aérien (Iata).

Sous l'impulsion de cette puissante association, le transport aérien a lancé dès 2004 de vastes programmes destinés à simplifier la vie des passagers tout en réduisant les coûts des compagnies. Surfant sur les nouvelles technologies, les techniques de réservation des billets (dont la version papier a disparu en 2007), d'enregistrement des passagers et d'embarquement ont été modifiés. Enregistrement à domicile ou dans les bornes libre-services, carte d'embarquement sur son téléphone, ...aujourd'hui les e-services sont fortement utilisés par les voyageurs. Le profil des aéroports s'est modifié avec notamment la multiplication des bornes libre services dans les zones d'enregistrement...

Au total, si l'on ajoute les discussions avec les Gouvernements pour redessiner certaines routes aériennes et permettre des économies de carburant,  les mesures de l'Iata ont permis d'économiser 54 milliards de dollars entre 2001 et 2011. Et bien plus avec leur extension aujourd'hui. L'Iata travaille sur la généralisation d'une palette de mesures pour accélérer les étapes du parcours aéroportuaire.

Des avions moins gourmands en kérosène

Enfin, le bond de la facture carburant a poussé les compagnies aériennes à renouveler rapidement leur flotte. Combiné aux besoins de croissance, le renouvellement de flotte a engendré depuis 2005, des niveaux de commandes d'avions jamais observés dans le passé.

La hausse du prix du carburant, par ailleurs concomitante au durcissement des règles environnementales, a poussé les constructeurs à aller toujours plus loin en termes d'économie de carburant. Après le B787 et l'A380 en 2004 et 2005, Airbus et Boeing ont tour à tour amélioré le B747, lancé l'A350, remotorisé l'A320 (Neo), le B737 (Max), l'A330 Neo ainsi qu'un nouveau dérivé du B777.

Fabrice Gliszczynski

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