Mieux vaut tard que jamais... Le constructeur franco-italien a publié lundi ses résultats 2019, qui ne sont pas à la hauteur attendue. L'an dernier, l'avionneur, qui fabrique des turbopropulseurs pour le transport régional, n'a livré que 68 appareils (contre 76 avions en 2018 et 78 en 2017), dont deux ATR72 MP remis à la police financière italienne. En dépit d'un différentiel de huit ATR livrés en moins, le chiffre d'affaires est toutefois resté stable en 2019, à 1,43 milliard d'euros (contre 1,49 milliard en 2018). En revanche, ses profits se sont effondrés de près de 50%, à 98 millions d'euros l'année dernière (contre 193 millions en 2018), selon des chiffres communiqués par Leonardo.
Les prises de commandes 2019 d'ATR ont été quant à elles bien meilleures qu'en 2018, si l'on en croit les chiffres publiés par l'avionneur installé à Toulouse (79 appareils, contre 52 en 2018). Mais ses deux actionnaires annoncent un niveau de commandes vraiment très différent : 48 commandes selon Airbus, 65 (24 ATR72 et 41 ATR42) selon Leonardo. Fin 2019, ATR, qui a livré 1.580 appareils depuis sa création, possédait un carnet de commandes de 185 appareils (contre 205 en 2018), selon Airbus.
ATR, un leader solide de l'aviation régionale
Selon Leonardo, les ventes d'avions régionaux se sont élevées en 2019 à 160 appareils, dont 86 turbopropulseurs. Soit un marché une valeur d'environ 6 milliards d'euros. Fin 2019, le carnet de commandes d'avions régionaux s'élevait à 1.108 unités (877 jets et 231 turbopropulseurs). Soit plus de 5 ans de production aux taux actuels. ATR reste bien sûr le leader du segment des turbopropulseurs, le programme concurrent le Q400 vendu par Bombardier à De Havilland totalisant 11 commandes et 15 livraisons. Son objectif est de renforcer davantage sa position de leadership grâce à l'amélioration continue du support.
Il devrait le rester. ATR a achevé le développement de la version cargo 72-600F de l'ATR 72. Les premières livraisons devrait intervenir en 2020. Par ailleurs, le développement de la version ATR 42-600 STOL (pour décollages et atterrissages courts) a commencé. L'objectif est de donner à l'avion une plus grande capacité de décollage et d'atterrissage sur des pistes courtes (800 mètres) avec 40 passagers à bord dans des conditions de vol standard. Ce qui va élargir son marché. D'autant que l'ATR 42 reste aujourd'hui le seul avion de 40 à 50 places en production pour remplacer les vieux SAAB 340, les Dash 7, etc... ATR a identifié un marché de 650 appareils à renouveler pour lequel l'ATR 42 STOL serait pertinent. Le constructeur vise la moitié de ce marché. Sa mise en service est prévue pour 2022.
Et 2020 ?
L'industrie aéronautique est confrontée à un défi sans précédent, qui va durer bien au-delà de l'année en cours. Pour autant, ATR pourrait peut-être mieux s'en sortir que Boeing et Airbus. "Il est trop tôt pour évaluer l'impact sur notre carnet de commandes, mais nous avons eu aucune annulation à ce jour", a assuré ATR, qui a déclaré n'avoir "jamais fermé" ses sites de fabrication. À l'heure actuelle, a-t-il insisté, "40% de la flotte ATR en service dans le monde continuent de voler". D'autant que le constructeur a su se montrer réactif en développant une solution qui permet aux compagnies aériennes de convertir rapidement et temporairement leurs appareils en avion cargo léger pour des opérations potentielles de ravitaillement de produits essentiels dans les zones les plus reculées.
Dans ce contexte inédit, ATR "estime que l'aviation régionale reprendra ses activités plus rapidement que le trafic aérien international, car il aura un grand rôle à jouer dans la reprise de l'économie mondiale".
Pour autant, ATR anticipe déjà une baisse des livraisons à hauteur de 34 appareils en 2020 et 40 en 2021, contre une prévision initiale de 140 appareils sur deux ans (2020 et 2021). Soit une baisse de l'ordre de 47%. L'avionneur franco-italien a traversé d'énormes turbulences à la fin des années 90 et au début des années 2000. Donné pour mort, il a finalement rebondi grâce à un baril de pétrole cher. Va-t-il à nouveau montrer sa formidable résilience face à la crise très violente qui s'abat sur l'industrie aéronautique ?
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