« Deux ans d’entraînement, c’est très court » (Sophie Adenot, spationaute)

ENTRETIEN - À 41 ans, la pilote d’hélicoptère vient d’être désignée pour rejoindre la Station spatiale internationale en 2026. Elle nous a répondu depuis le centre de la Nasa de Houston, où elle effectue sa préparation.
(Crédits : © LTD / Rolf Vennenbernd/DPA/ABACA)

Vers l'infini et au-delà. Mercredi dernier, Sophie Adenot a été choisie par l'Agence spatiale européenne (ESA) pour rejoindre la Station spatiale internationale (ISS) en 2026. Une expérience extraordinaire de six mois pour la spationaute de 41 ans, qui va devenir la deuxième femme française à regarder notre Terre à 400 kilomètres de distance, presque trente ans après Claudie Haigneré. Le 23 novembre 2022, la Nivernaise originaire de Cosne-Cours-sur-Loire avait déjà franchi une première étape en devenant l'une des 17 astronautes nommés par l'ESA parmi 22 523 candidats. L'aboutissement de toute une vie pour ce colonel de l'armée de l'air et de l'espace, pilote d'hélicoptère.

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Depuis le centre de la Nasa à Houston où elle s'entraîne, Sophie Adenot nous répond entre une séance de piscine destinée à la préparation aux sorties extravéhiculaires et un rendez-vous pour trouver le scaphandre à sa taille et des gants sur mesure.

LA TRIBUNE DIMANCHE - Votre rêve d'enfant est enfin réalisé...

SOPHIE ADENOT - Comme quoi il faut toujours croire en ses rêves. Cette aventure est une joie intense, mais aussi une sacrée responsabilité. Deux ans d'entraînement, c'est très court. Même s'il est progressif, il nécessite une concentration permanente. Par exemple, dans la station, il y a à peu près 15 000 procédures. Ça ne veut pas dire qu'il faut les mémoriser, mais il faut comprendre suffisamment tout ce qui s'y passe pour pouvoir les mettre en œuvre. Surtout qu'il n'y a pas de mécanos à bord pour la maintenance ! Il faut comprendre autant les systèmes de génération de puissance, électrique et hydraulique, que le contrôle de l'atmosphère. Ça fait quand même beaucoup d'informations à enregistrer. Mais je vous rassure, j'ai une énergie de dingue !

Quel est le plus gros défi à relever une fois à bord de l'ISS ?

Les sorties extravéhiculaires exigent une très grande force physique et physiologique. Il faut savoir qu'une sortie, c'est environ six ou sept heures dans le vide spatial. C'est comme faire du gainage ou un marathon en continu ! S'ajoutent aussi le poids du scaphandre et les gants qui limitent les manipulations. Alors, oui, les sorties extravéhiculaires font partie des plus gros défis.

Il faut savoir qu'une sortie, c'est environ six ou sept heures dans le vide spatial

Pendant ces deux années, aurez-vous des interdits ?

Ce ne sont pas vraiment des interdits. Je dois surtout être disciplinée pour être au top de ma forme. Avec des rituels quotidiens physiques, sportifs, ainsi qu'une bonne nutrition et un bon sommeil.

Quelles sont vos relations avec Thomas Pesquet ?

Thomas m'a toujours épaulée, accompagnée jusqu'à la décision finale de l'ESA. Il est d'un enthousiasme incroyable et le meilleur pour me donner des conseils. Si les instructeurs sont les plus expérimentés, les plus passionnés pour préparer les astronautes à une mission spatiale, aucun d'entre eux n'est allé dans l'espace. Thomas me fait partager son expérience, pour que j'appréhende mieux le décollage de la fusée, et aussi des astuces. « Quand tu arrives dans l'espace, je te conseille de mettre la main comme ça pour piloter le bras robotique, parce que, en apesanteur, ça marche différemment. » Des conversations complètement folles...

Que ressentirez-vous dans l'ISS ?

Se préparer à aller dans l'espace fait partie de ce genre d'expériences pour lesquelles la théorie et la préparation mentale sont impératives. Mais la réalité, elle, est unique. Alors je préfère garder la porte ouverte aux émotions qui vont survenir sans schéma de pensée, d'anticipation. J'ai échangé récemment avec mon collègue astronaute suédois Marcus [Wandt], qui vient de rentrer de son aventure spatiale. Il me racontait que chaque fois qu'il allait dans la coupole il ressentait une émotion infinie de voir la Terre si belle, si fragile depuis là-haut.

Vous allez devenir un modèle pour les jeunes, et une héroïne pour tous les Français. Qu'en pense votre petit garçon de 10 ans ?

Il m'a tout simplement dit avec un énorme sourire : « Bien joué, maman ! » Nos relations ont toujours été très simples. Je suis heureuse quand il réussit ce qu'il entreprend, et inversement.

Vous êtes également professeur de yoga certifié. Vous donnerez des cours à vos compagnons de station ?

Sûrement ! Mais le yoga n'est pas le seul sport qui m'anime.

Savez-vous déjà ce que vous allez emporter comme objets personnels ?

Je suis limitée à une boîte à chaussures d'équipement personnel, soit 1,5 kg. Je peux vous assurer que cette boîte sera pleine. Mais de quoi ? Je ne le sais pas encore.

Vous préparez-vous également pour le programme Artemis, dont l'objectif est la Lune ?

Pour l'instant, ce n'est pas du tout l'objet de ma mission et de mon entraînement. Je suis concentrée à 100% sur l'ISS.

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