Exxelia : comment l'Etat a protégé ses intérêts stratégiques

L’État a converti l'action qu'il détenait dans le capital Exxelia en une action de préférence pour s'assurer sur le long terme de la préservation de ses intérêts fondamentaux. Cette ETI avait été rachetée en janvier dernier par la société américaine Heico.
Michel Cabirol
En janvier 2023, Exxelia, une ETI spécialisée dans la production de composants électroniques passifs complexes, essentiels pour des équipements militaires tels que les sous-marins nucléaires d'attaque Barracuda, les Rafale ou encore pour les lanceurs Ariane 5 et 6, a été rachetée par Heico.
En janvier 2023, Exxelia, une ETI spécialisée dans la production de composants électroniques passifs complexes, essentiels pour des équipements militaires tels que les sous-marins nucléaires d'attaque Barracuda, les Rafale ou encore pour les lanceurs Ariane 5 et 6, a été rachetée par Heico. (Crédits : DR)

C'est le dénouement d'un dossier sensible qui a longtemps oscillé entre deux concepts, celui de la souveraineté et celui de l'attractivité de la France. L'État a transformé l'action qu'il détient au capital de la société Exxelia International, qui a été achetée par le groupe familial américain Heico, en action de préférence (ou golden share). C'était annoncé depuis ce printemps, c'est fait. « Le 3 août 2023, l'État a décidé de convertir en action de préférence l'action qu'il détenait depuis le 11 avril dernier au capital de la société Exxelia International, concluant ainsi le processus débuté au début de cette année pour assurer la protection des intérêts de l'État à la suite de l'acquisition de cette société française par le groupe américain Heico », a indiqué le ministère de l'Économie dans un communiqué publié mardi. Fin mai, Sébastien Lecornu avait indiqué à l'Assemblée nationale que les conditions exigées par le ministère des armées au sujet de la gouvernance d'Exxelia avait « été remplies ».

Des acteurs français timorés

En janvier 2023, Exxelia, une ETI spécialisée dans la production de composants électroniques passifs complexes, essentiels pour des équipements militaires tels que les sous-marins nucléaires d'attaque Barracuda, les Rafale ou encore pour les lanceurs Ariane 5 et 6, a été rachetée par Heico. Ses condensateurs, résistances, capteurs de positions et autres joints tournants sont utilisés dans de nombreuses industries de haute technologie dans le domaine de la défense, l'aéronautique et le spatial.

Après avoir échoué à céder Exxelia au fonds HLD en 2020 en raison du Covid-19, IK Partners a mis à nouveau en vente en 2022 cette belle ETI, que la société britannique de capital-investissement détenait depuis décembre 2014. En juillet, Heico, avait révélé son intention d'acquérir cette entreprise française, rachetée finalement en janvier après l'autorisation de Bercy. Malgré des sollicitations actives, le ministère des Armées n'a pas réussi à motiver une société française pour faire une offre au vu de la valeur attendue d'Exxelia.

Des garanties pour la souveraineté

Soumise au contrôle des investissements étrangers en France, l'acquisition d'Exxelia International par Heico a finalement reçu l'accord du ministre de l'Économie Bruno Le Maire après avoir obtenu « des garanties sur l'évolution des activités au bénéfice des industries françaises », a rappelé le ministère. En complément des engagements pris au titre du contrôle des investissements étrangers en France (IEF), la présence au capital et les droits associés à son action de préférence définis en concertation avec le ministère des Armées, permettront à l'État d'assurer « sur le long terme la cohérence des vues stratégiques de son actionnaire principal avec la préservation des savoir-faire et activités d'Exxelia au bénéfice de la défense nationale et plus largement de la souveraineté française ».

« Cette opération illustre l'agilité dont l'État sait faire preuve afin de permettre le plein développement des activités d'excellence réalisées sur le sol français, avec l'aide lorsque cela s'avère pertinent de partenaires étrangers de confiance, tout en conservant les moyens d'assurer sur le long terme la préservation de ses intérêts fondamentaux », a précisé le ministère

En revanche, l'État français s'était opposé à la vente de Photonis à l'américain Teledyne fin 2020 et de Segault à l'américain Flowserve en mai 2023. Pour le traitement de ces dossiers sensibles, le secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale (SGDSN) conduit un travail interministériel, notamment avec le service de l'information stratégique et de la sécurité économiques (Sisse) du ministère de l'Économie et du Service des affaires industrielles et de l'intelligence économique (S2IE) de la Direction générale de l'armement (DGA) avec pour mission de préserver la BITD (Base industrielle et technologique de défense) française.

En 2022, l'État s'est opposé à 194 projets d'investissements étrangers dans une série de secteurs considérés comme « sensibles » comme la défense et la sécurité. Bercy en a toutefois autorisé 131, dont plus de la moitié avec des conditions « de nature à garantir la préservation des intérêts nationaux ».

Michel Cabirol

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaire 1
à écrit le 30/08/2023 à 8:09
Signaler
certes, l'etat stratege veut des bons investissements, mais sans rien depenser de son cote, avec une golden share qui ne coute rien, mais sauve ses interets....les socialistes de mitterand etaient un peu plus honnetes intellectuellement avec les cert...

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.