
Décidément, l'Australie n'a vraiment aucune considération pour la France en lui portant un nouveau coup de poignard ainsi d'ailleurs qu'à NHIndustries (NHI), le consortium formé par Airbus Helicopters, Leonardo et Fokker Technologies et maître d'oeuvre du programme NH90. Après le retrait prématuré de l'hélicoptère de combat Tigre, puis Aukus (sous-marins de Naval Group), le gouvernement australien a décidé de retirer l'hélicoptère tactique MR-90 (version australienne du NH90) de la flotte de ses forces armées plus tôt que prévu. Ainsi, « les hélicoptères MRH-90 Taipan des forces de défense australiennes ne reprendront pas leurs opérations de vol avant la date de retrait prévue de décembre 2024 », a annoncé vendredi le ministère de la Défense australien.
À partir de 2025, les nouveaux hélicoptères AH-64E Apache seront mis en service pour l'armée australienne. Et dire que l'Australie voulait renouer avec la France en restaurant la confiance entre les deux pays. « Nous posons les bases d'une nouvelle relation avec l'Australie, pas forcément celle que nous avions pu envisager un temps, mais forcément amicale, puisque beaucoup nous rapproche », avait expliqué fin août la ministre des Affaires étrangères, Catherine Colonna à l'occasion de la XXIXe Conférence des Ambassadrices et des Ambassadeurs. C'est raté pour la confiance...
Une nouvelle décision brutale
Pourquoi cette décision brutale de l'Australie et sans préavis ? Elle est en lien avec l'accident du 28 juillet au cours duquel un MRH-90 Taipan a heurté les eaux près de l'île Lindeman, dans le Queensland, lors de l'exercice Talisman Sabre. « L'annonce faite aujourd'hui (vendredi 29 septembre, ndlr) ne présume en rien de l'issue de l'enquête sur l'incident tragique du 28 juillet », a pourtant souligné le ministère de la Défense. Mais le gouvernement a estimé que « les enquêtes en cours se poursuivront probablement jusqu'en 2024 ». Le ministère de la Défense ne souhaite pas faire voler cette plateforme « tant que les enquêtes sur cet incident ne seraient pas terminées ». Résultat, environ 400 personnes se retrouvent sans travail... L'Australie doit mettre un plan pour préserver « la main-d'œuvre du MRH-90 Taipan hautement qualifiée ». « La défense travaille avec des partenaires industriels pour s'assurer qu'elle bénéficie d'un soutien pendant la période de transition des capacités », a précisé le ministère.
NHI, qui a exprimé dans un communiqué vendredi « sa déception » après la décision de l'Australie, a pourtant précisé qu'elle n'avait « pas identifié d'informations dans l'analyse initiale des données de vol qui se rapporte à une défaillance, un dysfonctionnement ou un défaut lié à la conception de l'appareil ». L'enregistreur des données de vol (VFDR), également connu sous le nom de boîte noire, avait été récupéré le 7 août. Résultat, NHI n'a pas recommandé de mesures supplémentaires à appliquer à la flotte de NH90 en exploitation. Mauvaise foi australienne ? Le gouvernement australien souhaite se « concentrer sur l'introduction en service de la nouvelle flotte d'hélicoptères UH-60M Black Hawk ». Les trois premiers Black Hawk sont arrivés en Australie et ont commencé à voler en septembre, les autres appareils continuant à être livrés.
« Les premiers des 40 Black Hawks qui remplaceront le MRH-90 sont arrivés et volent déjà en Australie. Nous nous attachons à ce qu'ils soient mis en service le plus rapidement possible », a promis le premier ministre adjoint australien et ministre de la Défense, Richard Marles.
Plus de 500 NH90 vendus dans le monde
Dans une interview accordée à La Tribune en juin dernier, le PDG d'Airbus Helicopters Bruno Even anticipait déjà une décision « regrettable » de l'Australie sur le NH90, dont les difficultés en matière de disponibilité s'amélioraient. La décision de Richard Marles intervient « à un moment où l'ensemble des actions menées sur la flotte NH90 portaient leurs fruits, en particulier en termes de support. En Australie, nous avions atteint ces derniers mois plus de 60 % de disponibilité, en ligne avec l'engagement que nous avions pris. En termes de compétitivité et de coûts, la solution qui est prise ne va pas apporter de gain », avait-il expliqué.
Dans le cadre de ce retrait, NHI présentera une proposition à l'Australie pour soutenir le retrait progressif de la flotte de MRH90. « Cela permettra de constituer un stock de pièces détachées à l'usage des autres opérateurs, qui continuent à faire voler l'appareil avec succès dans le monde entier », a expliqué NHI. L'industriel souhaite racheter à l'Australie les stock de pièces détachées notamment. Cela tombe bien : plus de 500 hélicoptères NH90, qui est le plus grand programme d'hélicoptères militaires en Europe, ont été livrés dans le monde entier, selon NHI. Sur terre et en mer, la flotte NH90 a accumulé plus de 380.000 heures de vol.
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