SCAF (phase 2) : « Les négociations devront être quasiment terminées fin 2024 » (Jean-Brice Dumont, Airbus)

GRAND ENTRETIEN- Dans une longue interview accordée à La Tribune à quelques jours de l'ouverture du salon aéronautique et de défense de Dubaï, Jean-Brice Dumont, le patron de la division avions militaires d'Airbus Defence and Space, détaille tous les enjeux à court et long terme des programmes dans le portefeuille militaire du constructeur européen : SCAF, Eurofighter, les drones Eurodrone et SIRTAP (Espagne), MRTT, A400M, le futur avion de patrouille maritime et le futur avion de transport médium, et, enfin, le C-295. Bonne nouvelle pour Airbus, le constructeur a en soute de nombreux prospects solides dans ses pays dits domestiques et à l'exportation pour l'ensemble de sa gamme.
« Nous constatons d'ores et déjà l'intérêt d'au moins deux pays étrangers en dehors d'Europe qui souhaiteraient entrer dans le cercle Eurodrone » (Jean-Brice Dumont, Airbus Defence & Space).
« Nous constatons d'ores et déjà l'intérêt d'au moins deux pays étrangers en dehors d'Europe qui souhaiteraient entrer dans le cercle Eurodrone » (Jean-Brice Dumont, Airbus Defence & Space). (Crédits : Airbus)

LA TRIBUNE- En dépit des rumeurs venues de Grande-Bretagne, pouvez-vous nous expliquer où en est le programme SCAF ?

JEAN-BRICE DUMONT- On est dans le concret. Nous travaillons pour définir l'architecture du système de systèmes ainsi que celles de l'avion et des drones. Nous avançons bien avec les équipes clients et les États sont pleinement engagés contrairement à ce qu'on a pu lire dans une certaine presse d'outre-manche. Nous préparons également des essais en soufflerie, poursuivons nos essais de vols collaboratifs entre avions pilotés et avions non pilotés, le Man Unmanned Teaming (MUM-T). Le MUM-T va donner la capacité de faire collaborer un avion piloté et un avion non piloté pour un certain nombre de cas d'usage opérationnel. Avec pour objectif, la mise en service du SCAF à l'horizon 2040. Mais il va falloir développer avant 2040 des drones qui devront être connectés avec l'Eurofighter ou le Rafale. De même la connectivité va arriver de façon incrémentale. C'est par exemple ce qu'apporteront les évolutions du MRTT qui seront opérationnelles à partir de 2026. Ainsi, nous nous dirigeons progressivement vers le monde du SCAF, qui est l'avion du futur, les drones du futur et le combat cloud du futur.

C'est pour cela que la France a fait une place au Neuron dans le cadre de la Loi de programmation militaire (LPM)...
... Tout le monde, y compris la France, va développer des briques à partir de l'existant pour aller vers le SCAF. La France développe le Rafale F5, qui a un cousin germain, l'Eurofighter LTE (Long Term Evolution). Les deux appareils ont besoin de créer un pont entre aujourd'hui et le SCAF. Cela veut dire que les avions de combat actuels doivent évoluer pour faire face à l'évolution des menaces et être capables d'opérer progressivement dans un environnement de système de systèmes. Ils voleront plus tard avec les avions de nouvelle génération. En attendant la coopération SCAF, ces produits vont rester concurrents mais il va quand même falloir travailler sérieusement sur les questions d'interopérabilité. Ce sont des sujets très importants pour le SCAF, qui devra être interopérable aussi avec les avions que développent les Etats-Unis. On appelle cela l'interopérabilité de la bulle de combat aérienne. Il faut s'y préparer. Il va donc falloir qu'on commence à faire du collaboratif entre les différentes plateformes bien avant 2040.

Mais n'est-ce pas une brique du fameux plan B de la France avec le Neuron comme cela a été évoqué par la presse ?
Face aux programmes en cours de développement aux Etats-Unis, l'évolution des avions de chasse européens existant n'est pas un plan B. En revanche, c'est un plan intérimaire et crucial pour faire face aux menaces émergentes et préparer l'arrivée du SCAF. Le Neuron montre qu'il existe un besoin de travailler sur les capacités de combat collaboratif par étape. Airbus a également sa réponse. Nous sommes convaincus qu'il faut aller vite, en particulier dans les drones. Car les Américains sont partis fort avec le programme NGAD (Next Génération Air Dominance), composé d'un avion et des drones CCA (Collaborative Combat Aircraft).

L'interopérabilité des futurs systèmes aériens de combat est vraiment le sujet clé entre les Etats-Unis et les alliés. Avez-vous le sentiment dans cette période de développements et d'études cruciale pour toutes les questions d'interopérabilité que les Américains jouent le jeu ou jouent leur jeu ?
Les Américains réalisent aujourd'hui qu'ils ont besoin des alliés parce qu'ils ne peuvent pas être sur tous les fronts en dépit de leur puissance. Et l'histoire récente nous a montré que leurs priorités militaires peuvent évoluer assez radicalement en fonction du locataire de la Maison Blanche. Attendons les prochaines élections. Mais une chose est sûre, et peu importe ce que veulent les Américains, si l'équipe Europe se prépare et que nous avons notre pack interopérabilité avec une forte dimension technique, on sera écouté. Si on ne se prépare pas et si on part chacun dans son coin, nous n'avons aucune chance en tant qu'Européens et nous aurons alors un standard américain prêt à consommer avec des boites noires comme celles du F-35.
C'est une question de souveraineté et cela milite encore plus pour un programme de combat aérien du futur le plus européen possible. N'oublions pas que l'Europe a fait l'impasse sur le développement d'avions de combat de la génération du F-35 qui a connu un certain succès à l'export sur notre continent. Elle ne peut pas se permettre de rater la génération d'après. Et cette génération ne sera plus seulement un avion, ce sera le SCAF et son changement de paradigme lié à l'approche système de systèmes.

Existe-t-il une convergence de vues entre Européens ?
Oui tous les pays sont bien conscients des enjeux d'interopérabilité et c'est aussi important vis-à-vis du programme GCAP/Tempest. Mais il y a une différence qui porte sur les appareils qui équipent les flottes des pays en question. Et il y a un éléphant dans la pièce : le F-35, qui est arrivé dans plusieurs flottes européennes avec sa propre bulle d'interopérabilité.

Justement le F-35 n'est pas interopérable avec les avions européens actuellement en service...
... C'est un des gros sujets intermédiaires. Comment arriver à forcer une interopérabilité avec le F-35 présent dans la plupart des pays européens ? Si l'équipe d'Europe se constitue à travers le SCAF, le F-35 devra se rendre interopérable. Même aux États-Unis, le F-35 a sa propre bulle d'interopérabilité, qui pose problème. Cela ne peut pas marcher sur le long terme, pas plus aux États-Unis qu'ailleurs.

Comment se passe l'intégration de la Belgique en tant qu'observateur dans l'équipe SCAF ?
Le statut d'observateur est intéressant. Il permet à tout le monde de mûrir un peu l'idée de ce que pourrait être une implication belge dans le programme. Le choix sera essentiellement politique avec une éventuelle déclinaison industrielle. C'est donc à la Belgique de déclarer ses intentions, qui devront ensuite être discutées avec les trois autres pays. Elle devra le faire au plus tard quand le programme entrera dans sa phase de développement. Le SCAF est actuellement dans la phase 1B jusqu'en 2025, puis la phase 2 jusqu'en 2028/2029. Après il y aura un chevauchement entre la phase 3 et le début du développement.

Que pourrait-elle apporter au programme ?
La Belgique peut déjà s'engager sur un achat d'avions et de drones. Sur le plan industriel, l'industrie belge a des compétences dans le domaine du MRO. Elle peut également obtenir une charge indirecte, qui ne serait pas directement liée au programme, et une charge directe si elle a développé des briques technologiques nécessaires au programme SCAF. Ce sera au gouvernement belge de choisir ses champions, comme la France, l'Allemagne et l'Espagne l'ont déjà fait au début du programme.

Les négociations pour entrer dans la phase 2 ont-elles commencé ?
Elles n'ont pas commencé, mais elles vont débuter en début d'année prochaine et elles devront être quasiment terminées fin 2024.

Ces négociations concernent-elles les industriels et les États ?
Ce seront d'abord les États entre eux. Mais les industriels auront éventuellement de nouvelles idées plus précises sur ce que pourra être la phase 2, après avoir défini lors de la phase 1B les architectures des systèmes. Les États vont analyser les résultats de la phase 1B. Il y aura des discussions à la fois transnationale et entre clients et industrie.

Combien y aura-t-il de démonstrateurs pour l'avion de combat ?
En principe, un seul.

Les relations entre les équipes d'Airbus et de Dassault Aviation se passent-elles bien ?
On apprend à se connaître. Les équipes se découvrent, les cultures des deux maisons sont différentes. La capacité à travailler en coopération d'égal à égal est plus courante chez Airbus. C'est comme cela que l'entreprise est née. Mais il aura fallu attendre l'A350 pour que tout le monde chez Airbus travaille avec les mêmes outils et les mêmes processus. Entre Airbus et Dassault, ce n'est pas qu'il y en a un qui est meilleur ou plus mauvais que l'autre. Non, nous avons des façons de fonctionner différentes. Nos entreprises fabriquent quasiment les mêmes produits mais ont par exemple des méthodes de validation interne différentes. L'Eurodrone est un galop d'essai pour le SCAF. Le leadership n'est pas le même mais cela permet à beaucoup d'ingénieurs des deux maisons d'apprendre à se connaitre et de travailler ensemble dans la durée. Nous sommes en train de définir comment calibrer ensemble les processus de développement, les méthodes, les outils, etc.

Il y avait des interrogations sur la poursuite du programme Eurofighter. Vous les avez levées en évoquant le nouveau standard LTE. Avez-vous des commandes pour faire vivre ce programme ?
Nous avons dans notre carnet des Eurofighter en commande, que ce soit les programmes Quadriga en Allemagne ou Halcon en Espagne (tranche 4). Ces commandes permettent des livraisons jusqu'au début des années 2030. La tranche 5 (version LTE) débouchera en outre sur des commandes allemandes supplémentaires ainsi que probablement dans d'autres pays Eurofighter. C'est le cas de l'Espagne qui va très prochainement commander 25 Eurofighter supplémentaires dans le cadre d'Halcon. Enfin, des commandes export sur les tranches 4 et 5 peuvent également se concrétiser. Nous avons quelques prospects export. Plutôt du côté de l'orient.

L'Allemagne maintient-elle son veto sur l'export de l'Eurofighter vers l'Arabie Saoudite ?
Pour le moment.

La version LTE pourrait-elle être en danger si l'Allemagne commandait des F-35 supplémentaires ?
Le programme LTE est planifié par tranches. Il y aura en 2024 la phase appelée Technology Maturation Phase, qui est une phase de développement. Actuellement, nous sommes en train de nous faire notifier la tranche P4E (traitement des obsolescences et évolutions capacitaires), puis en 2024 la phase préliminaire de LTE (versions P5E et P6E) où il y aura des changements plus significatifs dans l'avion.

Les Britanniques suivent-ils ?
C'est tous les pays Eurofighter qui signent un accord.

Le développement de l'Eurodrone est-il conforme au calendrier ?
Nous sommes en route vers la revue de conception préliminaire, premier point de passage dans le développement du programme. C'est le moment où sont définies les grandes architectures et les grandes interfaces entre les différents sous-systèmes. Sa mise en service est prévue en 2029. Nous constatons d'ores et déjà l'intérêt d'au moins deux pays étrangers en dehors d'Europe qui souhaiteraient entrer dans le cercle Eurodrone. L'intérêt de ces deux pays pour le produit est réel au point de vouloir s'impliquer.

S'impliquer industriellement ?
S'impliquer dans un premier temps en tant que client. Mais en général, les pays qui souhaitent s'impliquer ont un agenda industriel derrière. C'est un peu l'histoire de la Belgique sur le SCAF, qui a été citée comme exemple par ces pays.

Au salon du Bourget, l'irruption du drone Aarok a surpris. Quatre mois après, estimez-vous que cet appareil est réellement un concurrent pour Airbus ?
A ce stade c'est un projet d'avion. Il faut voir où ils veulent aller. Il a une taille intermédiaire entre l'Eurodrone et le programme de drone tactique SIRTAP qu'Airbus développe en Espagne. Le contrat SIRTAP devrait être signé très prochainement avec l'Espagne et la Colombie est déjà un pays partenaire de ce drone à la fois économique et robuste.

Airbus Defence & Space a obtenu du ministère des Armées un contrat de développement pour de nouvelles capacités de l'avion-ravitailleur MRTT. Qu'est-ce que cela va concrètement apporter à cet appareil ?
Cette commande va permettre deux évolutions logiques et importantes pour la flotte MRTT de l'armée de l'Air et de l'Espace française. D'abord, le MRTT France va devenir un véritable nœud de communications en vol avec des capacités de commandement et conduite des opérations. Ce standard prépare déjà l'arrivée du SCAF et du cloud de combat. C'est en quelque sorte une première brique du SCAF français. Il disposera aussi de capacités d'autoprotection. Cet appareil, qui est très visible, avait un vrai besoin de protection dans un contexte opérationnel qui se durcit. Avec ce standard, la France va faire un grand saut en avant, cohérent avec la politique d'emploi et de possession du MRTT par l'armée de l'Air et de l'Espace.

Ce nouveau MRTT pourra-t-il ravitailler des drones ?
Nous y travaillons. Airbus a développé une capacité de ravitaillement automatique. Singapour a été le premier client à nous la commander. Concrètement, l'opérateur à bord du MRTT clique sur un bouton, ne touche plus à rien et le ravitaillement s'effectue de façon automatique. L'étape suivante est le ravitaillement dit autonome pour ravitailler les drones qui accompagneront les avions pilotés. Nous devons maîtriser cette capacité pour permettre le ravitaillement de tous les aéronefs- avions pilotés et drones - qui voleront dans le système de combat du futur.

Envisagez-vous de renouveler l'actuelle flotte de MRTT (A330ceo) pour la faire évoluer vers des A330neo ?
La production du moteur de l'A330ceo arrive effectivement en fin de course. Il va falloir basculer la flotte vers l'A330neo. C'est une évolution logique. Il faudra probablement imaginer ce scénario pour la fin de cette décennie. Le MRTT de deuxième génération sera inévitablement un A330neo à ce moment-là.

L'A330neo est-il convertible en MRTT aussi facilement que l'A330ceo ?
Les moteurs et les ailes sont différents. Il faudra accrocher des Pods sous des ailes qui ne sont pas les mêmes ailes. Nous aurons du travail d'ingénierie, de conception et d'essais de base à réaliser. Pour lancer cette évolution, nous devons trouver un (ou des) client(s) de lancement, qui devra commander de l'ordre de quelques appareils. Tant qu'il y aura un marché pour le MRTT, cela nous montrera qu'il faut le faire.

Quelles sont vos ambitions sur le futur avion de transport intermédiaire ?
Airbus est leader d'une étude du Fonds européen de défense (FASETT) qui court jusqu'en 2025. Cette étude est un très bon cadre pour définir le futur appareil dans le cadre d'un programme en coopération : quel avion (capacités, ambitions technologiques...) et quelles coopérations ? Les pays participants arrivent avec un besoin d'appareils et/ou la volonté de participer sur le plan industriel à ce programme. Il va donc falloir choisir le gabarit de l'avion et le niveau d'ambitions technologiques ainsi que les partenariats. Mais il est difficilement envisageable de faire un partenariat à 25. Nous avons besoin dans un développement de savoir qui sont les forces en présence. Et il faudra un avionneur leader et nous devrons définir quelles seront les relations avec les autres partenaires industriels.

Quelles sont vos convictions sur cet appareil en termes de capacités d'emport et de range ? L'idée première n'est-elle pas de remplacer le C-130 ?
Aujourd'hui, le C-295 fait neuf tonnes, l'A400M 37 tonnes. Un appareil de 20 tonnes est une réponse mais elle n'est pas la seule. Le marché naturel intuitif est bien sûr la succession du C-130. La réponse à la question du rayon d'action relèvera de l'ambition technologique du programme, notamment en matière de moteurs, de masse, d'optimisation de la voilure, etc... Est-ce que cet avion devra faire un saut technologique ou devra-t-il être développé rapidement en réutilisant le plus possible l'existant ? Ces questions sont à l'étude.

Le C-295 doit-il être prochainement modernisé ?
Il n'est pas au bout de son potentiel. Nous avons changé l'avionique et les moteurs vont bien. Il n'y a pas de signaux de faiblesse à court et moyen terme de cet avion. En plus, nous sommes en train de le « missionniser » pour le rendre beaucoup plus polyvalent en termes de missions. Dans beaucoup de pays dans le monde, c'est le genre d'avion qu'il faut. L'Inde en a acheté 56 exemplaires.

Pouvez-vous exporter le C-295 à partir de l'Inde pour faire du low-cost ?
Pour l'instant, ce n'est pas le cas. Les avions fabriqués en Inde sont uniquement pour l'armée indienne. Il y aura probablement de la place pour tout le monde à l'arrivée, vu la nature même de l'avion.

Sur l'avion de patrouille maritime, vous êtes en concurrence contre Dassault Aviation. Quels seront les critères de sélection du ministère des Armées ?
Il y a une étude de 18 mois en cours. D'un côté, il y a le 10X de Dassault Aviation, et de l'autre l'A320 d'Airbus. Sur le papier, on voit bien que ce sont deux avions avec des caractéristiques (concept et capacités d'emport) très différentes. Les deux appareils feront ce que l'autre ne fait pas : il y en a un qui ira plus vite, l'autre qui aura une capacité d'emport supérieure, etc... Il appartiendra donc à la Marine nationale et à la DGA de décider quel est l'avion le plus adapté aux missions de l'armée française. La compétition aura également une dimension économique. Ce ne sera probablement pas les mêmes prix, mais ce ne sera pas non plus les mêmes capacités d'emport de munitions. L'appareil, qui ferait moins et qui serait moins cher, devra probablement être complété par autre chose. Le ministère des Armées va devoir répondre à une question complexe. Airbus propose la famille A320 avec une grosse capacité d'emport en ouvrant le ventre de l'appareil, permettant d'embarquer beaucoup d'équipements pour répondre au large spectre des missions de patrouille maritime. L'A320 a vraiment de la place. Airbus dispose déjà de tout un écosystème industriel en France et en Espagne pour réaliser cet appareil.

Si vous n'êtes pas choisi, lanceriez-vous quoi qu'il arrive ce programme avec un client de lancement ?
Nous sommes motivés et confiants. D'autant plus que ce besoin capacitaire reste un besoin de beaucoup de nations. Si effectivement, nous ne sommes pas choisis par la France, il faudra nécessairement un client de lancement. La France est un client référent et très crédible en matière de patrouille maritime du fait de la palette de ses missions et la façon dont elle les mènent avec les Atlantique 2 depuis des décennies. Le choix de la France va être très important. Pour le perdant, ce sera effectivement plus difficile de trouver un client de lancement ayant la crédibilité de la France. Mais nous avons d'ores et déjà des discussions avec un certain nombre de clients dans le monde. Nous croyons beaucoup à nos capacités à remplir cette mission que beaucoup de pays effectuent avec des avions souvent assez anciens. Comme le P8 qui ne va pas durer éternellement.

Sur l'A400M, quelles sont vos certitudes sur ce que va faire la France au-delà de cette LPM ? Va-t-elle confirmer la cible de 50 appareils ?
La France étale les livraisons de l'A400M. Si les 15 sont en moins au-delà de 2030, nous aurons des négociations sur des évolutions contractuelles. La France comme les autres nations sont engagées dans des contrats qui sont liés entre eux donc il faudrait étudier quels sont les impacts potentiels sur les autres pays A400M. Nous avons des discussions avec tous les clients autour de ce sujet. Nous, on a un principe simple : il nous faut une cadence de production minimale de huit appareils par an à Séville en-dessous de laquelle on arrêtera la production de l'A400M s'il n'y a pas de perspective derrière. Nous n'en sommes pas à ce stade. Nous sommes plutôt aujourd'hui en train d'effectuer la qualification des dernières capacités de l'univers opérationnel de l'avion : vol à très basse altitude aux instruments, ravitaillement des hélicos... Nous avons également fait des démonstrations de largage de drones à partir d'un A400M, qui a établi une connexion avec les drones pour en commander la mission (Man Unmanned Teaming).

Sur le développement, avez-vous rempli toutes vos obligations ?
Il faut terminer le contrat de développement. Nous sommes dans le dernier « run », vers la fin du contrat de développement. Après il faut gérer tout le programme de rétrofit. Ce programme génère de l'activité : la qualification d'une capacité entraîne un rétrofit sur les avions en service. Les nations envoient assez régulièrement leurs avions en rétrofit mais ils ont en même temps un besoin - c'est la bonne nouvelle - d'avoir des avions opérationnels. Ils ont été beaucoup utilisés ces derniers mois du fait de l'actualité internationale notamment. Par ailleurs, les nouvelles exigences d'interopérabilité OTAN entraînent un besoin de réaliser des évolutions. Des capacités qui sont hors du contrat parce qu'elles n'étaient pas prévues à l'époque du contrat A400M.

Des perspectives à l'export ?
Les clients sont aujourd'hui les meilleurs « vendeurs » de l'A400M et de ses performances. Ce n'est pas nous. La période est prometteuse de ce point de vue. Sur l'export, certains comparent l'A400M au Rafale. Une fois que le client l'a adopté, il s'en fait l'écho et l'avion se vend à l'export. L'A400M, toutes proportions gardées - on parle d'avions de transport que les armées de l'air possèdent dans des quantités moindres -, donne l'impression d'être en train de passer ce virage. Nous constatons l'intérêt d'un certain nombre de clients export. Puis, certains pays déjà clients veulent en racheter comme le Royaume-Uni, qui s'en est fait l'écho publiquement. Avec l'arrêt de leurs C-130, ils veulent  commander des appareils supplémentaires pour disposer d'une flotte complète et cohérente. A l'export, comme pour l'Eurofighter, tout se passe plutôt du côté de l'orient.

Quel est le bilan des ventes de l'année à quelques semaines de la fin de 2023 pour l'activité avions militaires ?
A l'export, nous avons obtenu un contrat important avec neuf MRTT vendus au Canada. Le C-295 se vend bien. L'Espagne va commander des C-295 en version patrouille maritime (six appareils) et surveillance maritime (10). Nous aurions aimé vendre plus d'A400M à l'export, nous avons bon espoir de signer de nouvelles commandes l'année prochaine. En revanche, nous avons aussi eu de bonnes concrétisations, notamment concernant le C-295 et le MRTT. Le lancement du drone SIRTAP en Espagne cette année est également une bonne nouvelle. Cela va consolider notre portefeuille de drones. La commande de la seconde tranche Halcon devrait arriver en 2024. Commercialement, c'est plutôt une assez bonne année et après il faut exécuter.

Justement, avez-vous des problèmes de supply chain ?
La supply chain souffre globalement. Nous avons un certain nombre de nos programmes qui subissent des défauts de fournisseurs, notamment des défauts d'approvisionnement (manque de pièces). Nous sommes plus critiques en flux de pièces qu'en temps normal. Donc il faut faire du stock et surtout accompagner les fournisseurs.

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Commentaires 10
à écrit le 11/11/2023 à 12:22
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Bonjour, bon avant fin 2024, ils peux y avoir beaucoup de chose.... donc d'ici la sa devrait bien se passer... D'ailleurs les négociations avec les industriels s'est un peux sont problèmes.. l'etat francais dois juste veillez que notre pays reste e...

à écrit le 10/11/2023 à 17:43
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On se prépare à une production échantillonnaire et invendable, mais pas de problèmes, ceux qui décident aujourd'hui ne seront plus aux affaires. Le but c'est de rendre le programme assez avancé pour qu'il soit encore plus couteux à annuler.

à écrit le 10/11/2023 à 17:28
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Sinon, c'est le crash?

à écrit le 10/11/2023 à 14:10
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Réponse à DssltRfl . Vous écrivez ''nos dirigeants''...je dirai plutôt nos fossoyeurs professionnels imbus de leur statut et grands blablateurs, en quelques mots des bons à rien.

à écrit le 10/11/2023 à 12:59
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Bonjour, avant toute chose, les intérêts stratégiques de certains ne sont pas forcément les intérêts de la France.. La France avec 67 millions d'habitants est un petit pays. Et avec 3 000 000 000 de dette, nous n'avons plus les moyens de rien... E...

le 14/11/2023 à 9:14
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3 000 000 000 de dettes, ça serait élyséen : tout le monde à Bora Bora dès demain ! Malheureusement, faut-il y adjoindre trois zéros : 3 000 000 000 000.

à écrit le 10/11/2023 à 12:08
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Nos dirigeants sacrifient nos intérêts stratégiques pour faire plaisir aux allemands et à l'Europe (pléonasme) alors que tous les exemples (Eurofighter, char MGCS, choix du F35...) montrent qu'ils cherchent seulement à nous affaiblir, faire perdre no...

le 11/11/2023 à 8:13
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Revoyez votre copie!!! Ce n'est pas l*Allemagne qui veut un coopération avec la France, mais c'est plutôt la France qui veut ä tout prix collaborer avec l'Allemagne!!!! Je ne vois aucun savoir faire francais dont l'Allemagne a besion. Elle fabrique d...

le 14/11/2023 à 9:27
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@ReponseDesAppaches Non, ce n’est pas la France qui souhaite à tout prix cette collaboration, mais Macron ; c’est un économiste : il veut faire des économies. Non, les Allemands ne savent plus faire un avion de chasse moderne et complet depuis 1945...

à écrit le 10/11/2023 à 11:25
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Le SCAF ne verra jamais le jour.

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