Il ne peut pas y avoir que des mauvaises nouvelles. Parti cette semaine de Seattle (Etats-Unis), un 737 MAX 8 de China Southern Airlines a effectué deux escales successives sur les îles de Hawaï puis de Saipan, dans le Pacifique, avant de voler vers Canton ce samedi, selon Flightradar24. Cette livraison marque la fin du gel des importations de 737 MAX auprès des transporteurs chinois, qui durait depuis 2019.
Un marché crucial pour Boeing
Les 737 MAX avaient été bannis en Chine après les deux catastrophes aériennes impliquant ces appareils. Ces drames ont fait 346 morts au total et ont longtemps cloué ces modèles au sol dans le monde entier. C'est principalement un problème sur un logiciel de vol qui avait conduit un appareil de la compagnie indonésienne Lion Air puis un avion similaire d'Ethiopian Airlines à piquer du nez sans que les pilotes ne parviennent à les redresser. Des responsables de Boeing ont aussi parfois sous-entendu que les tensions diplomatiques et commerciales sino-américaines n'étaient pas étrangères à la sévérité du traitement de ses avions par Pékin durant ces dernières années.
Boeing considère la Chine comme un marché crucial. Selon ses prévisions, le géant asiatique devrait avoir besoin de 8.560 nouveaux avions de passagers d'ici à 2042 et générer à lui seul environ 20% de la demande mondiale. Lors d'une audioconférence avec des analystes fin octobre, les dirigeants de l'avionneur américain avaient indiqué que 85 avions de la famille du 737 étaient prêts à être livrés à des compagnies chinoises.
L'incident sur un 737 MAX 9 d'Alaska Airlines fait toujours des vagues
Reste que l'avionneur est de nouveau dans la tourmente après un incident aux Etats-Unis le 5 janvier sur un 737 MAX 9 de la compagnie américaine Alaska Airlines. Une porte obstruée s'était détachée en plein vol, ce qui avait entraîné le maintien au sol des appareils de ce modèle et affecté la crédibilité du constructeur. Alors que Boeing doit publier mercredi ces résultats du quatrième trimestre, Dave Calhoun, le patron, et Stan Deal, chargé de la branche d'aviation commerciale, ne paraissent donc pour l'instant être poussés vers la sortie.
« Nous n'avons pas l'impression que des changements soient imminents au niveau de la direction, mais ces choses sont très difficiles à prévoir », déclare à l'AFP Christopher Raite, analyste de Third Bridge. D'autant que ce qu'il s'est produit le 5 janvier « n'est pas encore clair ».
L'avion du 5 janvier, mis en service en novembre, « avait eu trois problèmes de pressurisation juste avant l'incident », rappelle le spécialiste, soulignant qu'Alaska Airlines « savait qu'il avait un problème mais a continué à le faire voler » en évitant tout survol d'eau « par prudence ». « Tout le blâme n'est pas forcément pour Boeing », estime-t-il
Ce jour-là, une porte-bouchon de la carlingue d'un Boeing 737 MAX 9 d'Alaska Airlines s'est décrochée en vol. Dans la foulée, l'agence américaine de régulation de l'aviation (FAA) a cloué au sol les appareils de même configuration --171 des 218 Boeing 737 MAX 9 livrés à ce jour. Alaska Airlines et United Airlines en possèdent la grande majorité, avec respectivement 65 et 79 avions reconfigurés. Le sénateur démocrate Mark Warner a indiqué il y a quelques jours avoir confiance en Dave Calhoun, constatant une « approche différente en terme de transparence ». « Le Boeing du passé, qui a caché la vérité après le désastre du MAX (les deux accidents, NDLR) » n'existe plus, a-t-il relevé. « Il faut préciser clairement que les dirigeants de l'époque ont quitté le groupe. »
Les 737 MAX 9 d'Alaska Airlines reprennent du service
L'Agence américaine de régulation de l'aviation civile (FAA) a dévoilé mercredi un « vaste » programme de maintenance et d'inspection pour permettre leur remise en service. C'est Alaska Airlines qui a rouvert le ballet aérien, avec un Seattle-San Diego vendredi après-midi. La compagnie a précisé vendredi matin que l'inspection de sa flotte - jusqu'à une douzaine d'heures par appareil - devrait être achevée « d'ici la fin de la semaine prochaine ». « Cela nous permettra d'opérer notre programme de vols en totalité », a relevé la compagnie, qui estime que 3.000 vols auront été annulés en janvier du fait de la suspension, pour des conséquences financières estimées à 150 millions de dollars.
Par ailleurs, outre renforcer sa supervision du constructeur, la FAA l'a informé de son refus d'autoriser toute expansion de la production de la famille du 737 MAX - son avion vedette. Un coup dur pour Boeing qui s'est fixé des objectifs financiers ambitieux pour 2025, comptant sur une hausse de sa production pour y parvenir. Il vise une cadence mensuelle de cinquante 737 à horizon 2025/2026, contre 31 début 2023. « Nos experts s'attendent à l'annonce mercredi d'un ralentissement de la production », précise Christopher Raite.
United Airlines a été dès lors contrainte de revoir sa planification pour les prochaines années. Scott Kirby, patron de la compagnie aérienne, a évoqué mardi auprès d'analystes la suspension de vol du 737 MAX 9 depuis le 6 janvier ainsi que les commandes du 737 MAX 10, appareil qui n'est toujours pas certifié par les autorités réglementaires. « Nous n'annulons pas la commande (de MAX 10). Nous le retirons de nos plans internes », a indiqué le patron. « En 2024, nous avons un total de 107 avions qui doivent être livrés, dont 31 modèles de MAX, mais il est irréaliste à ce stade de penser que tous ces avions seront livrés comme prévu », a commenté le directeur financier Mike Leskinen. Selon lui, United comptait initialement sur la livraison de 277 MAX 10 d'ici la fin de la décennie et sur ses options pour 200 appareils supplémentaires. « C'est un avion fantastique, mais nous ne pouvons pas compter dessus », a-t-il relevé, affirmant que la compagnie devait « retravailler la programmation de la flotte. »
(Avec AFP)
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