Alimentation : le bio peut-il rebondir ?

Malgré la persistance de l'inflation et la baisse de la consommation alimentaire des ménages, quelques indicateurs laissent espérer un redressement du marché d'aliments bio, selon ses acteurs. Mais l'engagement des pouvoirs publics semble insuffisant.
Giulietta Gamberini
Jusqu'à 50% plus chère que l'alimentation dite conventionnelle, l'alimentation bio a vu son poids dans les paniers des acheteurs de la grande distribution passer de 4,3% à 3,9% des volumes entre 2022 et 2023.
Jusqu'à 50% plus chère que l'alimentation dite conventionnelle, l'alimentation bio a vu son poids dans les paniers des acheteurs de la grande distribution passer de 4,3% à 3,9% des volumes entre 2022 et 2023. (Crédits : Reuters)

Avec une baisse des volumes vendus en grande distribution de 13% entre janvier et juillet 2023, selon l'institut Circana (ex IRI), l'alimentation bio figure parmi les principales victimes de l'inflation alimentaire, et de la conséquente contraction de la consommation alimentaire des ménages -qui ont respectivement atteint +11% et 8% en un an, selon les dernières données de l'Insee.

Jusqu'à 50% plus chère que l'alimentation dite conventionnelle, l'alimentation bio a vu son poids dans les paniers des acheteurs de la grande distribution passer de 4,3% à 3,9% des volumes entre 2022 et 2023, selon le cabinet NielsenIQ. Selon les chiffres de l'Agence Bio présentés en juin, le marché est tombé à douze milliards d'euros l'an passé, soit un recul de -4,6 %.

Une accalmie dans la rationalisation des assortiments

Malgré la concurrence féroce d'autres labels de qualité, et les difficultés croissantes des ménages frappés par la baisse de leur pouvoir d'achat, les acteurs du secteur tentent toutefois de garder la foi, en soulignant l'émergence de facteurs faisant entrevoir un redressement. Ainsi, les fermetures de magasins spécialisés -qui en 2022 ont vu leur ventes en valeur chuter de 8,6 %- ralentissent, en passant en moyenne de 28 par mois entre janvier et juin 2023 à 7 par mois cet été, note Antoine Lemaire, directeur de la rédaction du magazine Bio Linéaires.

Depuis trois mois, le chiffre d'affaires y semble même repartir à la hausse (+1,7% en juin, +1,6% en juillet et +1,3% en août par rapport aux mêmes mois de 2022), observe-t-il. Si aux ventes de ces magasins on ajoute celles des "épiceries alternatives de proximité", où 80-90% des produits sont bio, en 2023 l'ensemble pourrait atteindre 3,95 milliards d'euros, contre 4,162 pour les magasins spécialisés en 2021, remarque l'expert.

En grandes et moyennes surfaces, la rationalisation des assortiments, qui ces dernières années a pénalisé le label, a enregistré fin août son taux le plus bas depuis 12 mois, selon l'institut Circana, cité par Bio Linéaires: -10,7 %. « Le point d'équilibre semble atteint, on entrevoit une accalmie dans la réduction de l'offre bio dans les produits de grande consommation », analyse Antoine Lemaire.

170.000 restaurants et 80.000 cantines à cibler

Les plus prometteurs restent toutefois, comme au début de la crise, deux autres canaux : la vente directe et la restauration hors domicile, qui ont respectivement vu leur chiffre d'affaires croître de 4% et de 17% en 2022. La vente directe représente désormais 13% des parts de marché, et reste dynamique:

« Depuis janvier 2023, on enregistre de nombreuses nouvelles installations en maraîchage bio avec un projet de vente des produits en circuits-courts », témoigne le directeur de la rédaction de Bio Linéaires.

Quant à la restauration hors domicile, son potentiel découle du fait qu'aujourd'hui la bio dépend encore à plus de 90% de la consommation à domicile, dans un pays qui compte pourtant quelque 170.000 restaurants et 80.000 cantines. Et alors que la loi Egalim I de 2018 imposait d'atteindre dès le 1er janvier 2022, dans la restauration collective publique, 50% de produits de qualité et durables, dont au moins 20 % de produits biologiques, on n'en est encore qu'à 6%.

La multiplication des lieux et des modes d'achats des Français depuis la crise sanitaire liée au Covid mériterait d'ailleurs d'être davantage mesurée voire exploitée par les acteurs du secteur, rappelle Philippe Laratte, vice-président de l'association d'organisations professionnelles La Maison de la Bio. D'autant plus qu'elle permet de réduire le surcoût des achats bio, en les rendant davantage accessibles à l'ensemble des ménages, souligne-t-il.

60 millions, des « peanuts »

« Nous sommes aujourd'hui au plus bas d'un cycle économique naturel mais, comme au début des années 2000, la bio va repartir », croit ainsi Philippe Laratte. A condition toutefois que « tous les acteurs, publics et privés, se remettent en cause et travaillent ensemble pour adapter les filières aux plus récentes attentes consommateurs », souligne-t-il.

Or, ni le gouvernement ni les distributeurs français semblent suffisamment engagés -contrairement à ceux allemands où le marché redémarre-, déplore Philippe Laratte. Les 60 millions mobilisés cette année par l'Etat pour "aider à résoudre les difficultés les plus urgentes des filières agricoles en agriculture biologique" sont « peanuts », notamment comparés aux 160 millions d'euros débloqués cette année pour les vignerons, dénonce le vice-président de la Maison de la Bio.

Giulietta Gamberini

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaires 13
à écrit le 21/09/2023 à 8:14
Signaler
C'est cocasse de lire dans le titre "le bio peut-il rebondir ?" alors que juste au dessus nous avons un autre article au titre :"l'autorisation du glyphosate pourrait être prolongée encore dix ans, sur proposition de Bruxelles". Ben voilà c'est bien ...

à écrit le 20/09/2023 à 18:21
Signaler
Bonjour Chez mol commencent à s'installer des distributeurs automatiques. C'est. Du bio qui ne veut pas dire son nom et ça marche très bien, il y a beaucoup de clients et c'est moins cher qu'en hyper.

à écrit le 20/09/2023 à 17:55
Signaler
C'était un marché de niche, ça redeviendra un marché de niche...évidemment tout le monde veut que l'état paye ka différence pour pouvoir se gaver

à écrit le 20/09/2023 à 14:11
Signaler
Le poisson est-il bio ? En bio j'ai ma tisane du soir et les amandes grillées (Espagne/Italie), y avait le jus de légumes qui a augmenté de plus de 60% en réduflation (0;75L vs 1L) y a qq années et ai donc arrêté d'en acheter (juste une fois en 'prom...

à écrit le 20/09/2023 à 14:00
Signaler
Le bio qui connaît des problèmes est essentiellement celui douteux vendu en grandes surfaces. Le bio local et celui distribué par des enseignes sérieuses (cf. Biocoop) vend toujours autant.

à écrit le 20/09/2023 à 9:15
Signaler
Comme pour beaucoup de choses, il faut savoir de quel bio on parle. Le bio c'est local et en circuit court. Certainement pas le "bio" industriel distribué par les grandes surfaces,

le 20/09/2023 à 10:01
Signaler
Il ne faut pas faire dire au bio plus que sa définition originale : cultivé sans pesticides et autres intrants chimiques. Le circuit court est un concept différent qui n’a rien à voir avec le bio et qui se veut aller vers une plus grande sobriété dan...

le 20/09/2023 à 15:15
Signaler
Le bio c'est du bio, faut arrêter de nous faire croire que y en a plein de sortes de bio et que c'est compliqué. Bio c'est bio, et c'est tout....Y a un label officiel exprès et ça s'appelle bio. Y a une seule sorte de bio et c'est tout. Arrêtez svp l...

à écrit le 20/09/2023 à 8:28
Signaler
Sans vouloir faire de la provocation, je crois que le Bio est mort. Il a fait la preuve de ses limites, plus cher, moins productif dans un monde où produire plus (la question de nourrir l’Afrique..) va redevenir essentielle, et bien sûr sans apport e...

le 20/09/2023 à 9:24
Signaler
@Bh Vous avez raison, les produits agro industriels et ultra transformés sont bien plus sains que les produits bio! 🤣🤣🤣Si le seul problème du bio pour certaines plantes est le traitement au sulfate de cuivre, il est vraiment mineur par rapport aux dé...

le 20/09/2023 à 10:27
Signaler
Vous étalez votre méconnaissance du bio.

le 20/09/2023 à 12:43
Signaler
vous stockez du cuivre dans votre organisme ? La terre sans doute avec la bouillie bordelaise. "très probablement responsables de toutes (!) les maladies neuro dégénératives" bigre, d'autres disent que ça peut être les pesticides, le BPA, les produi...

à écrit le 20/09/2023 à 8:26
Signaler
Les agro-agriculteurs, héros des temps modernes qui bravent les difficultés imposées par le secteur agro-industriel via leurs politiciens soumis aux lobbys. Il ne faut pas rêver ils ne peuvent pas se multiplier sans arrêt ceux qui bossent pour la nat...

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.