Comment Biocoop fait face au défi de l'inflation

Tout en s'appuyant sur une clientèle plutôt fidèle et engagée, l'enseigne veille à garder un écart des prix avec les produits conventionnels « raisonnable », afin d'éviter que sa demande ne baisse davantage. Elle affirme avoir modéré ses marges en raison de la crise du marché bio.
Giulietta Gamberini
(Crédits : Reuters)

Malgré un recul des volumes de ses ventes de plus de 5% entre janvier et août 2023, Biocoop garde espoir.

« Depuis deux ou trois mois, la courbe est en effet redevenue plate voire en légère progression », se réjouit son directeur des achats et de l'offre coopérative Philippe Bernard, en soulignant l'importance de ce léger redressement pour les producteurs bio qui l'approvisionnent.

Lire: Bio : « Les producteurs font de l'apnée » (Laure Verdeau, Agence bio)

Et malgré une nouvelle diminution de ses magasins, qui sont passés de 751 à 742 entre mars et septembre 2023, « après une période où on ne parlait que de fermetures, l'enseigne assiste enfin à une nouvelle vague d'ouvertures », indique sa directrice marketing Claire Bourdon, qui en compte neuf depuis le début de l'année partout en France.

Lire: Alimentation : le bio peut-il rebondir ?

Le premier réseau de magasins spécialisés de vente de produits bio est en outre moins frappé par la crise traversée par le marché depuis 2021 que ses concurrents. De janvier à août 2023, son chiffre d'affaires, porté par l'inflation, a en effet augmenté de 2%: « 3,7 points de plus que le bio en grandes et moyennes surface qui, lui, baissait », souligne Claire Bourdon.

« Tout au long de la même période, Biocoop a également gagné 1,9 point de parts de marché par rapport aux autres magasins spécialisés en bio », pour en occuper désormais presque la moitié, ajoute sa directrice marketing.

500 prix plafonnés

L'inflation, qui incite les consommateurs français à descendre en gamme, reste néanmoins un défi pour la coopérative. Malgré une clientèle plutôt engagée et fidèle, selon les sondages internes, « le prix moyen de l'article acheté a baissé », reconnaît Philippe Bertrand. Un autre signe alerte sur les arbitrages désormais constants des clients : « alors que les ventes de l'alimentaire croissent, celles du non alimentaire diminuent », note le directeur des achats.

Comme les distributeurs conventionnels, l'enseigne mise donc elle aussi sur un panier de produits d'appel. Alors que ses magasins jouissent généralement de toute liberté dans la détermination des prix, ceux de 500 références de marque Biocoop ont été plafonnés. Parmi ceux-ci, 150 sont « particulièrement resserrés » et mis visuellement en avant :

« En moyenne, ils sont inférieurs de 10% à ceux des circuits spécialisés, et supérieurs au maximum de 5% par rapport aux prix de la grande distribution », précise Philippe Bernard.

En 2023, en volumes, les ventes de ces 500 « produits du quotidien » ont crû de 5%, relève Biocoop.

Plus de 4% du chiffre d'affaires du distributeur spécialisé est en outre généré par des produits en promotion. Alors que leur nombre n'a pas augmenté -Biocoop voulant surtout garder « des prix de fond de rayon compétitifs », leurs ventes en valeur ont augmenté de 20%. Les produits en vrac, 15% moins chers que les autres en moyenne, retrouvent en outre « une légère croissance, de 2-3% en volumes », après le recul dû à la crise sanitaire.

Ainsi, à la fin du mois d'août 2023, l'inflation se tassait à 9% chez Biocoop, alors qu'elle atteignait 12% pour l'ensemble des produits bio en grandes et moyennes surfaces, souligne Philippe Bernard.

La limite psychologique des prix

Cette modération de certains prix s'accompagne d'une restriction des marges. « Nos bénéfices  et notre rentabilité sont moins importants que les autres années », indique Philippe Bernard, tout en refusant de fournir des chiffres.

Même si l'inflation a plutôt réduit l'écart entre les prix des aliments conventionnels et bio, ces derniers profitant d'un approvisionnement plutôt local et de partenariats de longue durée, Biocoop craint en effet que l'on atteigne des limites psychologiques qui feraient encore davantage baisser la demande des consommateurs. Il affirme d'ailleurs sensibiliser ses magasins à propos de ce danger.

« Nous sommes conscients que nous avons atteint une limite haute de l'inflation », admet Philippe Bernard.

« L'objectif est que l'écart de nos prix par rapport à ceux du conventionnel reste raisonnable, de manière à ce toute la filière soit correctement rémunérée, mais que nos produits demeurent accessibles  », résume le directeur des achats.

Dans ce cadre, les fournisseurs industriels, avec qui Biocoop devra bientôt signer les conditions générales de vente pour l'année 2024, devront aussi jouer leur part. Si certains ont déjà indiqué qu'ils augmenteront leurs tarifs, d'autres prévoient une stabilisation voire des baisses. Biocoop mise d'ailleurs sur des négociations avec ses fournisseurs -des TPE ou des PME en grande majorité- beaucoup moins tendues que celles auxquelles sont confrontés les acteurs de l'alimentation conventionnelle:

« Tout le monde a à coeur de préserver l'ensemble de l'écosystème », assure Philippe Bernard.

Lire aussi: « Prix alimentaires : faut-il réformer de fond en comble les négociations commerciales ? »

Giulietta Gamberini

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Commentaires 2
à écrit le 24/10/2023 à 20:49
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La marque ferait bien aussi de surveiller les politiques commerciales de certains de ses magasins : personnellement , j'habite près d'une ville où se trouvent une chocolaterie Bio et un torréfacteur bio... Et bien le Biocoop du coin est le seul maga...

le 26/10/2023 à 8:39
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Effectivement je ne comprends pas très bien que Biocoop ne favorise pas cette chocolaterie et cette torréfaction .L’histoire est de savoir si ces 2 enseignes sont réellement bio et qu’ils ne proviennent pas d’une sous traitance ….comme les produits d...

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