Impact environnemental : à quoi va ressembler l'écoscore que vous trouverez sur vos vêtements ?

Dès l'automne prochain, une note évaluant l'impact environnemental accompagnera les vêtements, baptisé écoscore. Objectif affiché, permettre au consommateur de comparer l'impact environnemental et ainsi de le « rendre plus responsable de ses achats », a annoncé, ce mercredi, le ministère de la Transition écologique. Un dispositif pour l'instant sur la base du volontariat des marques, mais qui devrait devenir obligatoire à terme. Pour autant, il n'est pas sans soulever des interrogations, voire des réticences, chez les acteurs du secteur.
En moyenne, chaque Français achète 48 nouveaux vêtements chaque année (Photo d'illustration).
En moyenne, chaque Français achète 48 nouveaux vêtements chaque année (Photo d'illustration). (Crédits : Magali Cohen / Hans Lucas via Reuters Connect)

3,3 milliards. C'est la quantité de vêtements, chaussures et pièces de linge de maison mise sur le marché français en 2022, contre 2,8 milliards en 2021. Chaque Français achète, lui, 48 nouveaux vêtements en moyenne, chaque année. Une pratique « ultra polluant[e] », regrette le ministère de la Transition écologique. À titre d'exemple, en 2016, la production de vêtements textile représentait 8% des gaz à effet de serre au niveau mondial. Et « si on ne fait rien (...) d'ici 20 ans, cela représentera 25% des émissions », poursuit l'exécutif.

C'est la raison pour laquelle l'exécutif entend responsabiliser le consommateur en lui permettant de mesurer l'impact environnemental des vêtements qu'il achète, grâce à l'écoscore. Sur quels critères repose ce nouveau dispositif ? Sera-t-il un jour obligatoire ? Comment est-il reçu par les professionnels du secteur ? Explications.

Selon quels critères l'écoscore sera-t-il calculé ?

Le dispositif fait partie de la loi Climat et Résilience (2021) et a été mis en place à la suite de la Convention citoyenne pour le climat. Son fonctionnement, lui, est bien connu des Français, déjà habitués au Nutri-Score présent sur les emballages et qui informe sur la qualité nutritionnelle des produits alimentaires, ou encore à l'indice de réparabilité qui évalue la facilité de réparer un produit en cas d'un dysfonctionnement survenu en dehors de la période de garantie légale.

Dans le détail, l'écoscore des vêtements prendra la forme d'une note « pouvant aller de zéro à l'infini ». Celle-ci tiendra compte de « l'ensemble des coûts environnementaux du cycle de vie d'un vêtement » (émissions de gaz à effet de serre, pollution, consommation en eau...), pondéré par la « durabilité » du produit, liée à sa matière, la possibilité de le réparer ou de l'entretenir facilement ou encore l'incitation à ne pas le renouveler trop souvent, a expliqué le ministère de la Transition écologique, ce mercredi, lors d'un point téléphonique.

Ainsi, « plus la note est faible, moins le vêtement a d'impact environnemental, et donc plus il est vertueux », résume le ministère. Des informations qui, dans un premier temps, pourront figurer sur l'étiquette ou de manière dématérialisée sur un QR code ou en ligne. L'objectif : permettre aux consommateurs « de comparer les vêtements entre eux de manière simple » et ainsi les « rendre plus responsables de leurs achats » sans les culpabiliser, le prix n'étant plus « le seul critère de choix » disponible.

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Deviendra-t-il obligatoire ?

C'est, en effet, l'objectif du gouvernement qui, interrogé sur cette possibilité, répond que « oui, il pourrait devenir obligatoire dès 2025 ».

Un premier outil, un simulateur de calcul destiné aux marques baptisé « Ecobalyse » est d'ores et déjà déployé à partir de ce mercredi auprès des professionnels pour consultations.

Une fois éventuellement amendé, l'affichage environnemental textile devrait être présenté en mai dans le cadre d'un décret, avant une mise en service « à l'automne 2024 » de façon volontaire dans un premier temps.

Or, l'écoscore des vêtements devait, initialement, être obligatoire dès cette année. Mais le projet a pris du retard, notamment face aux réticences de certains professionnels du secteur textile.

Qu'en pensent les professionnels du secteur ?

En effet, beaucoup se sont interrogés sur la cohérence du dispositif et sur sa méthode de calcul. Car, entre un T-shirt en polyester (dérivé du pétrole) produit en Chine et un pull en laine fabriqué en France en consommant beaucoup d'eau, le doute subsiste quant à savoir lequel ressortira le plus vertueux.

En effet, « d'un point de vue purement carbone, un pull en polyester ou en acrylique fabriqué en Chine est beaucoup moins impactant qu'un pull en laine produit en France », pointait, fin mars, Elliott Mage l'un des directeurs de la start-up Fairly Made, lors d'un événement à Paris.

Faut-il donc privilégier le polyester, léger et durable, mais qui libère des microplastiques ou des matières nobles produites en France, mais très consommatrices en eau et en électricité ? De même, faut-il voir au-delà du vêtement unitaire et intégrer les volumes produits par chaque marque, compte tenu l'essor de la fast fashion?

Tous ces critères doivent être nuancés, une « pondération qui relève plutôt de décisions sociétales, voire politiques », estimait, de son côté, un représentant de l'Ademe, début mars, lors d'un webinaire présentant la méthode retenue.

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Aussi le compromis a-t-il été délicat à trouver entre acteurs du luxe, entreprises made in France, prêt-à-porter fabriquant en Asie et fast fashion, dont les intérêts divergent. La méthode de calcul « est aujourd'hui finalisée » et va être rendue accessible aux marques qui voudront la tester via un simulateur en ligne, a dévoilé le cabinet du ministère de la Transition écologique, vendredi à l'AFP.

Certaines marques se sont, d'ailleurs, déjà montrées volontaires quant à cette initiative. Elles sont, selon le ministère, « une bonne cinquantaine - de Decathlon, à Sandro en passant par Kiabi ou même certaines marques de luxe » - à avoir participé à une première concertation en 2022. Et afin « de limiter la contrainte pour les marques », il a été décidé que ce seront elles qui rentreront les données dans le calculateur de l'écoscore à partir « d'éléments qu'elles possèdent déjà, comme la matière du vêtement, son poids, son pays de fabrication ou la vitesse de rotation des collections », explique encore le ministère. Des contrôles seront, par la suite, mis en place par la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), comme cela a été fait pour l'indice de réparabilité des appareils.

Quid de l'initiative européenne ?

Autre doute soulevé tant lors de sa conception que dans sa mise en œuvre - et qui explique, en partie son retard - « un souci de cohérence avec le dispositif européen ». Car cet écoscore textile, dans lequel « la France est pionnière » selon le ministère, doit venir compléter celui créé à l'échelle européenne.

L'UE travaille, en effet, en parallèle, sur un affichage environnemental harmonisé pour les textiles, afin d'aider les entreprises des pays membres à le calculer « sur la base d'informations fiables, vérifiables et comparables », d'après la Commission européenne. Il s'agit du PEF (Product Environmental Footprint, empreinte environnementale d'un produit, en français).

De nombreux acteurs de l'industrie textile estiment toutefois qu'il n'y a pas « encore de convergence effective » entre les méthodes française et européenne, notamment parce que les bases de données utilisées ne sont pas les mêmes, explique à l'AFP Marie Demaeght, de l'Alliance du lin et du chanvre européens. De son côté, le cabinet de Christophe Béchu assure que c'est bien sur la méthode européenne que « se base » la proposition française qui « l'enrichit ».

Quelle suite ?

Au-delà de l'initiative européenne, l'écoscore n'est pas une initiative isolée en France où une proposition de loi visant à freiner la fast fashion a été adopté en mars dernier par les députés. Portée par la présidente du groupe santé environnement à l'Assemblée nationale, Anne-Cécile Violland, elle prévoit, entre autres, la possibilité de moduler, sous forme de primes ou de pénalités, les contributions financières pour les produits textiles et accessoires. Et ce, en fonction notamment de leur écoscore.

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Ce dernier permettra, en effet, de calculer le « bonus-malus » des marques prévu par cette proposition de loi, indique le ministère. Ainsi, les produits ayant le plus mauvais impact environnemental ne pourront pas bénéficier de primes, mais surtout, ils seront soumis à des pénalités dissuasives dès 2025. Ce malus écologique sera de 5 euros par produit en 2025, 6 euros par produit en 2026, 7 euros par produit en 2027, 8 euros par produit en 2028, 9 euros par produit en 2029 et 10 euros par produit en 2030. Ces malus devront contribuer à financer des bonus au bénéfice des entreprises vertueuses de l'industrie textile.

Pour autant, certains acteurs du secteur craignent que la mise en œuvre de l'écoscore ne ralentisse les effets du texte adopté par les députés en mars. Et pour cause, tant que l'affichage environnemental n'est pas obligatoire, il ne peut pas déclencher des malus financiers. « En réalité, les calendriers sont assez proches, car la  proposition de loi fast-fashion doit encore être examinée au Sénat, puis il faudra prendre les décrets d'application », argue, de son côté, le cabinet du ministre de la Transition écologique.

(Avec AFP)

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Commentaires 5
à écrit le 04/04/2024 à 14:14
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Qu'on nous lâche un peu la grappe, de temps en temps !

à écrit le 04/04/2024 à 9:34
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Nos dirigeants sont faibles.

à écrit le 03/04/2024 à 17:53
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Une veste à col Mao pour tout le monde été comme hiver, un "futal" et une paire de tongs. Allez, bon prince...2 tenues, une pour laver l'autre (à la cendre de bois et au lavoir à la main SVP!) Ah, j'oubliais : 1 bobine de fil noir, 5 aiguilles et un...

à écrit le 03/04/2024 à 17:43
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Le vetement le plus polluant, c'est celui qu'on mettra tres peu ou tres peu longtemps, parce qu'il est trop fragile, trop salissant ou trop difficile a porter, et ca aucun ecoscore n'y peut rien. Si les gens aiment depenser de l'argent dans des vetem...

à écrit le 03/04/2024 à 17:34
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mais oui, encore une loi avec une norme et un diagnostique, dont personne ne doute qu'il est aussi fiable que le DPE, tellement ca magouille en arriere boutique......et tout ca pour quoi, ma bonne Lucette?? pour plaire aux jeunes ecolos, qui veulent ...

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