Alfa Romeo : une pluie de modèles, des profits, une électrification accélérée...; le nouveau patron se dévoile

ENTRETIEN - Electrification, nouveaux modèles, nouvelle politique de prix..., Jean-Philippe Imparato, le directeur général d'Alfa Romeo dévoile à La Tribune les premiers chantiers mis en oeuvre pour redresser la marque italienne premium en souffrance. Faute de nouveautés, les ventes d'Alfa Romeo plafonnent loin, très loin, des volumes atteints dans les années 2000. Après six ans passés à la tête de Peugeot, sa nomination en janvier dernier a été l'une des premières décisions de Carlos Tavares, le directeur général du groupe Stellantis (fusion entre PSA et Fiat-Chrysler) après la création de celui-ci en début d'année. Une nomination qui témoigne de l'intérêt du patron du groupe pour cette marque mythique.
Jean-Philippe Imparato qui a pris la tête d'Alfa Romeo en début d'année dévoile les premiers chantiers pour redresser la marque italienne.
Jean-Philippe Imparato qui a pris la tête d'Alfa Romeo en début d'année dévoile les premiers chantiers pour redresser la marque italienne. (Crédits : Alfa Romeo)

LA TRIBUNE: Vous êtes passé de Peugeot à la direction d'Alfa Romeo dès le lendemain de la fusion des groupes PSA et Fiat Chrysler (Stellantis). Dans quel état d'esprit accepte-t-on d'aller diriger une marque radicalement différente tant dans son positionnement, que sa nationalité mais également en termes de dynamique commerciale ?

JEAN-PHILIPPE IMPARATO: Lorsque Carlos Tavares (Directeur Général de Stellantis, NDLR) m'a appelé un soir pour me proposer de prendre les rênes d'Alfa Romeo, j'ai immédiatement répondu oui. Il faut savoir que je suis né dans une Alfa Romeo. C'était une Giulia 1300 de 1966, l'Alfa Romeo de mon père. Ensuite, j'ai une attache particulière avec l'Italie puisque mon arrière grand-père était marin-pêcheur près de Naples, avant de venir s'installer à Sète en 1904. Et lorsque j'ai dirigé Citroën Italie entre 2007 et 2010, ça a été l'occasion pour moi de retrouver l'acte de naissance de mes aïeux et de renouer le fil de mon histoire familiale. Mais à ce retour aux sources, ce sont aussi des raisons professionnelles qui m'ont motivé à rejoindre Alfa Romeo. C'est un challenge fantastique et qui est tout sauf un choix carriériste. Une opportunité qui ne se présente qu'une seule fois dans sa vie.

La fusion de Fiat et PSA a fait craindre un choc culturel entre les marques. Votre arrivée, vous, un pur produit du groupe automobile français, aurait pu susciter un rejet des équipes...

Lorsque je suis arrivé chez Alfa Romeo, la première chose que j'ai dite aux équipes c'est "j'aime cette marque". Il fallait le dire. J'avais en face de moi des personnes qui avaient la marque chevillée au corps, qui roulent en 4C (le coupé sportif d'Alfa Romeo, NDLR). A partir de là, nous avons pu agrandir l'équipe dans une dynamique positive autour de cette marque à la notoriété extraordinaire. Nous sommes aujourd'hui une équipe de 49 personnes installée à Mirafiori au sein du Centro Stile et nous travaillons comme une start-up.

Justement, Alfa Romeo est empreinte d'une histoire très forte, mais elle est largement affaiblie aujourd'hui. Qu'est ce que cette marque doit incarner aujourd'hui ?

L'ADN d'Alfa Romeo tient en une phrase : la noblesse sportive italienne depuis 1910. Ce n'est pas une "muscle car" ou hypersportive, c'est le sport et la dolce vita. C'est la beauté automobile pour tous. Historiquement, Alfa Romeo n'a jamais été une marque élitiste, c'est une marque avant-gardiste dans le style et qui est à la portée de tout le monde.

Ce n'est pas non plus une marque populaire...

En Italie, c'était une marque populaire. Et c'est cette clientèle que je veux retrouver. Celle qui considère Alfa Romeo comme une marque à part et prête à l'attendre. Cette tribu existe encore. On compte plus de 200 clubs d'Alfistes dans le monde. C'est extraordinaire. L'ADN Alfa Romeo tient en trois valeurs : la marque qui ose, une expérience viscérale et une inclusivité de sa communauté.

Dans l'attente du plan stratégique de Stellantis, qu'avez-vous mis en œuvre depuis votre arrivée en janvier dernier ?

Au premier semestre, Alfa Romeo a apporté une contribution positive aux résultats financiers de Stellantis. Nous avons augmenté nos prix, et coupé dans les coûts. Nous avons réorienté les flux vers les canaux de vente à particulier et aux d'entreprises et supprimé tous recours à des canaux non vertueux. Bien entendu, nous avons adopté, vous ne serez pas surpris, la stratégie du pricing power (capacité à défendre les prix, NDLR). J'ai également passé beaucoup de temps sur le site de Cassino près de Naples car la condition de notre stratégie prix c'est la qualité de la production. Et au vu de nos ambitions, cette qualité doit être impeccable.

Comment comptez-vous remonter la pente en termes de ventes ? Dans les années 2000, Alfa Romeo a atteint des pics à 220.000 ventes par an, en 2019, elles n'ont pas dépassé les 60.000.

Alfa Romeo n'est pas une marque généraliste, c'est une marque premium. Elle raisonne d'abord par la qualité, son deuxième sujet c'est la marge unitaire, et le volume arrive seulement ensuite. Autrement dit, je ne me préoccupe pas des volumes pour l'instant.

Vous avez bien des objectifs...

Alfa Romeo est une marque qui se situe au-dessus de ses produits. Je veux dire, que ce ne sont pas ses produits qui tirent ses ventes mais la puissance de sa marque. Bien entendu, nous avons défini des benchmarks pour piloter l'amélioration de nos performances que ce soit en matière de prix ou de valeur résiduelle (VR). En matière de VR, nous nous situons cinq points en-dessous de notre benchmark.

Quelle est votre stratégie à l'international ?

Alfa Romeo est la marque premium la plus internationale du groupe Stellantis. Son potentiel est immense. L'un des points forts du bilan de mes prédécesseurs a été le succès de la réintroduction d'Alfa Romeo aux Etats-Unis, région qui représente désormais à un tiers des ventes. L'Europe, c'est la moitié des ventes totales, dont 25% en Italie. Le reste est réparti entre la Chine et l'Australie. Notre stratégie est donc d'être très offensif sur ces trois marchés que sont l'Europe, les Etats-Unis et la Chine. Je compte aussi sur le Japon où Alfa a un immense potentiel. C'est dans ce pays qui n'est pas un marché comme les autres, que nous avons vendu le plus de GTA, qui est tout de même une voiture à 180.000 euros.

Votre stratégie produit sera également cruciale.

Nous avons élaboré un plan sur dix ans. Et grâce à Stellantis, nous disposons de toutes les technologies et de l'ingénierie pour mettre en œuvre ce plan. On part sur un lancement par an ce qui doit nous conduire à une gamme de cinq modèles à horizon 2025. Une seconde phase sera ensuite enclenchée qui verra Alfa Romeo se transformer dès 2027 en marque 100% électrique.

Jusqu'ici, Alfa Romeo a fait de nombreuses annonces avec des plans produits ambitieux, et qui n'ont pas été suivis d'effets...

Lorsque je suis arrivé, j'ai dit aux équipes que le Tonale (un SUV compact, NDLR) ne sera pas lancé fin 2021, mais au premier trimestre 2022. Car je ne fais pas de promesses que je ne tiendrai pas. Tous les ans, j'annoncerai chaque année publiquement notre agenda produit pour l'année suivante, et nous nous y tiendrons.

Alfa Romeo est une marque très atypique. Peut-elle trouver les technologies qui correspondent à ses particularités en partageant ses pièces avec les autres marques du groupe Stellantis tel que Citroën ou Fiat ?

L'actuelle gamme Alfa Romeo est bâtie sur une plateforme appelée Giorgio (partagée avec Maserati, NDLR). Celle qui lui succédera sera construite sur STLA Large, l'une des nouvelles plateformes électrifiées du groupe Stellantis. On a vérifié que celle-ci soit compatible avec les spécificités d'Alfa Romeo. Je vous confirme que le typage Alfa restera intacte. Ce sera la même chose avec la chaîne de traction et les modules.

Pourrez-vous également proposer des carrosseries de niches comme des cabriolets sportifs, une silhouette très caractéristique de la marque ?

Si vous me demandez si on peut le faire, la réponse c'est oui. Mais ce qui est certain, c'est que dans un premier temps, la priorité d'Alfa Romeo ne sera pas de lancer des petites séries. Ma priorité c'est de l'amener à un haut niveau de qualité et d'expérience de conduite. Le contexte actuel de transition énergétique ou d'investissements dans le software, nous impose une approche rationnelle.

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Commentaires 5
à écrit le 05/09/2021 à 14:32
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Quoiqu'en dise ce monsieur je crois que nous assistons à la mort des vrais alfa romeo et a court terme a la disparition de la marque;On ne fait pas rouler une Alfa avec une plate forme de 308 OU DE 508. Mr tavares n'a rien compris on voit qu'il sort ...

à écrit le 02/09/2021 à 18:46
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Vu le design "sur-dessiné" (qui vieillira mal) des Peugeot et Citroën, je crains le pire pour Alfa... Il eut mieux valu qu'Alfa passe dans le giron d'Audi/VW au final.

le 02/09/2021 à 19:25
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C'est sûr que chez VW ils sont fort pour trafiquer leurs moteurs et mentir avec un aplomb remarquable. Côté esthétique par contre, les italiens et français sont bien au dessus de ce style germanique très très consensuel pour ne pas dire fade...

à écrit le 02/09/2021 à 18:28
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Aléa Roméo......faites de belles autos abordables à moins de 30000 euros,sans vouloir singer les marques premium.Vous retrouverez des amateurs,moi le premier.

à écrit le 02/09/2021 à 9:05
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Si un italien meme lointain, y parvient, pourquoi le francais proche patine dans le meme domaine ? Reponse, l'italien n'est pas arrogant.

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