"Peugeot va continuer à créer de la valeur pour ses clients" (Linda Jackson, DG)

La marque automobile française ne cesse de gagner des parts de marché en Europe, mais reste structurellement faible en dehors du Vieux Continent. Peugeot veut pourtant accélérer le déploiement de sa stratégie de montée en gamme avec une nouvelle identité de marque, une nouvelle gamme, mais aussi avec une nouvelle direction dirigée par Linda Jackson, ancienne directrice générale de Citroën. Entretien.
Linda Jackson, directrice générale de Peugeot
Linda Jackson, directrice générale de Peugeot (Crédits : Peugeot)

LA TRIBUNE - Vous avez dirigé Citroën pendant six ans, vous arrivez aujourd'hui à la tête de Peugeot. Est-ce si facile de changer de structure et d'incarner un nouveau leadership dans un univers de marque radicalement différent ?

LINDA JACKSON - C'est un challenge très excitant mais aussi très différent. Quand je suis arrivée chez Citroën, il fallait reconstruire une marque, une gamme. Aujourd'hui, j'arrive chez Peugeot qui est en pleine forme, mais qui doit faire face à d'autres défis. Depuis janvier, je suis Peugeot à 200% ! Alors bien entendu, mon travail a été de comprendre cette marque, ses enjeux, ses équipes. Il n'est pas question de changer la direction prise par cette marque. Au contraire, je veux lui apporter mon expérience internationale. Je suis anglaise, j'ai travaillé chez Jaguar-Land Rover, je peux apporter à Peugeot une approche anglo-saxonne pour accélérer son internationalisation, sans pour autant négliger cette belle dynamique qui existe en Europe.

Peugeot est encore trop européen, c'est son gros point de faiblesse avec 80% de ses ventes en Europe. Existe-t-il, selon vous, un avenir pour cette marque à l'international ?

Bien sûr ! Il existe trois marchés sur lesquels Peugeot est implanté mais doit davantage progresser : l'Amérique Latine, l'Afrique-Moyen Orient et la Chine. Nous avons la gamme pour cela, c'est-à-dire des SUV, avec 4 modèles au total. Et nous sommes en train de déployer un pick-up pour progresser en Amérique Latine et en Afrique-Moyen Orient.

Ce pick-up est-il le premier d'une gamme dédiée aux marchés émergents ?

Non, il va accompagner notre gamme sur ces marchés. En Amérique Latine par exemple, notre 208 sera un pilier de notre offensive produit. La recette ce n'est donc pas le pick-up mais une gamme globale.

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En Chine, Peugeot est en difficulté avec une part de marché lilliputienne...

En Chine, notre approche sera différente. Nous devons reconstruire la marque puisque nous ne sommes évidemment pas satisfaits de notre performance. Nous nous sommes posé des questions sur ce qui n'allait pas. Etait-ce la gamme qui n'était pas adaptée ? Le réseau ou notre stratégie marketing qui était mal structurée? Nous avons fini par adopter un plan d'action en deux temps avec l'objectif de regagner des parts de marché. D'abord, le déploiement de nouveaux modèles autour de l'électrification qui accompagnera la dynamique de notre nouvelle identité de marque. Nous allons repenser notre place en Chine dans une stratégie à 360 degrés avec de nouveaux sites internet, des ventes en ligne, un nouveau showroom en plein de cœur de Shanghai que nous venons juste d'inaugurer. Et nous allons travailler le repositionnement de notre marque autour du thème du french chic.

Vous vous êtes donné un calendrier et des objectifs de parts de marché ?

Cela va évidemment prendre plusieurs années. Nous sommes dans une démarche de reconstruction. Nous n'avons pas communiqué d'objectifs de parts de marché. Mais ce que je peux vous dire, c'est que nous sommes parvenus à stabiliser nos ventes en Chine.

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Ce plan implique un important budget marketing...

Il y aura un important volet marketing parce que l'enjeu est de recréer de la notoriété. Mais chez Stellantis, nous sommes toujours efficaces. C'est donc dans une démarche d'efficacité que nous déploierons ce plan marketing.

En Europe, vous l'avez dit, Peugeot est en pleine forme. Vous avez pris la tête de plusieurs segments, et vous avez même été la première marque automobile européenne en février. Vous entamez un nouveau cycle de gamme avec le renouvellement de la 308. Quel est le cahier des charges de ce nouveau cycle pour améliorer la performance de Peugeot en Europe?

Pour la 308, nous visons le podium européen des berlines compactes. Plus globalement, nous voulons augmenter notre part de marché qui tourne actuellement autour de 7,5%. Il faut que nous gardions cet équilibre entre croissance et rentabilité. Au premier trimestre, nous avons presque gagné un point de part de marché par rapport à 2020. Nous allons continuer dans cette dynamique.

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Il y a pourtant des disparités dans votre performance en Europe... Vous êtes par exemple très faible au Royaume-Uni et en Allemagne.

Nous devons effectivement trouver la bonne recette sur ces deux marchés. Nous allons travailler notre notoriété avec cette nouvelle gamme. Au Royaume-Uni, notre part de marché tourne autour de 4 à 5 % alors qu'historiquement nous étions autour de 6%. Il y a donc des opportunités.

Vous avez renoncé à vous implanter aux Etats-Unis. Sans regrets ?

Avec Stellantis, nous sommes déjà très forts sur ce marché. Et chez Peugeot, nous avons déjà beaucoup de défis sur d'autres marchés où nous avons déjà installé notre notoriété.

Sur l'électrification, pensez-vous avoir fait les bons choix en choisissant de ne pas avoir de gamme dédiée?

Notre stratégie c'est le power of choice (le pouvoir de choisir, ndlr). Nous allons poursuivre cette stratégie avec l'objectif d'une gamme entièrement électrifiée en 2025. Nous avons deux voitures 100% électriques avec la 208 et la 2008. Plus tard, nous lancerons une 308 exclusivement électrique qui s'ajoutera à des versions hybride rechargeable.

Lire aussiStellantis : Carlos Tavares croit enfin à la révolution électrique de l'automobile

D'autres constructeurs ont conçu des modèles entièrement pensés pour l'électrique...

Beaucoup de marchés ne sont pas encore matures pour accueillir ce type de modèles. Mais Stellantis, comme l'a rappelé Carlos Tavares (directeur général du groupe, ndlr), disposera en 2025 d'une plateforme dédiée à l'électromobilité. Nous verrons à ce moment-là quelle stratégie adopter.

Vous avez dit que vous ne changerez pas la stratégie de montée en gamme de Peugeot, les prix ont déjà beaucoup augmenté ces dernières années, faut-il s'attendre à ce qu'ils augmentent encore ?

Ce n'est pas une question de prix. Nous créons de la valeur pour nos clients avec de la technologie et de la qualité perçue. Cette valeur se traduit par une meilleure valeur résiduelle pour nos produits, et nos clients en profitent.

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Commentaires 17
à écrit le 12/05/2021 à 0:19
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Les modèles "phares" de Peugeot et Citroën ont un problème de courroie de distribution qui met en péril le moteur et ... la sécurité des passagers. La récente embellie liée au succès de la 3008 va vite passer et les nuages vont s'accumuler. Peugeot e...

à écrit le 11/05/2021 à 17:15
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Créer de la valeur pour ses clients : elle parle des prix de vente, là ?

à écrit le 11/05/2021 à 14:10
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Et le marché du Canada et des Etats-Unis où les voitures françaises sont inexistantes. Résidant au Canada 6 mois par an, je regrette de ne pas pouvoir acheter une Peugeot ou autre marque française.

le 12/05/2021 à 6:56
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Les constructeurs français ont essayé et ils s'y sont cassés les dents ! Excepté Columbo, aucun américain se voit rouler dans une voiture française qui sont des voitures petites et trop exotiques à leurs yeux. Il suffit juste de voir la taille de leu...

le 12/05/2021 à 18:55
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Les marques françaises pourraient avoir une réelle chance en Amérique du Nord car elles pourraient concurrencer les segments hors Pickup. Le design et l'originalité sont les point forts des marques françaises face aux japonaises et américaines qui...

à écrit le 11/05/2021 à 9:52
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Encore un peu et nous achèterons des marques chinoises. Le succès de Dacia s'est construit autour d'une bagnole fiable sans trop de bidules.

à écrit le 11/05/2021 à 9:51
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Une 404, c'était de la vraie valeur pour les clients. Inusable, réparable, une vraie Peugeot. Quasiment une voiture pour la vie. Peugeot aujourd'hui, de la valeur pour ses actionnaires, plus pour longtemps, noyés dans Stellantis.

à écrit le 11/05/2021 à 9:11
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Le Cartel de l'auto-mobile, la voiture téléphone ! Ils ont tous des participations croisées des projets en commun, c'est hallucinant, que font les autorités de la concurrence ? Il y a entente sur les niveaux des prix, arbitrairement élevés pour ré...

le 11/05/2021 à 10:48
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Achetez d'okaze et vous aurez regle le pb.

à écrit le 11/05/2021 à 8:45
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"créer de la valeur pour ses clients": çà veut dire quoi pour l'acheteur potentiel basique, qui cherche une voiture adaptée à ses besoins (et non à ceux de 'état), sûre, fiable, économique à l'usage, et d'un prix abordable ? Peugeotiste de longue dat...

à écrit le 11/05/2021 à 8:16
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La vache j'ai l'impression de lire toujours les mêmes titres concernant Peugeot depuis plus de 20 ans. "Hier la France, aujourd'hui l'europe, demain le monde !" Ok les gars ok, ben percez d'abord et parlez ensuite pour changer svp hein, merci.

à écrit le 11/05/2021 à 8:01
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je ne suis pas sur que l'on puisse dire que Citroen soit une grande réussite pour ce qui est des marques anglaises l'embellie fut de courte durée. Aujourd'hui le Lion par des prix très élevés est en difficulté sur des marchés très concurrentiels. L'E...

à écrit le 11/05/2021 à 7:59
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'Créer de la valeur' phrase stéréotypée qui ne veut rien dire. Que Peugeot se contente de faire des voitures et ce sera très suffisant...

le 11/05/2021 à 8:48
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C'est le credo capitaliste. Le premier devoir d'une entreprise c'est de "créer de la valeur pour l'actionnaire" en anglais "create value for the shareholder"... C'est sur toutes les premières pages des entreprises cotées à destination des investiss...

le 11/05/2021 à 9:00
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D'autant plus qu'il s'agit de créer de la valeur pour........ les clients... Avec des bagnoles qui perdent 30 % la première année et 50% au bout de 3 ans, faudra qu'on m'explique ou et la création de valeur.

à écrit le 11/05/2021 à 7:53
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Mais on préfèrerait qu'ils fassent des bagnoles.... Les valeurs, on ne les a pas attendu pour en avoir. Au passage et parce que je suis un vieux schnock grincheux, J'ai connu le temps où Peugeot faisait de l'outillage, du vrai qui durait, pas de ...

le 11/05/2021 à 9:55
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Je confirme pour la qualité de leur outillage. Hélas, pas d'industrie sans état fort, c'est ce qui se dit parait-il.

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