On aurait pu penser que la multiplication du nombre de voitures électriques en Europe allait abaisser le prix moyen sur le Vieux continent. Il n'en est rien. Non seulement, les prix continuent d'augmenter mais en plus, la concurrence chinoise creuse l'écart. Récemment, la marque Citroën a commencé cette lancée vers les voitures électriques d'entrée de gamme avec sa ë-C3 à 23.300 euros pour 2024 et une nouvelle, à moins de 20.000 euros en 2025. Mais c'est encore très loin des voitures électriques qui commencent à... 4.000 euros en Chine.
Une accélération d'autant plus surprenante qu'en 2015, le rapport de force était inversé. Il y a dix ans, le peu de voitures électriques qui circulaient sur notre continent, à savoir la Renault Zoe ou encore la Nissan Leaf, étaient encore moins chères que la moyenne des véhicules chinois.
Au premier semestre 2022 en revanche, la moyenne d'un véhicule électrique chinois était de 31.829 euros contre 55.821 euros en Europe (hors subventions dans les deux cas), soit 75 % plus élevé, d'après une étude du cabinet spécialisé Jato, basé en France. Un an plus tard, cet écart s'est encore creusé, il est désormais de 115 %, avec une moyenne européenne qui atteint même les 68.023 euros tout véhicule électrique confondu, selon les chiffres du cabinet ainsi que divers relevés du marché (Agence internationale de l'énergie, association des constructeurs européens...). Même constat entre la Chine et les Etats-Unis. Les prix des voitures chinoises, de leur côté, ne font que baisser.
Les petites voitures à l'origine de cet écart
À l'origine de cette baisse dans l'Empire du milieu : l'arrivée des petites voitures. « La petite voiture du constructeur chinois Wuling baptisée Hongguang Mini EV a eu un succès immense avec son prix très abordable. Les autres constructeurs en Chine ont dû s'aligner sur ce prix », explique Felipe Munoz, analyste chez Jato.
Et pour cause, cette petite citadine, vendue autour de 4.000 euros, est même moins chère que les modèles thermiques en Chine. Et le constructeur va plus loin, en la proposant à 2.600 euros sans la batterie, qu'il faut louer. En comparaison, la voiture électrique actuelle la moins chère en Europe est la Dacia Spring, à 20.000 euros hors bonus et produite... en Chine ! Certes, cette dernière affiche un habitacle bien plus grand que la voiture chinoise mais l'autonomie de la batterie est sensiblement équivalente.
Comment les constructeurs chinois parviennent-ils à ces prix ? Déjà, la Chine possède 10 ans d'avance sur l'Europe sur les infrastructures pour la technologie électrique, en particulier les batteries, ce qui lui permet de baisser ses coûts. Ensuite, l'énergie dans le pays ainsi que les coûts de main-d'œuvre sont moins élevés qu'en Europe.
Mais cela ne justifie pas un tel écart.
L'Europe mise sur le premium
La majeure différence se trouve au niveau des modèles proposés. Sur les 235 modèles de voitures électriques en Chine, 181 sont en dessous des 40.000 euros soit 77 % contre seulement 23 % en Europe. Quand les constructeurs européens assument leur montée en gamme pour contrer les diminutions de ventes de voitures, les constructeurs chinois proposent, de leur côté, des véhicules électriques pour tous les budgets. Bien sûr, les subventions du gouvernement chinois ont largement permis de développer le marché et de voir arriver de nouveaux acteurs, tirant un peu plus les prix vers le bas.
Mais le gouvernement a également pris le parti de développer les voitures d'entrée de gamme électriques, en témoigne le réseau des bornes de recharge en Chine. En effet, ce dernier ne distingue pas la recharge ultra-rapide, en moins de 20 minutes, de la recharge normale qui prend plusieurs heures, contrairement à l'Europe.
Or, les véhicules premium électriques des constructeurs européens capitalisent sur cette charge rapide pour expliquer leur prix. En Chine, ces voitures sont donc logées à la même enseigne que les autres et perdent, de fait, leur valeur.
S'associer avec des entreprises chinoises
À l'avenir, « l'Europe devra impérativement réduire le prix de ses voitures électriques », prévient Jato, sans quoi les constructeurs chinois prendront les parts du marché. Pour cela, le cabinet, qui vend des solutions de comparaisons pour les professionnels du marché, salue les récentes décisions de certains constructeurs européens de s'associer aux entreprises chinoises. C'est le cas de Volkswagen et de Saic ou encore plus récemment de Stellantis avec Leapmotor. « Les constructeurs chinois ont besoin de cette collaboration avec les Européens pour asseoir leur image en Europe », confirme Felipe Munoz.
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