Le vent n'a pas encore tourné sur le marché, morose, du crédit immobilier. Le total des montants accordés a atteint 129,5 milliards d'euros. Soit un plus bas historique depuis huit ans.
Il faut en effet remonter à 2015, année où les taux d'intérêt étaient plus bas, pour obtenir un montant de crédits à l'habitat accordés aux particuliers résidents plus faibles, à 120 milliards d'euros. On est ainsi bien loin des mois fastes au-dessus de 20 milliards d'euros de production mensuelle de crédits, comme en octobre 2020, mai, juin et juillet 2021 ou encore avril et mai 2022, portés par un effet de rattrapage après des périodes de confinement et par la volonté des emprunteurs en 2022 de profiter de taux encore attractifs avant la remontée annoncée.
Le taux moyen n'est plus repassé sous la barre des 2,5% depuis un an
Les ménages sont depuis moins enclins à emprunter, à cause de la remontée des taux directeurs effectuée par la Banque centrale européenne (BCE) depuis mi-2022, répercutée par les banques. Alors que le taux moyen évoluait sous les 1,1% jusqu'en mars 2022, il n'est plus repassé sous la barre des 2,5% depuis un an. L'encours total de crédits immobiliers reste cependant important avec près de 1.300 milliards d'euros.
La Banque de France a toutefois observé un ralentissement du taux d'intérêt moyen de ces prêts, qui n'a pratiquement pas progressé en décembre (4,04%, après 3,99% en novembre), et note que « ceux de certains de nos voisins européens ont déjà entamé un repli. » Malgré cette stagnation des taux, la production de crédits à l'habitat a continué de reculer en décembre pour atteindre 8,2 milliards d'euros sur le mois, au plus bas depuis décembre 2014. Par ailleurs, les banques sont refroidies par des niveaux de salaires qui stagnent et les prix des biens qui restent élevés.
Sensible chute des permis de construire délivrés
Conséquence : sur l'ensemble de l'année 2023, les permis de construire délivrés pour les maisons ont chuté de 29%. Il en va de même des mises en chantier de maisons (-25,2%), avec 121.200 logements commencés, « le plus bas niveau enregistré depuis 2000 », selon le ministère de la Transition écologique. Les permis délivrés pour des logements collectifs ou en résidence baissent aussi de 20,2% sur un an, de même que les mises en chantier (-19,5%).
Ces chiffres sont à rapporter au record de délivrances de permis atteint en 2022 après un afflux de demandes de permis fin 2021, et avant l'entrée en vigueur d'une réglementation environnementale (RE2020) plus ambitieuse pour la construction neuve. Mais depuis août 2022, le nombre de permis délivrés chaque mois s'était stabilisé à seulement 30.000 par mois. « On glisse vers la pente dangereuse de la non-livraison de logements pour les besoins de la population française », a déclaré mardi le président de la Fédération française du bâtiment, Olivier Salleron. « Si la tendance s'affirme, mais ce sera le cas, on va construire moins de 250.000 logements à la fin 2024, ce qui est deux fois moins que ce qu'il faudrait. On creuse le déficit d'année en année. »
Les Français sont en moyenne endettés pour 23 ans lorsqu'ils achètent leur résidence principale, les primo-accédants - qui représentent la moitié des emprunteurs - l'étant pour sept mois de plus, selon la Banque de France.
Il est de plus en plus difficile de trouver un appartement à louer en France avec, fin 2023, une baisse de l'offre locative de 36% en deux ans, encore plus forte à Paris, avec 50% en un an, a indiqué fin janvier SeLoger, site spécialisé dans les transactions immobilières. La hausse des taux d'intérêt a eu un impact sur le nombre des biens à louer. « Contraints de renoncer à leur projet d'achat, de nombreux primo-accédants ne libèrent (...) pas leur location », explique SeLoger. La baisse de l'offre locative, « face à une demande grandissante », entraîne « mécaniquement une hausse des loyers ». Ils ont augmenté de 3,5% en 2023 en France, selon le communiqué de la plateforme. A Paris, au 1er janvier 2024, « le stock d'annonces d'appartements à louer s'amenuise considérablement avec une réduction de -74% sur trois ans », affirme SeLoger. La baisse est même de 50% en un an. Cette « baisse fulgurante » pourrait notamment s'expliquer par l'interdiction de la location des logements qui consomment plus de 450 kilowattheures par mètre carré par an, l'encadrement des loyers ou encore l'impact des Jeux olympiques dans la capitale cet été, « qui booste la location saisonnière », avance SeLoger.La hausse des taux d'intérêt pèse sur le marché de la location
(Avec AFP)
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