Ukraine : Egis à l'affût des futurs marchés de la reconstruction

Peu après le début de l'invasion russe, l'entreprise spécialisée dans le conseil, l'ingénierie et l'exploitation des infrastructures en France et à l'international, Egis, se positionnait en mars 2022 sur l'immense marché du bâtiment et des travaux publics post-guerre. Deux ans plus tard, le directeur adjoint Ukraine, Caucase et Asie Centrale, Alexei Kramer Gittelson, revendique l'entreprise comme « leader en ingénierie et en conseil ». Explications.
César Armand
Rien que pour 2024, les autorités ukrainiennes ont calculé que le pays avait besoin de 14 milliards d'euros (Photo d'illustration).
Rien que pour 2024, les autorités ukrainiennes ont calculé que le pays avait besoin de 14 milliards d'euros (Photo d'illustration). (Crédits : RFE/RL/SERHII NUZHNENKO)

Volodymyr Zelensky ne devrait pas repartir les mains vides du palais de l'Elysée. Avant même la visite du président ukrainien en France ce vendredi 16 février, la présidence de la République a fait savoir à la presse que le nouvel accord signé entre Kiev et Paris porterait sur un « soutien économique et en matière d'assistance civile pour renforcer la résilience de l'Ukraine » en plus du « soutien militaire dans la durée ».

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Un immense marché sur lequel se positionne Egis depuis 2022

Et pour cause, quasiment deux ans jour pour jour après l'invasion russe, le gouvernement Chmyhal, la Banque mondiale, la Commission européenne et l'organisation des Nations unies (ONU) viennent d'estimer le coût total de la reconstruction et de la relance à 452,8 milliards d'euros sur dix ans.

Rien que pour 2024, les autorités ukrainiennes ont calculé que le pays avait besoin de 14 milliards d'euros. Si environ 5,1 milliards ont été trouvés dans ses ressources et auprès de ses partenaires internationaux, il manque encore 8,9 milliards d'euros. Et ce sachant que le logement, les transports, le commerce, l'industrie et l'énergie demeurent les secteurs les plus touchés.

Un immense marché sur lequel se positionne, depuis mars 2022, la société Egis, spécialisée dans le conseil, l'ingénierie et l'exploitation des infrastructures en France et à l'international. « Pour la reconstruction du pays, les bâtiments et les infrastructures, nous serons un acteur-clé », affirmait son directeur général Laurent Germain, également président du Medef International France-Ukraine.

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200 collaborateurs sur place répartis sur plus de 30 projets

Avant le conflit, l'Ukraine ne représentait que 9 millions d'euros sur le 1,16 milliard d'euros de son chiffre d'affaires et l'entreprise française s'y présentait comme le premier ingénieriste entre le métro de Kharkiv, des usines de traitement de l'eau à Marioupol ou encore la supervision de routes. Le tout avec 170 salariés français et locaux.

Présente sur place depuis 1993 avec une entité locale à Kiev depuis 1996, Egis y compte aujourd'hui 200 collaborateurs, dont 150 ingénieurs et 50 gestionnaires de projets, répartis sur plus de 30 projets, déclare, à La Tribune, le directeur adjoint Ukraine, Caucase et Asie Centrale, et directeur du développement commercial, Alexei Kramer Gittelson,

Pour le compte de clients historiques comme la Banque européenne d'investissement (BEI), la Banque européenne pour la reconstruction et le développement (BERD) ou la Banque mondiale, la compagnie tricolore réalise des missions de conseil et d'ingénierie dans des secteurs comme le chauffage urbain, le bâtiment, les déchets, l'énergie et les transports.

Des acteurs « glocaux » face à la concurrence internationale

Egis est ainsi en train d'élaborer le schéma directeur de la reconstruction de la ville de Tchernihiv, un programme co-financé par la direction générale du Trésor et Bpifrance. Mais aussi le plan de transport à l'échelle nationale, subventionné par l'Union européenne. Ou encore l'étude de faisabilité sur l'approvisionnement en eau à Mykolaïv.

« Depuis l'invasion à grande échelle, les banques se sont retirées de l'Ukraine mais elles commencent à revenir. Après la BEI, l'Agence française de développement (AFD) pourrait faire son retour. Entre les deux, l'ONU, l'UE et les ONG sont revenues sur le marché pour l'aide humanitaire et la reconstruction des bâtiments et des infrastructures critiques », explique Alexei Kramer Gittelson, présent en Ukraine depuis 2017.

Les Français se définissent, eux, comme des acteurs « glocaux », c'est-à-dire des partenaires locaux à l'expertise globale. « Les ingénieristes qui ne sont pas historiquement présents se tournent vers nous pour coopérer et déployer leurs programmes », assure ainsi, et de manière surprenante, le représentant d'Egis à Kiev.

D'autant que les Américains subventionnent des projets directeurs via l'Agence des Etats-Unis pour le développement international (USAID). Idem avec les Britanniques et les Japonais finançant directement la reconstruction sans passer par les bailleurs de fonds. Sans oublier les Scandinaves et leur fonds Nordic Environment Finance Corporation (Nefco).

L'entreprise française se revendique « leader en ingénierie et en conseil »

Malgré la présence de tous ces concurrents internationaux, l'entreprise française se revendique « leader en ingénierie et en conseil ». « Peu d'entreprises prennent le risque d'entrer sur ce marché. Nous sommes très optimistes et enthousiastes, sachant que nos activités vont continuer grâce au maintien de notre position », martèle ainsi Alexei Kramer Gittelson.

Il en veut pour preuve que « les Ukrainiens commencent à être prêts et préparent la résilience de long-terme » et avance un chiffre d'affaires de 10 millions d'euros pour 2023. Et ce même si les partenariats public-privés, qui prévoient des loyers versés par les administrations aux sociétés privés, ne sont pas encore à l'ordre du jour.

« Le gouvernement Chmyhal y est ouvert, mais cela nécessite quelques réformes », estime le dirigeant d'Egis. Aussi ce dernier a déjà sa liste de courses en tête concernant de potentiels partenariats publics-privés : eau, énergie, routes... et aéroports. « Avant la guerre, Egis pensait investir dans les aéroports. Dans un futur proche, cela nous pourrait nous intéresser », annonce-t-il ainsi. Affaire à suivre...

César Armand

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Commentaires 7
à écrit le 18/02/2024 à 6:26
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Et si l'Ukraine perd ce qui est malgré tout le plus probable les sociétés russes chinoises coréennes(Nord) iraniennes se partageront les chantiers de reconstruction mais à leurs frais😁 autrement dit pas grand chose .

à écrit le 17/02/2024 à 12:53
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Si on se réfère à certains écrits, BlackRock va organiser les investissements pour le redressement de l'économie ukrainienne. Volodymyr Zelensky et le président de BlackRock Larry Fink vont coopérer pour la reconstruction de l'Ukraine.Blackrock le pl...

à écrit le 17/02/2024 à 8:57
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Je propose que l'argent public rembourse tout ce temps de retard de versement de dividendes et de signatures de contrats aux actionnaires à cause de cette guerre. Désolé on pensait pas que ce serait aussi long ! Mais on va vous rembourser ô grands ma...

à écrit le 17/02/2024 à 4:33
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La naïveté française est affligeante, qui croyez vous sera le grand gagnant de la reconstruction de l'Ukraine ? la réponse est évidente comme en Irak les compagnies US vont truster le marché, et cela est logique car les USA sont le soutien financier ...

le 17/02/2024 à 12:49
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C'est à dire qu'au 01/02/24 l'UE avait versé à l'Ukraine 85 Md€ d'aides : militaires, financière, techniques et humanitaires. Il ne s'agit pas de promesses qui peuvent s'étaler sur plusieurs années, comme les 50 Md récemment votés par l'UE, qui sont...

le 17/02/2024 à 13:44
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Et si l'Ukraine perd ce sera les sociétés russes qui auront les chantiers...

le 17/02/2024 à 18:07
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@Ménon russes, chinoises, voir nord-coréennes.

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